
Des députés sunnites réunis sous l'égide du mufti de la République Abdellatif Deriane à Dar el-Fatwa, le 24 septembre 2022. Photo ANI
Devant la majorité des députés sunnites au Liban, le mufti de la République, le cheikh Abdellatif Deriane, a plaidé samedi pour l'élection d'un président "rassembleur" avant une échéance électorale, lors d'une réunion à Dar el-Fatwa qui ne fait pas l'unanimité sur la scène locale et qui intervient à près d'un mois de la fin du sexennat du chef de l’État Michel Aoun.
Le dignitaire sunnite s'est parallèlement dit "optimiste" quant à la formation d'un nouveau gouvernement "dans les prochains jours", rejoignant ainsi la position d'autres partis politiques libanais, notamment le Hezbollah, alors que le cabinet sortant du Premier ministre désigné Nagib Mikati gère les affaires courantes depuis le 22 mai. Ce retard est dû à un bras-de-fer politique entre M. Mikati et le président Aoun, mais qui semble avoir été assoupli ces derniers jours.
Le profil du nouveau président
Dans son discours samedi à Dar el-Fatwa, Abdellatif Deriane a dressé le portrait du prochain président de la République, évoquant quatre caractéristiques auxquelles le chef de l’État qui sera élu devrait répondre. "Le nouveau président doit préserver les constantes de Taëf et de la Constitution, le vivre-ensemble et les lois libanaises, arabes et internationales. Ces constantes ne peuvent pas être violées, indépendamment des divergences des opinions politiques, car elles sont les garantes du système et de la stabilité de l'entité nationale", a-t-il dit.
"Le nouveau président doit aussi mettre un terme aux fausses discordes et querelles confessionnelles concernant les prérogatives (du chef de l’État maronite et du Premier ministre sunnite) et prôner une séparation des pouvoirs conformément à la Constitution", a-t-il renchéri.
Le mufti a précisé que le président de la République qui sera élu doit "disposer des caractéristiques d'une personnalité de la sphère publique et politique qui soit responsable et qui ait une conscience". Enfin, il a estimé que ce président doit avoir "de la sagesse, le sens des responsabilités nationales et de l'honnêteté. Il doit être capable de rassembler les Libanais et œuvrer pleinement avec les pouvoirs constitutionnels et les institutions pour sortir le pays de ses crises et éviter son effondrement total". Abdellatif Deriane a aussi appelé à l'élection d'un chef de l’État "qui ne soit ni la cause du problème ni qu'il en fasse partie". "Nous voulons un président à qui nous pouvons faire confiance", a-t-il insisté.
Il a dans ce cadre exhorté les députés à "contribuer au changement et à œuvrer pour que la République retrouve son rôle". "Vous êtes responsables de l'élection d'un président ou de son absence, quelles qu'en soient les raisons", a-t-il mis en garde.
Un gouvernement "dans les prochains jours"
Abdellatif Deriane a par ailleurs souligné l'urgence de former une nouvelle équipe ministérielle, tout en mettant en garde contre "toute atteinte aux prérogatives du Premier ministre", dans une critique à peine voilée au président de la République Michel Aoun. "Nous plaidons pour que l'on ne touche pas aux prérogatives de la présidence du Conseil et à faire tout notre possible pour aider le Premier ministre désigné dans sa mission", a dit le mufti. Il a aussi affirmé qu'il est "optimiste" quand à la formation rapide d'un nouveau gouvernement dans les prochains jours", estimant que "le Liban a besoin d'un cabinet de plein pouvoirs et non d'un cabinet d'expédition des affaires courantes".
Le discours du mufti Deriane a été suivi d'une réunion à huis-clos avec les députés conviés. A l'issue de celle-ci, les députés se sont engagés à élire, "dans les délais légaux, avec le reste du Parlement un nouveau président, qui respecte la Constitution et le serment constitutionnel par fidélité au peuple libanais et ses intérêts".
La réunion à laquelle le mufti a convié tous les parlementaires sunnites est destinée à souder les rangs éparpillés de cette communauté depuis le départ du chef du Courant du Futur Saad Hariri aux Émirats arabes unis et la suspension de ses activités politiques. Elle a été suivie d’un dîner au siège de l’ambassade d’Arabie saoudite à Yarzé. Plusieurs députés ont boycotté cette réunion, notamment les deux élus issus de la contestation populaire, Ibrahim Mneimné et Halimé Kaakour, ainsi que le député indépendant Oussama Saad. D’autres comme Mohammad Yehia (groupe aouniste), Yanal Solh et Melhem Hojeiri (élus sur la liste commune du Hezbollah et d'Amal à Baalbeck-Hermel) avaient laissé entendre qu’ils n’ont pas été conviés.
Le risque d'une double vacance présidentielle et gouvernementale plane sur le Liban, le mandat Aoun arrivant à terme le 31 octobre, sans qu'un nouveau gouvernement n'ait été encore formé. Plusieurs observateurs craignent que M. Aoun ne veuille s'accrocher à son poste sous prétexte qu'un cabinet sortant ne peut exercer les prérogatives du président. Ces derniers jours cependant, plusieurs partis politiques, notamment le Hezbollah, par la voix de son chef Hassan Nasrallah, ont dit s'attendre à la formation prochaine d'un nouveau gouvernement, tandis qu'une vacance à la présidence semble apparemment inévitable. Dans ce contexte, l’Arabie saoudite, la France et les États-Unis dressent déjà le profil du successeur de M. Aoun et exercent un "forcing" pour que la présidentielle ait lieu dans les délais.
Pourquoi les députés de l’opposition s’opposent au changement en s’accrochant à des principes futiles alors qu’en se rassemblant ils auraient plus de poids que de rester seuls dans leur coin en attendant que les fossoyeurs gagnent la bataille à tous les coups comme pour les précédentes échéances où ils ont brillé par leur abstention? On n’arrive plus à suivre leur raisonnement d’immobilisme pour faire gagner les vendus. Il faut participer à la à taille pour la gagner la guerre c’est connu.
12 h 50, le 25 septembre 2022