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Nos Lecteurs ont la Parole

On n’est pas sorti de l’auberge !

Depuis un an, une grande banque américaine prévoyait un dollar à 56 000 livres au Liban à l’horizon 2022. Nous avons tous cru que l’horizon est une ligne qui recule au fur et à mesure que l’on avance. Visiblement, nous n’avons pas avancé dans un certain sens. Nous avons stagné en courant aveuglément vers ce chiffre mirobolant auquel personne ne croyait. L’horizon 2022 est dans quelques petits jours et nous en sommes à 50 % des prévisions prétendues rocambolesques. Des analystes d’opérette disent même que le pouvoir d’achat des Libanais, au vu des dernières circulaires de la Banque du Liban, ne baissera pas à 50 000 LL au vu de l’indice inflationnel, sachant que probablement le dollar à 8 000 deviendra à 12 000. Quel optimisme ! Et les poules auront des dents… Évidemment, tout cela en admettant que les concertations sur le nucléaire iranien aboutissent. Et ils y croient dur comme fer. Heureux les simples d’esprit qui suivent une telle logique !

Par contre, en lisant les prévisions mondiales de Saxo Bank pour 2022, nous sommes loin de cet optimisme démesuré. Évidemment, comme il ne s’agit que de prévisions, le flou persiste. Avec une inflation à 15 % pour l’Union européenne, la guerre du climat et l’égalité des sexes en entreprise, les trois axes intéressants prennent de l’ampleur. Une inflation dans l’UE se répercuterait automatiquement sur les prix au Liban. Pour moins que ça, les produits de consommation importés sont à des prix démesurés à tel point qu’on se demande si on n’achète pas le supermarché au lieu d’un bête fromage. Les importateurs et les supermarchés se plaignent de leurs marges soi-disant inférieures à ce qu’ils attendaient notamment à cause du mazout en manque et d’un taux de change qui ne leur convient pas. Quand on constate la date d’expiration sur certains produits, pour les plus curieux, on se rend compte qu’ils ont été probablement achetés à un taux largement inférieur au taux actuel et qu’ils ont été mis sur les étals conformément au taux actuel, notamment les produits soi-disant promotionnels. Quant aux journées exceptionnelles comme le Black Friday ou les prix sensationnels sur la viande, le poulet ou les boîtes de conserve, nous sommes en droit de nous demander qu’en est-il de la réelle fraîcheur de ce qu’on achète. Mais ne jouons pas les mauvaises langues. Ce ne sont que des suppositions, et restons dans le rêve à tabler sur l’honnêteté des propriétaires des grandes surfaces.

Le climat ? C’est drôle. Le Premier ministre s’est engagé à améliorer les conditions au Liban à la COP26. De saines résolutions ! On attend toujours la mise en application. Je sais que ce n’est pas facile comme tout au Liban. Avec l’approche des fêtes, la recrudescence du nombre de personnes infectées par le coronavirus, l’inflation galopante et une population titubante, il a d’autres chats à fouetter. C’est vrai aussi que les poubelles laissées à l’abandon dans les rues sont devenues monnaie courante, et voir notre univers complètement propre (ou presque) ressortirait du miracle. Bon ! Déjà il y a eu un miracle avec la mise en place d’un gouvernement, il ne faut pas non plus trop demander même si les pluies font sauter les canalisations et les routes sont inondées. Dans le fond, si quelque chose est fait, on devra s’habituer à un autre environnement, ce qui sera particulièrement difficile en ces temps de crise. C’est pour cela qu’une transition lente s’impose jusqu’à ce que nos petits-enfants deviennent grands-parents. Il y a du chemin. Mais on y arrivera.

Alors, la troisième question cruciale qu’a développée la Saxo Bank est l’égalité salariale dans les entreprises. Il paraît qu’un groupe de tradeuses (ou les femmes traders, les marchands des quatre-saisons des bourses) vont s’insurger contre le patriarcat. Ouh là ! Un gros problème! Dieu merci, nos tradeuses au Liban n’ont pas de telles ambitions. Elles en ont de plus saines peut-être. Donc le but est de s’attaquer aux entreprises aux systèmes patriarcaux ne reconnaissant pas aux femmes une identité claire égale, sinon supérieure, à celle des hommes. Il y aura de quoi faire un bug mondial et des banqueroutes en cascade. Ça va sans doute se limiter à ailleurs. Chez nous, ce serait utopique. D’ailleurs, le Liban, c’est le pays de l’utopie. Je rencontrais un type qui voulait renouveler son passeport bien qu’il aime le Liban et que le Liban soit un très beau pays, voire le plus beau de la terre, mais il est obligé de le quitter (?) à cause de la situation politico-sociale qui mettrait en danger son essaim d’enfants à l’intelligence nobélisable. Vous avez compris quelque chose ? Moi non plus. C’est ça l’utopie à la libanaise. Imaginez que les quelques tradeuses libanaises se mettent en tête de ne pas soutenir les sociétés patriarcales de la Bourse du Liban. Je ne sais pas si ça influerait beaucoup sur l’économie libanaise. Déjà que les titres cotés n’ont pas beaucoup de cote et que les volumes échangés sont médiocres (rien à voir avec la situation économique !), si en plus les femmes s’insurgent, que deviendraient les banques ? À ce stade, je demanderais aux personnes malintentionnées de ne pas penser du mal de ces nobles institutions qui ne sont que le bouc émissaire d’un ignoble système mafieux.

Pour finir, il y a quand même une bonne nouvelle. Il paraît qu’il y aura une grande découverte médicale qui permettrait l’allongement de l’espérance de vie de 25 %. Il y a de quoi rassurer tous les corrompus de la planète. Ils auront encore de la marge pour se remplir les poches. C’est déjà bien. Nous aurons tout le temps encore pour jouir de la vie et de ses avantages, loin des vices et des pourritures qui nuisent à notre existence. Il y aura certes toujours des vers pour fragiliser notre pomme. Mais nous serons les plus forts. Encore et toujours !

À ce stade, je rassure tout le monde. Ces prévisions n’ont que 1 % de chance de se réaliser. Donc, l’inflation, le climat, la fureur des femmes et l’espérance de vie, plouf ! Nous avons 99 % de chance de terminer 2022 comme 2021. C’est déjà pas mal !

Heureusement, au Liban, nous n’avons pas besoin de ce genre de nouvelles. Pour les prévisions, les vraies, celles-là, qui vont s’accomplir sur le court et moyen terme, nous avons notre Michel national qui va se pointer tout heureux avec son sourire « dentifrice » et Lilou lui fera la concurrence sur une autre chaîne. Bref, la routine quoi !

Tout ça pour vous dire qu’en 2022, on ne sera pas encore sorti de l’auberge.

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Depuis un an, une grande banque américaine prévoyait un dollar à 56 000 livres au Liban à l’horizon 2022. Nous avons tous cru que l’horizon est une ligne qui recule au fur et à mesure que l’on avance. Visiblement, nous n’avons pas avancé dans un certain sens. Nous avons stagné en courant aveuglément vers ce chiffre mirobolant auquel personne ne croyait. L’horizon...

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