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Politique - Crise politique

Le Liban "au bord d'un effondrement systémique" : le cri d'alarme de Diab qui appelle aux concessions

Le pays du Cèdre "est en grave danger, lance le PM sortant. J'ai transmis le message, que Dieu m'en soit témoin".


Le Liban

Le Premier ministre libanais sortant, Hassane Diab, au Grand Sérail, le 2 juin 2021. Photo Ani.

La mine sombre et le ton grave, le Premier ministre sortant, Hassane Diab, a exhorté mercredi, dans une allocution télévisée, les protagonistes libanais, incapables de trouver un compromis pour former un gouvernement qui se fait attendre depuis près de dix mois, à faire des concessions "aussi petites soient-elles", le Liban étant "au bord d'un effondrement systémique".

Saad Hariri, désigné Premier ministre en octobre dernier pour former le cabinet, est au coeur d'une querelle politique et personnelle avec le chef de l'État Michel Aoun et son gendre Gebran Bassil. Les deux camps se rejettent la responsabilité du blocage politique, alors que le pays est sans cabinet depuis août 2020, date de la démission du cabinet de Diab, après l'explosion meurtrière du 4 août au port de Beyrouth.

"Trois cents jours se sont écoulés depuis la démission de mon gouvernement, et le Liban continue de traverser un tunnel de plus en plus sombre. Chaque fois qu'une lueur apparaît à l'horizon, elle est étouffée par des calculs politiques qui ne tiennent plus compte du sort du pays ni de la souffrance des Libanais, épuisés par la recherche de médicaments, de lait pour enfants ou d'essence", a dénoncé M. Diab mettant en garde contre le fait que le pays "perd, chaque jour, ses compétences scientifiques et ses jeunes". "Au cours des quinze dernières années, le vide est devenu la norme dans le pays, et la présence de l'État et de ses institutions l'exception, a-t-il ajouté. Mais aujourd'hui, l’espoir d’une sortie de crise est pris dans un cercle vicieux, l'impasse se transformant en une crise nationale qui menace ce qui reste des fondements de l'État, de la Constitution et des institutions".

Le rapport accablant de la Banque mondiale
"La crise financière actuelle est le résultat de l'accumulation d'erreurs dans les politiques financières qui devaient être corrigées par la feuille de route que nous avons établie dans le plan de relance adopté par notre gouvernement et qui a constitué la base de nos négociations avec le Fonds monétaire international. Aujourd'hui, le plan de redressement, qui a été suspendu avec la démission du cabinet, nécessite un gouvernement de plein exercice qui poursuive les négociations avec le FMI afin de mettre le pays sur la voie de la sortie de cette grave crise qui pèse sur le Liban et les Libanais."

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"Aujourd'hui, nous sommes confrontés à une réalité très difficile, que la Banque mondiale a reflétée dans son dernier rapport", a déclaré M. Diab.  En effet, selon ce rapport accablant publié mardi par la BM, l'effondrement économique du Liban risque d'être classé parmi les pires crises financières du monde depuis le milieu du XIXe siècle. "La crise économique et financière est susceptible de se classer parmi les 10, voire les trois épisodes de crise les plus graves au niveau mondial depuis le milieu du XIXe siècle", indique le rapport. Cette année, l'économie du Liban va se contracter de près de 10% et il n'y a "aucun tournant clair en vue", selon le rapport.

Le Liban a fait défaut sur sa dette l'an passé, la monnaie a perdu environ 85% de sa valeur et la pauvreté dévaste un pays naguère considéré comme un havre de prospérité dans la région. La dégringolade de l'économie est largement imputée à la corruption et à l'incompétence de l'élite politique, dominée depuis des décennies par les mêmes familles et les mêmes personnalités. La classe dirigeante n'a pas su réagir à la pire situation d'urgence que le pays ait connue en une génération, aggravée par la pandémie de coronavirus et une explosion dévastatrice au port de Beyrouth en août dernier, un drame qui a fait plus de 200 morts et détruit des quartiers entiers de la capitale. Le FMI a proposé son aide, mais les forces politiques du pays ont été incapables de former un gouvernement susceptible de mener les réformes auxquelles l'aide étrangère est conditionnée. Plus de la moitié des Libanais vivent sous le seuil de pauvreté. Payée en livres libanaises, la majorité de la population active souffre de la chute vertigineuse du pouvoir d'achat. Face à la hausse du taux de chômage, un nombre croissant de ménages a du mal à accéder aux services essentiels, notamment aux soins de santé, observe le rapport.

