
Photo M.A.
Le secteur bancaire sera en grève à partir de mardi et jusqu’à nouvel ordre. Seuls les distributeurs automatiques de billets (ATM) seront opérationnels. C’est ce qu’a décidé l’Association des banques du Liban (ABL) suite à une réunion de son assemblée générale lundi en réaction à la décision prise la semaine dernière par la Cour de cassation à l’encontre de Fransabank. Si le litige opposant cette dernière à Ayad el-Gharabaoui Ibrahim et son épouse Hanane Maroun el-Hajj Ibrahim ne porte que sur quelques dizaines de milliers de dollars, il a été très médiatisé depuis l’hiver dernier, sous le poids notamment du collectif d’avocats Mouttahidoun (Unis) qui s’est mobilisé pour ces deux déposants.
Ce n’est pas la première fois que ce dossier pousse l’ABL à la grève. Les banques avaient fermé les portes de leurs agences pendant deux jours, en mars, lors de la première décision prise par une juge de l’exécution à l’encontre de Fransabank dans ce même dossier. « Cette nouvelle grève aurait pu être annoncée la semaine dernière, mais une partie des membres de l’ABL n’était pas convaincue. Des discussions ont eu lieu et un nombre suffisamment important de banques se sont finalement résolues à la soutenir », a dévoilé à L’Orient-Le Jour une source bancaire non autorisée à parler à la presse.
Un « précédent très grave »
Depuis plus d’un an, Ayad el-Gharabaoui Ibrahim et son épouse réclament à Fransabank la restitution de leurs fonds en devises en espèces, donc à leur valeur réelle. La banque, qui restreint comme tout le reste du secteur l’accès des déposants à leurs comptes en devises depuis le début de la crise sans être habilitée à le faire par une loi de contrôle des capitaux, avait décidé de fermer les comptes des deux plaignants et restituer leurs fonds sous forme de chèque bancaire.
Or, suite à ces mêmes restrictions que les autorités ont laissé perdurer et que la Banque du Liban s’est contentée de gérer – ou de conforter, selon les points de vue –, les chèques en dollars forcément liés aux comptes restreints, et non à ceux d’argent dit « frais », ne peuvent plus être décaissés sans subir de décote importante, que ce soit auprès du secteur bancaire ou du marché informel de chèques qui s’est développé avec la crise.
À l’issue de plusieurs mois de procédures, la Cour de cassation a rendu un jugement favorable aux déposants sur un point de procédure en cassant la décision de la cour d’appel, qui avait suspendu l’ordonnance d’un juge demandant de mettre sous scellés les actifs de la banque le temps que le litige soit jugé sur le fond.
« C’est vrai que la Cour de cassation a cassé la décision prise en appel sur ce point et a renvoyé le dossier à la juridiction de première instance pour régler le litige sur le fond. Mais le fait qu’elle ait pris le parti des déposants, qui demandent à ce que leurs fonds soit payés en cash, laisse peu de doutes quant à l’issue définitive de la procédure et crée un précédent très grave pour le secteur bancaire », a considéré un second cadre de banque sous anonymat que nous avons contacté. « Fransabank peut gagner du temps, mais c’est tout. Et maintenant que ce jugement en cassation est entré dans la jurisprudence, un effet boule de neige est à craindre sur les procédures lancées contre des banques au Liban comme à l’étranger », complète-t-il.
L’ABL ne dit pas autre chose dans son communiqué et réclame l’adoption d’une loi instaurant un contrôle formel des capitaux pour envisager une réouverture. Une telle proposition de loi a bien été validée en janvier par les commissions parlementaires mixtes, mais n’a toujours pas été votée par les députés. Les détracteurs du texte lui reprochent d’être encore trop favorable aux banques, même si certaines dispositions problématiques ont été supprimées par les commissions.
Les restrictions bancaires combinées à la dépréciation de la livre ont imposé une ponction (un haircut) de facto à de nombreux déposants. Si nombre d’entre eux se sont pourvus en justice, seuls quelques-uns ont obtenu gain de cause en attaquant leur banque en justice à l’étranger.
Le secteur bancaire sera en grève à partir de mardi et jusqu’à nouvel ordre. Seuls les distributeurs automatiques de billets (ATM) seront opérationnels. C’est ce qu’a décidé l’Association des banques du Liban (ABL) suite à une réunion de son assemblée générale lundi en réaction à la décision prise la semaine dernière par la Cour de cassation à l’encontre de Fransabank....
commentaires (12)
Le chien ne mord pas son frère, bien au contraire !
Politiquement incorrect(e)
18 h 06, le 07 février 2023