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Nos Lecteurs ont la Parole

La « libangoisse »

Les paupières collées au ciment, j’ai envie de dormir, mais je n’y arrive pas. Le Soleil se lève tranquillement en me laissant une magni,fique aquarelle, le monsieur à ma droite ronfle sans se soucier des oreilles des autres, les aiguilles de ma montre tournent, mais le temps ne semble pas avancer, les odeurs se mélangent entre parfums de luxe et transpiration, les regards se croisent, indifférents, mes idées basculent entre cette envie de changer le monde et cette autre de dormir jusqu’au lendemain, la tête plaquée contre un des hublots de l’avion ; les nuages me suffisent pour penser à ma vie.

Au revoir, Beyrouth ! Bon, après, ce n’est pas mon premier au revoir ;

je me suis habitué à sécher les larmes de ma mère, à prendre tous mes amis dans mes bras dans un bar à Badaro une nuit avant mon vol, à savourer le jus citronné d’un dernier taboulé, à chanter Helwa ya baladi à voix haute sur la route de l’aéroport, à recevoir des « À bientôt ! » sur tous les réseaux sociaux et à plaquer ma tête contre les hublots des avions afin de penser une nouvelle fois à ma vie.

Le sentiment que je ressens ne s’identifie pas à une angoisse, une anxiété, une dépression ou un problème d’attachement, c’est un sentiment que le monde ne connaîtra jamais de la même façon que les Libanais. C’est un sentiment qui nous pousse à sortir de notre zone de confort, à nous projeter parmi des gens qui ne nous ressemblent pas, à changer nos habitudes, nos modes de vie, nos mentalités, à revenir chez nous et à partager tout ça avec les gens qui nous tiennent à cœur, mais aussi à nous souvenir que ces moments ne sont qu’éphémères.

C’est être heureux, mais se sentir en même temps malheureux, c’est être optimiste avec un sentiment de pessimisme, c’est être courageux, mais beaucoup trop peureux, c’est rêver de cauchemars.

Bref, c’est la fierté d’appartenir à cette même identité qui nous rend angoissés ; permettez-moi de l’appeler la « libangoisse ».


Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour. Merci de limiter vos textes à un millier de mots ou environ 6 000 caractères, espace compris.

Les paupières collées au ciment, j’ai envie de dormir, mais je n’y arrive pas. Le Soleil se lève tranquillement en me laissant une magni,fique aquarelle, le monsieur à ma droite ronfle sans se soucier des oreilles des autres, les aiguilles de ma montre tournent, mais le temps ne semble pas avancer, les odeurs se mélangent entre parfums de luxe et transpiration, les regards se croisent,...
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