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Nos Lecteurs ont la Parole

La roche Tarpéienne est près du palais de l’injustice

La notion du temps du ministre de l’Intérieur de l’époque a l’air bien différente de la nôtre. Il s’est écoulé plus de deux ans depuis sa promesse populiste, sans surprise, non tenue. Le sang des victimes est encore bien vif, les larmes de leurs proches coulent toujours, le peuple n’a pas abandonné la quête de la vérité, mais l’impunité reste de mise. Astucieux stratagème qu’est celui de l’amnésie. Nos dirigeants actuels, criminels de guerre dans une autre vie, en ont l’habitude. Si tous les genres de crimes contre l’humanité, dont ils étaient coupables durant la guerre civile, ont été effacés par une amnistie inconditionnelle auto-octroyée en 1991, pourquoi s’inquiéter du drame du 4 août ? Après tout, il y a bien pire qu’une double explosion au port. Le bilan a beau être lourd : plus de 200 morts, plus de 6 000 blessés, une capitale éventrée, une nation blasée qui ne vit que pour l’espoir de la vérité… Mais il en faut décidément beaucoup plus pour secouer nos politiciens qui considèrent les faits comme « une série de négligences et d’incompétences accumulées au fil des ans et à différents niveaux », à en croire les mots d’un certain président.

Le palais de l’injustice est désert, alors que les rues, elles, sont bondées. Le stratagème a échoué, malgré l’intégration d’une nouvelle variante à leur jeu macabre dont le but est de masquer leur crime : faire diversion. Enivrer le peuple, de peur, de manque, lui ôter tout ce qu’il possède jusqu’à sa dignité, l’humilier, l’affamer, l’appauvrir, jusqu’à ce que son seul et unique objectif se cristallise en la survie, du moins jusqu’au lendemain. Noyer le drame dans l’oubli, faire en sorte que plus personne n’en parle, faire croire aux gens que la justice se trouve dans une impasse totale. Glorieux plan pour nos politiciens qui ne manquent pas de créativité quant à l’exercice de la corruption. Sauf qu’il existe une faille dans leur raisonnement : ils ne sont pas crédibles. Et le peuple le sait très bien. La rage se propage comme du napalm dans les foules, les rues s’embrasent et un semblant d’ultimatum est lancé. L’impéritie publique n’explique pas l’imbroglio judiciaire. Preuve en est, un mandat d’arrêt a été délivré contre William Noun, quelques heures seulement après qu’il aurait commis « le crime odieux » de jeter des pierres sur le palais de l’injustice.

Quand il s’agit de s’en prendre aux citoyens, qui ont pour seule arme leur voix, tout le monde est à son poste, la justice fait parfaitement son travail.

Quand il s’agit de juger des personnes qui ont indirectement ou directement pris part à un crime contre l’humanité, la justice est paralysée. Dans un pays en crise comme le nôtre, on pourrait penser que toutes les institutions sont naturellement à l’arrêt et, de ce fait, l’un des piliers de l’état de droit l’est aussi. Mais la vérité est que la justice, sélective et loin d’être indépendante, choisit qui elle jugera et quand elle le fera. Bien plus que la corruption chronique qui gangrène le corps du pays, l’impunité est le plus dangereux des narcotiques, le plus puissant des opiums et la plus grande menace pour la survie de l’État. Le tribunal ne verra peut-être pas défiler tous les criminels, mais la tribune que j’ai, si.

Dénouement amer pour nos dirigeants qui pensaient s’en sortir indemnes une fois de plus. Les embûches qu’ils dressent dans l’affaire, leur comportement honteux envers les familles des victimes, leur opposition farouche à une internationalisation de l’enquête, la mise en place d’un état policier, tout leur forge le profil de coupables dans le drame du 4 août. Ils jugulent les protestations, intimident le peuple, lynchent la foule. S’ils voulaient se disculper de toute culpabilité, c’est le contraire qui se produit, ils ne font que confirmer leur implication dans le drame.

La vérité n’a pas encore triomphé (bien qu’elle soit d’une évidence limpide pour le peuple). Je ne saurais pas déterminer quand, mais leur légitimité dévolue sera illicite, disons mieux, leur visage sera démasqué et éclatera au grand jour.

Deux messages importants à tirer : un, le peuple n’est pas dupe ; deux, les « politiciens » sont priés de relire la première leçon.

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La notion du temps du ministre de l’Intérieur de l’époque a l’air bien différente de la nôtre. Il s’est écoulé plus de deux ans depuis sa promesse populiste, sans surprise, non tenue. Le sang des victimes est encore bien vif, les larmes de leurs proches coulent toujours, le peuple n’a pas abandonné la quête de la vérité, mais l’impunité reste de mise. Astucieux...

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