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S'appuyant sur le rapport de la BM, Hassane Diab a énuméré "les faits confirmant" cette position : l'incapacité de former un nouveau gouvernement pour faire face aux graves problèmes financiers et sociaux ; l'incapacité des forces politiques à s'élever au niveau de la responsabilité nationale et le manque de compréhension de l'ampleur et des répercussions de la crise ; la suspension des négociations avec le FMI ; le gel du plan de relance établi par le gouvernement sortant ; la réduction par la Banque du Liban de l'allocation budgétaire pour l'importation de produits de base ; l'indisponibilité des médicaments, du lait pour enfants et des carburants, certains commerçants stockant les produits de base ; la contrebande de divers produits de base de différentes manières, malgré les efforts déployés pour lutter contre ce fléau ; l'incapacité grandissante à pouvoir assurer besoins de base de la population en matière de vie, de services sociaux et pharmaceutiques, y compris l'essence, le diesel et l'électricité ; une grave fuite du capital scientifique et humain ; et enfin un siège extérieur imposé au Liban, avec diverses pressions exercées pour empêcher l'aide d’y être acheminée, de manière à le pousser à un effondrement total".

Effondrement systémique
Selon M. Diab, "tous ces faits amènent le pays au bord d'un effondrement systémique, dont les victimes seront les Libanais, tandis que les forces politiques se relèveront pour se présenter comme les sauveurs du peuple et du pays". "L'effondrement, s'il se produit, aura des répercussions très graves, non seulement sur les Libanais, mais aussi sur ceux qui résident sur son sol", a-t-il mis en garde. 

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Il a, dans ce cadre, demandé aux Libanais d'être "patients face à l'injustice qu'ils subissent ou qui les touchera à la suite de toute décision prise par une partie quelconque et qui augmentera leurs souffrances". "Je ne veux accuser personne, car la conjoncture actuelle exige le plus haut degré de responsabilité afin de pouvoir atténuer la douleur de l'effondrement au cas où il se produirait", a-t-il souligné. Et de lancer : "J'appelle les forces politiques à faire des concessions, aussi petites soient-elles, car elles permettront d'alléger la souffrance des Libanais et d'arrêter la spirale effrayante. La formation du gouvernement, environ dix mois après la démission de notre gouvernement, est une priorité qui supplante tous les autres objectifs ou dossiers".

S'adressant aux "frères et amis du Liban", il les a appelés à ne pas "rendre les Libanais responsables de ce dont ils n’en sont pas". "Le peuple libanais attend de ses frères et amis qu'ils se tiennent à ses côtés et l'aident dans sa dure épreuve, et non qu'ils assistent à sa souffrance ou contribuent à l'aggraver", a indiqué M. Diab. "Je lance un appel à nos frères et amis, le Liban est en grave danger", a-t-il poursuivi, leur demandant de le sauver "maintenant, avant qu'il ne soit trop tard". "J'ai transmis le message, que Dieu m'en soit témoin", a martelé à trois reprises le Premier ministre démissionnaire à la fin de son discours.

