Le secrétaire général du Hezbollah Hassan Nasrallah a déclaré lundi soir que son parti "n'entrera pas dans une guerre civile et ne s'y laissera pas entraîner", insistant sur l'importance, d'après lui, du "principe de partenariat national" entre toutes les composantes sur la scène politique libanaise "sans annulation d'une partie ou d'une autre". Le leader chiite a également affirmé être "prêt à discuter d'une stratégie de défense nationale" et à "attendre quelques jours" concernant les négociations sur la délimitation de la frontière maritime entre le Liban et Israël.
Le dignitaire chiite a tenu ces propos dans une vidéo diffusée lors d'un événement organisé dans la banlieue sud de Beyrouth afin de célébrer les 40 ans du parti, ainsi que la fin de la guerre de 2006 qui avait opposé le Hezbollah à Israël et la "libération" des jurds (hauteurs) de Ersal et Ras Baalbeck des jihadistes, en 2017. Ces combats s'étaient terminés avec l'exfiltration des combattants islamistes vers la Syrie.
Hassan Nasrallah ne s'est pas ouvertement exprimé, lors de cette allocution diffusée devant un parterre de partisans, sur deux grands dossiers politiques libanais : la formation du gouvernement, attendu depuis deux mois, et la position de son parti vis-à-vis de l'élection d'un successeur au chef de l'Etat Michel Aoun, dont l'échéance constitutionnelle s'étend du 31 août au 31 octobre.
"Pendant 40 ans, au Liban, nous avons évité que le pays ne glisse dans la guerre civile et la sédition confessionnelle", a lancé le dignitaire chiite, et ce malgré le fait d'après lui que certaines parties voulaient que de tels conflits éclatent, comme en 2005, après l'assassinat de l'ancien Premier ministre Rafic Hariri. Pointé du doigt comme étant derrière l'attentat, et des membres présumés du parti ayant été condamnés par la justice internationale dans cette affaire, le Hezbollah a toutefois pu, selon Hassan Nasrallah, "empêcher une guerre ou la sédition au Liban en coopérant avec les autres forces politiques". Le Hezbollah "n'entrera pas et ne se laissera pas entraîner dans une guerre civile", a-t-il insisté. Il a déploré dans cette perspective les affrontements ayant éclaté en octobre 2021 dans le quartier de Tayouné, entre des habitants de Aïn el-Remmané, réputés pour être proches des Forces libanaises, et des partisans du tandem chiite, dont plusieurs avaient été tués. Ces violences étaient "un événement douloureux et dangereux, qui aurait pu faire tomber le pays dans une guerre civile, si ce n'était la patience des proches des martyrs et des partis impliqués". Il a rappelé que cette affaire était désormais aux mains de la justice.
Conflit avec l'armée
Le chef du Hezbollah a encore dénoncé des "parties de l'ombre qui veulent que la résistance (le Hezbollah, ndlr) entre en conflit avec l'armée libanaise, ce qui est un projet américain constant". Il a dans ce cadre rappelé plusieurs incidents ayant opposé la troupe à son parti, notamment lorsqu'en marge d'une manifestation contre les accords d'Oslo dans la banlieue sud de Beyrouth en 1993, l'armée avait ouvert le feu et tué plusieurs partisans du Hezbollah ou encore, dix ans plus tard, également lors d'une grogne sociale dans le quartier de Hay el-Sellom, lorsqu'une bousculade et des tirs avec la troupe avaient alors fait également plusieurs victimes.
Le dignitaire chiite est en outre revenu sur les "alliances" forgées ces quarante dernières années avec différentes formations politiques, appelant notamment à ce que les relations entre son parti et le mouvement Amal du président de la Chambre Nabih Berry restent "complémentaires" et fondées sur la coopération. Il a affirmé qu'il "tenait sans aucun doute à l'entente de Mar Mikhaël" avec le Courant patriotique libre, fondé par Michel Aoun, qu'il est prêt à "renforcer et développer".
"Pas d'éradication ni d'annulation"
"L'Etat actuel, avec sa Constitution et ses lois, doit devenir un Etat capable et juste", a ensuite souhaité Hassan Nasrallah, qui s'est déclaré en faveur "du principe du partenariat national entre les différentes composantes, sans éradication ni annulation de l'autre". Cette déclaration est perçue comme une allusion au chef des Forces libanaises, Samir Geagea, ennemi juré du Hezbollah, qui a fondé une grande partie de son discours, en amont de la présidentielle, sur le principe de l'opposition et du "défi" au parti chiite. Lundi dernier, M. Geagea avait rejeté toute entente avec le camp du Hezbollah concernant le futur chef de l'Etat.
Le chef du Hezbollah a également préconisé la transition à un Etat "souverain et indépendant, qui ne subit pas d'interventions de l'ambassade américaine ni d'aucune autre hégémonie étrangère", critiquant des ingérences de l'ambassade américaine "plus fortes que jamais, même dans les détails du travail des ministères". "Nous annonçons que nous sommes toujours prêts à discuter d'une stratégie de défense nationale", a par ailleurs affirmé le secrétaire général du Hezbollah, en référence aux armes du parti, le dernier à être encore armé au Liban.
Revenant longuement sur les différentes "réalisations", selon lui, de son parti sur la scène locale, il a estimé que sa "résilience" face à Israël lors de la guerre de juillet 2006 avait notamment permis de "placer la résistance sur la ligne de la récupération de ses droits sur le pétrole et le gaz" offshore. A ce propos, et concernant le litige frontalier avec Israël, Hassan Nasrallah a réitéré qu'il attendrait les résultats des négociations en cours et que la position du parti chiite était désormais "claire". "Nous avons attendu plus de dix ans, nous pouvons encore attendre quelques jours", a-t-il ajouté, balayant les menaces israéliennes "qui n'ont aucune valeur". Plus tôt dans la journée, le ministre israélien de la Défense Benny Gantz avait déclaré que des tirs contre les installations pétrolières et gazières de l'Etat hébreu pourraient provoquer "plusieurs jours de combats".
Depuis l'arrivée début juin d'une plateforme gazière dans le champ gazier de Karish au large d'Israël, les tensions se sont ravivées entre la formation pro-iranienne et l'Etat hébreu, parallèlement à une médiation entre Beyrouth et Tel-Aviv sur le tracé de la frontière maritime menée par Washington. Hassan Nasrallah a affirmé à plusieurs reprises que son parti interviendrait si le Liban n'obtient pas ses droits et menacé à plusieurs reprises d'une guerre, sans toutefois donner de précisions sur ce qu'il considèrerait comme un tracé acceptable de la frontière.
commentaires (22)
Des promesses à deux balles et toujours pas un cm2 de la Palestine occupée libéré!
hawath nathalie
09 h 34, le 25 août 2022