
Saad Hariri présidant la réunion du bloc du Futur. Photo d’archives Dalati et Nohra
Et rebelote. La question de la récusation du Premier ministre désigné, Saad Hariri, est de nouveau sur la table, avec, une fois de plus, des informations contradictoires venant de son propre camp. Un indicateur des divergences et tiraillements qui existent au sein de la famille haririenne à ce sujet. Si les chefs de file sunnites libanais, mais aussi certaines capitales arabes, sont radicalement opposés à l’idée de la récusation qu’ils perçoivent comme une « capitulation » devant le camp aouniste, Saad Hariri et plusieurs de ses fidèles conseillers seraient plutôt favorables à un retrait. L’objectif, pour eux, est de ménager ce qui reste de son image publique dans l’espoir de pouvoir restaurer sa popularité d’ici aux législatives.
Bien qu’il continue de jouir de l’appui de plusieurs États – l’Égypte, les Émirats arabes unis et la Russie – qui se disent opposés à ce scénario très risqué pour la stabilité du pays, Saad Hariri pourrait jeter l’éponge d’ici à la fin de la semaine. Le leader du courant du Futur pourrait l’annoncer au cours d’une interview prévue sur al-Jadeed (New TV) avec Mariam Bassam, jeudi ou vendredi. Il saisirait ainsi l’occasion pour expliquer les raisons de son retrait et dévoilerait, comme il l’a promis à plusieurs reprises déjà, les coulisses du bras de fer qu’il mène avec le chef de l’État, Michel Aoun, depuis plus de neuf mois. « La récusation est une option sérieuse. Saad Hariri ne fera pas comme Michel Aoun en recourant à l’obstructionnisme comme ne cesse de le faire ce dernier », confie à L’Orient-Le Jour le vice-président du courant du Futur, Moustapha Allouche. Le responsable explique que le seul différend qui existe pour l’instant au sein des milieux haririens est celui de savoir si le leader sunnite doit ou non soumettre une mouture au chef de l’État, avant de se retirer. « Les anciens chefs de gouvernement et certains partisans considèrent que c’est inutile », dit-il.
La manœuvre de l’obstruction
Ce n’est pas de cette oreille que l’entend l’ancien Premier ministre Fouad Siniora. Celui-ci estime qu’il n’y a aucune raison pour que M. Hariri rende son tablier et qu’il ne faut pas prendre à la lettre toutes les informations qui circulent à ce sujet. Il reprend le même argument que M. Allouche, à savoir la tactique de l’obstruction des aounistes, mais en en tirant les conclusions inverses. M. Siniora estime ainsi que Saad Hariri doit faire échec à la tactique utilisée par le chef de l’État qui consiste à vaincre ses adversaires politiques à l’usure.
« Son obstination à devenir président de la République en paralysant les institutions du pays plus de deux ans durant a été payante. Aujourd’hui, il refait la même chose et mise sur le fait que la partie adverse finira à la longue par se retirer du jeu. Nous avons bien assimilé la leçon », dit l’ancien chef de gouvernement. Ce qui signifie qu’une partie des gens proches de M. Hariri, dont les anciens chefs de gouvernement, n’abdiqueront pas. Il reste à voir quelle tendance au sein des haririens l’emportera cette fois-ci.
M. Siniora rappelle au passage que Tammam Salam a mis onze mois entre 2013 et 2014 à former son gouvernement et qu’il ne l’a été qu’une fois que le Hezbollah a donné son feu vert. Les anciens Premiers ministres refusent, dans ces conditions, de nommer un « successeur » à Hariri – une condition jadis considérée comme sine qua non à la récusation – et assurent qu’aucun d’entre eux – Nagib Mikati, Tammam Salam et M. Siniora – n’est disposé à prendre la relève. Une prise de position qui signifierait que le prochain Premier ministre devra inéluctablement être affilié au camp proche du Hezbollah et ne pourra donc former qu’un gouvernement monochrome. Une éventualité refusée jusque-là par le parti chiite.
En attendant que la situation se décante un peu plus, M. Hariri va se rendre en Égypte jeudi prochain pour y rencontrer le président Abdel Fattah al-Sissi. Ce dernier déploiera des efforts pour dissuader le Premier ministre désigné d’une éventuelle récusation si telle est sa véritable décision. Selon notre chroniqueur politique Mounir Rabih, un dîner a rassemblé dimanche, au domicile de l’ambassadeur égyptien, les chefs de file sunnites dont M. Siniora, pour examiner cette épineuse question.
Hier, Saad Hariri a dépêché son conseiller Ghattas Khoury auprès du patriarche maronite, Béchara Raï, qui avait usé de mots forts, dimanche, à son égard. Le patriarche maronite avait créé la surprise en tançant aussi bien Saad Hariri que le président Michel Aoun, pour les pousser à former un gouvernement. « L’expression “s’entendre avec le Premier ministre désigné” ne signifie en aucun cas de bloquer les formules présentées, avait précisé le patriarche dans son homélie. De la même manière, la désignation (au poste de Premier ministre) n’est pas une désignation à vie », avait-il ajouté, affirmant que « l’intérêt du peuple est supérieur à toutes les interprétations constitutionnelles ».
Une position que M. Siniora n’a pas manqué de critiquer, même s’il considère que le prélat maronite a voulu exprimer une position médiane. « Après tout, lance M. Siniora, le patriarche continue de prêcher pour sa paroisse et ne peut se départir de son appartenance communautaire. » On ne saura pas toutefois si M. Khoury a informé, au cours de l’entretien, Mgr Raï de la volonté de M. Hariri de se retirer, ou du contraire. Pour Fouad Siniora, « personne ne peut contraindre M. Hariri à se désister. C’est inscrit noir sur blanc dans la Constitution », dit-il. Entre les reproches formulés par la plus haute instance chrétienne, Bkerké, mais aussi par le chef du Parlement, Nabih Berry, qui a clairement signifié à Saad Hariri il y a une dizaine de jours qu’il n’avait plus tellement le choix et qu’il devrait trancher sans plus tarder, ce dernier n’a probablement plus le luxe de la tergiversation s’il souhaite sauver les meubles.
The delay in the formation of a government proves once again that members of this political elite class are poor negotiators and incompetent leaders who put their own interests above those of the people. Mr. Hariri and the former ministers do not have a clean record and are not role models of good governance. They want to stay in power to protect each other and obstruct any investigation or financial audit of government institutions they have destroyed over 30 years. Let's not forget that the cycle of indebtment started by Mr. Rafic Hariri and perpetuated by successive governments helmed by these same people has lead us to bankruptcy and the illegal government-sanctioned confiscation of bank deposits of the general population. Meanwhile, the elite class have transferred their billions of $ stolen at least in part from public coffers into offshore secret bank accounts, aided by the governor of the Central Bank and the CEOs of some banks. We should replace all of them. There are many ascending young, competent, and trustworthy leaders from all sects who should take over the reins of power and bring Lebanon into the 21st Century.
23 h 39, le 13 juillet 2021