Le Premier ministre libanais, Nagib Mikati, a ordonné l’ouverture d’une enquête sur la tenue, la semaine dernière à Beyrouth, d’une conférence de presse du principal groupe d’opposition bahreïni qui a vivement irrité Manama. Son bureau a assuré Bahreïn de sa détermination à maintenir de bonnes relations avec le royaume.
Cette affaire embarrasse le gouvernement qui tente de résorber la crise avec les monarchies du Golfe, après la démission du ministre de l’Information Georges Cordahi, dont les propos critiquant le rôle de Riyad dans la guerre au Yémen avaient poussé l’Arabie saoudite à rappeler son ambassadeur au Liban, alors que Bahreïn avait demandé à l’ambassadeur du Liban dans le royaume de partir.
Dans un communiqué dimanche soir, le bureau de M. Mikati a « dénoncé vivement toute atteinte à Bahreïn » et assuré qu’il « refuse que le Liban soit utilisé pour porter préjudice au royaume ». Il a également souligné qu’il s’opposait à « toute ingérence dans les affaires intérieures » de ce pays du Conseil de coopération du Golfe. Le Premier ministre libanais a réclamé « l’ouverture immédiate d’une enquête sur ce qui s’est produit », et appelé à « empêcher la réédition » de tels incidents, soulignant que le Liban « refuse de porter atteinte aux pays arabes frères et notamment les pays du CCG ».
Lundi, le Premier ministre a demandé au parquet général près la Cour de cassation "d’ouvrir immédiatement une enquête et de prendre les mesures nécessaires concernant la tenue de cette conférence de presse portant atteinte au royaume de Bahrein", a annoncé la présidence du Conseil.
Le ministère bahreïni des Affaires étrangères avait vivement protesté dimanche contre la tenue à Beyrouth d’une conférence de presse « d’éléments ennemis soutenant et parrainant le terrorisme » et adressé une note de protestation au gouvernement libanais.
Le principal groupe d’opposition chiite de Bahreïn, al-Wifaq, un mouvement dissous par les autorités et qui entretient des relations étroites avec le Hezbollah, avait organisé jeudi une conférence de presse dans la banlieue sud de Beyrouth pour publier son rapport annuel sur les violations des droits de l’homme dans le royaume.
Dans ce rapport, le groupe d’opposition avait affirmé que le petite royaume avait procédé à plus de 20.000 arrestations arbitraires depuis l’écrasement du mouvement de révolte qui s’était produit en 2011, dans le sillage du printemps arabe.
Enquête immédiate
Le communiqué du ministère bahreïni des AE avait appelé le gouvernement libanais à interdire de tels événements « qui visent à porter atteinte au royaume et contreviennent aux usages diplomatiques ».
Pour sa part, le ministère libanais des Affaires étrangères a rejeté dans un communiqué "que le Liban soit une base ou un passage pour porter atteinte au royaume frère de Bahreïn". Il a assuré que "le Liban respecte entièrement la charte de la Ligue arabe portant sur la non ingérence dans les affaires intérieures des pays arabes". Bahreïn avait également adressé dimanche un message au secrétariat général de la Ligue pour protester contre la tenue de cette conférence de presse, qui avait eu lieu au complexe al-Saha, sur l'ancienne route de l'aéroport.
De son côté, le bureau du ministre de l’Intérieur Bassam Maoulaoui a annoncé dans un communiqué avoir « immédiatement entamé avec les services de sécurité une enquête sur les circonstances de la tenue de cette conférence de presse qui porte préjudice à Bahrein ». Le ministre de l’Intérieur a lui aussi souligné qu’il « refuse que le Liban constitue une plateforme pour exporter les atteintes contre ses pays arabes frères » et « dénonce toute ingérence dans les affaires des pays du CCG ». En soirée, le ministre de l'Intérieur a reçu son collègue aux Affaires étrangères et a discuté avec lui du communiqué de protestation bahreini.
Le Hezbollah maintient de bonnes relations avec plusieurs mouvements chiites de la région, dont al-Wifaq et surtout les rebelles houthis du Yémen, ennemis de l’Arabie saoudite, qui disposent d’une station de télévision dans la banlieue-sud de Beyrouth.
Ce nouvel incident avec un pays du Golfe est intervenu alors que le prince héritier saoudien Mohammad ben Salmane a effectué une tournée dans les pays de la péninsule pour préparer la tenue du sommet du CCG qui se tient mardi à Riyad.
Dans un communiqué à l’issue de sa visite à Bahreïn vendredi, Riyad et Manama ont souligné la nécessité que le Liban ne soit pas "le point de départ d'actes terroristes ou d'actes protégeant des systèmes et des groupes terroristes qui visent à ébranler la sécurité et la stabilité de la région, comme le groupe terroriste du Hezbollah", bête noire de Riyad. Cette mention du Liban, dans un communiqué conjoint publié à l'issue d'une rencontre entre MBS et le roi de Bahreïn, Hamad ben Issa al-Khalifa, était similaire à celle qui avait été faite dans un communiqué publié par l'Arabie et les Émirats arabes unis après une réunion entre le prince héritier saoudien et son homologue émirati.
Nagib Mikati avait salué samedi dans un tweet la tournée effectuée MBS dans le Golfe et "le soutien au Liban et aux Libanais" qu'il a exprimé au cours de ses visites. Cette nouvelle crise avec Bahreïn intervient alors que le Premier ministre espérait, après le voyage du président français Emmanuel Macron en Arabie saoudite début décembre, un déblocage avec les pays du Golfe. Lors de sa visite à Djeddah, en Arabie saoudite, le président français avait annoncé à l’issue d’une rencontre avec MBS une initiative en faveur du Liban, comprenant la création d’un « mécanisme de soutien humanitaire franco-saoudien » qui serait financé par Ryad et d’autres pays du Golfe, en plus d’un engagement sur la restauration des relations entre Beyrouth et Riyad. Le rétablissement des relations est toutefois lié à certaines conditions, notamment « la nécessité de limiter la possession d’armes aux institutions légales de l’État », selon le communiqué conjoint franco-saoudien, dans une allusion au Hezbollah.
commentaires (14)
j'etais le pres, aoun, j'aurais exige de mon ministres des A E de reunir tous les ambassadeurs des pays du monde entier afin de leur delivrer une note officielle leur demandant de ne plus adresser leurs missives positives et surtout negatives a l'etat libanais-inexistant-, mais de le faire directement a hassan nasroullah via son allie .... lui-meme le pres. aoun.
Gaby SIOUFI
09 h 00, le 14 décembre 2021