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Nos Lecteurs ont la Parole

« Les Français sont des veaux »

« Les Français sont des veaux »

Photo d’archives « L’OLJ »

Dans son livre De Gaulle, mon père, Philippe de Gaulle rapporte la réaction de son père après l’armistice de 1940 : « Les Français sont des veaux, ils sont bons pour le massacre, ils n’ont que ce qu’ils méritent, ils sont comme cela depuis les Gaulois. »

Que peut-on dire des peuples arabes et des Libanais, en particulier, mais surtout des dirigeants ! Les Libanais sont découragés, épuisés, mal guidés et surtout mal gouvernés. La majorité s’en rend compte, mais reste bernée, aveuglée et abusée par un manque de discernement. Cette majorité est subjuguée par les chefs et se laisse guider comme intoxiquée perdant tout raisonnement et toute critique ou toute révolte. À noter que nos responsables abusent avec une violence réelle et symbolique qui est d’autant plus opérante qu’elle est acceptée par le peuple dominé. D’ailleurs ce peuple peine à penser sa relation avec les dominants. La délinquance des politiques et des riches exploitants n’a d’autre nom que la trahison et l’abus de confiance. Les élus et les responsables trahissent la confiance du peuple qui leur donne mandat de légiférer et surveiller l’action du gouvernement pour l’intérêt général.

De plus leur mandat n’est pas de mettre une feuille blanche de blocage ou d’annulation du devoir de cette Assemblée nationale. D’ailleurs cette Assemblée n’est qu’un lieu de discorde par les positions négatives qui vident les postes de l’État de leur efficacité et de leur affectation. Et le gouvernement n’arrive plus à guider et à surveiller l’administration. Que font les Libanais pendant ce temps ? Ils sont presque à une période révolue où les dieux conduisaient l’histoire et presque heureux dans leur ignorance.

Que dit le vulgum pecus à tous les niveaux ?

Que disent les Libanais pendant leurs dîners ?

Que disent-ils à la plage avec des échanges vides et rassurants ?

D’autres se délectent dans les salons avec les potins et les secrets d’alcôves.

Dans les cafés entre jeux de cartes et trictrac se règlent les problèmes du monde et les solutions pour la guerre Russie-Ukraine. Dans sa misère, le peuple navigue entre le droit à la paresse et la passivité pour échapper au droit au travail et à l’action.

Tous commentent les déclarations des chefs politiques, chacun à sa manière avec une profonde conviction. Les politiques, ténors de la bêtise, alimentent la société du spectacle. Nos politiques rivalisent avec nos voisins dans les pays arabes qui avancent de défaite en défaite croyant voler vers des victoires chimériques.

Et notre peuple souffre sans réagir. A-t-il choisi la servitude à la révolte ? Il subit les impôts d’un gouvernement incapable pour colmater les déficits du budget d’un État en faillite.

Dans une pièce de théâtre d’Antoine Rault Le Diable rouge, on assiste à un dialogue de fiction entre Mazarin, ministre de Louis XIV, et l’intendant Colbert. « Quand un individu fait faillite, il est condamné à la prison, mais on ne peut pas jeter l’État en prison. » Et Colbert de répondre : « On ne peut pas taxer les pauvres plus qu’ils ne le sont déjà. Les riches non plus, ils ne dépenseraient plus. » Et Mazarin de répondre : « Il y a quantité de gens entre pauvres et riches, des honnêtes citoyens, qui travaillent rêvant de devenir riches, et redoutant d’être pauvres, ce sont ceux-là que nous devons taxer encore plus, ils vont travailler pour compenser, c’est un réservoir inépuisable, plus tu leur prends, plus ils travaillent. » Au Liban ces travailleurs n’ont plus de travail, ils sont inconscients de leurs droits, jouissant d’une certaine roublardise pour échapper à l’impôt avec la complicité des responsables. Avec des frontières ouvertes aux trafiquants, l’aéroport et le port, sources de revenus pour les groupes dominants et non pour l’État, la faillite est assurée. Pour redresser la situation, nous avons besoin d’un président visionnaire, d’un gouvernement compétent et actif capable d’agir, d’un Parlement travailleur et productif pour des lois et non pour des contre-lois. C’est notre espoir en attendant de voir des femmes et des hommes d’État prendre la relève.

Le Libanais se retrouve dans une bulle solipsiste qui pense que son moi et ses sensations sont sa seule réalité, en dehors de tous les autres. C’est une situation de déviance mentale avec ses travers et ses errements. Notre Constitution est un régime démocratique et parlementaire et un système économique libéral. Mais notre malheur provient des personnes qui ont le pouvoir sur le fonctionnement de cette Constitution. La plupart de ces personnes sont guidées de l’extérieur pour les intérêts d’autres pays. Nos responsables cultivent la politique de la rancune et du profit égoïste aux dépens de tout le pays. Les responsables du pays semblent incapables de penser le Liban d’une façon rationnelle… viable, respectant l’autre et acceptant le vivre-ensemble. Quand on déchaîne l’irrationnel, il faut s’attendre à une réaction agressive d’un peuple même s’il est pacifiste. Notre malheur est que notre géographie imprime notre politique et nous déstabilise presque jusqu’à l’anéantissement. Notre peuple malgré ses souffrances peut réagir, quelqu’un doit allumer la flamme, montrer le chemin. Comme la France résistante a su relever le défi avec ses alliés, le Liban peut le faire avec ses amis. Sachant qu’une nation est une mémoire de gloire et de défaite, une grande majorité de Libanais aspire à retrouver cette nation tant rêvée et capable de se reconstruire. Des personnes responsables pourront travailler pour une bonne gouvernance pour guider le pays loin du chaos et loin des forces maléfiques. Gouverner c’est aider toutes les couches sociales à s’émanciper dans une ambiance de liberté, respectant les grands principes humains, respectant les sensibilités de tous qui peuvent se rencontrer et non s’entre-déchirer. Nous pouvons trouver les solutions ou bien travailler à les construire.

Psychiatre, psychanalyste

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Dans son livre De Gaulle, mon père, Philippe de Gaulle rapporte la réaction de son père après l’armistice de 1940 : « Les Français sont des veaux, ils sont bons pour le massacre, ils n’ont que ce qu’ils méritent, ils sont comme cela depuis les Gaulois. »Que peut-on dire des peuples arabes et des Libanais, en particulier, mais surtout des dirigeants ! Les Libanais sont...
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