La mine sombre et le ton grave, le Premier ministre sortant, Hassane Diab, a exhorté mercredi, dans une allocution télévisée, les protagonistes libanais, incapables de trouver un compromis pour former un gouvernement qui se fait attendre depuis près de dix mois, à faire des concessions "aussi petites soient-elles", le Liban étant "au bord d'un effondrement systémique".Saad...

commentaires (7)

OUi, le Liban souffre d'une crise du système de 1943 extrémement dangereuse qui risque de conduire à l'effondrement ( et à Dieu ne plaise, à la disparition ) du Liban en tant que pays d'entente entre les communautés religieuses (pays de message,comme a dit le Pape ).Mais avant de demander l'aide des Nations Unies ou des pays frères. il faut que les Libanais commencent par adopter une mesure nécessaire qui consiste à combler un manque dans la constitution en ajoutant à cette constitution un article qui précise ,d'une manière claire et nette, les prérogatives du Président et du Premier Ministre et qui fixe un délai déterminé pour les consulatations obligatoires du Président et un délai déterminé pour la formation du gouvernement. M

ZEDANE Mounir

21 h 03, le 03 juin 2021

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Commentaires (7)

  • OUi, le Liban souffre d'une crise du système de 1943 extrémement dangereuse qui risque de conduire à l'effondrement ( et à Dieu ne plaise, à la disparition ) du Liban en tant que pays d'entente entre les communautés religieuses (pays de message,comme a dit le Pape ).Mais avant de demander l'aide des Nations Unies ou des pays frères. il faut que les Libanais commencent par adopter une mesure nécessaire qui consiste à combler un manque dans la constitution en ajoutant à cette constitution un article qui précise ,d'une manière claire et nette, les prérogatives du Président et du Premier Ministre et qui fixe un délai déterminé pour les consulatations obligatoires du Président et un délai déterminé pour la formation du gouvernement. M

    ZEDANE Mounir

    21 h 03, le 03 juin 2021

  • C' est, ou bien la mort de la milice et des mafieux, et l' emergence d' une nouvelle republique, ou bien la mort definitive du pays...Pour l' instant, c' est dans cette dernière direction que l' on se dirige...

    LeRougeEtLeNoir

    11 h 50, le 03 juin 2021

  • ANNONCE DE H DIAB : """J'ai transmis le message, que Dieu m'en soit témoin""" ! non mais il se prend pour qui cuila hein ? mais c'est bien lui ET les autres qui ont GERE cette chute libre de notre pays depuis le temps ! il transmet le message a qui alors? a kellon dont il fait lui-meme partie-meme malgre lui ?

    Gaby SIOUFI

    10 h 38, le 03 juin 2021

  • Il ne fallait pas démissionner. Quand le navire coule, le capitaine part le dernier et non pas le premier. Sauf au Liban. D'abord le Pays et ensuite sa situation personnelle.

    NASSER Jamil

    09 h 33, le 03 juin 2021

  • Nous avons vu un président de la République disposant d'une majorité confortable à l'Assemblée, d'un gouvernement à sa botte et de hauts fonctionnaires nommés par lui. dresser un bilan désastreux de son mandat en se plaignant: "C'est pas ma faute: on m'a pas laissé faire!". Maintenant, c'est le tour du premier ministre! En fait, ce n'est pas la première fois d'ailleurs. On attend d'un chef qu'il agisse, pas qu'il se plaigne.

    Yves Prevost

    07 h 14, le 03 juin 2021

  • OUI OUI ON NE LE SAIT QUE TROP ET.... ON APPELLE QUI A NOTRE RESCOUSSE ? Un premier ministre démissionnaire incapable de gérer les affaires en cours? Un président de la république qui bloque le pays par simple caprice? Des députés et ministres incapables et lâches? Ou bien la justice qui ne veut en aucune façon prendre ses responsabilités parce que complices de tous ces fossoyeurs et qui prétend comme l’autre être empêchée mais en fait a surtout peur d’être éclaboussée par les scandales? Le vide dont menacent les politiciens est présent est sidéral mais tout le monde a peur du vide s’ils daignent se révolter pour libérer ce pays des monstres qui le hantent et l’accaparent. Alors soit les citoyens sont sonnés et n’évaluent pas la situation dramatique soit ils sont consentants et là il n’y a plus rien à dire.

    Sissi zayyat

    21 h 13, le 02 juin 2021

  • Il a tout compris! Il mériterait d’être notre premier ministre. Attends, il est notre premier ministre... aakh, j’ai mal à la tête...

    Gros Gnon

    20 h 34, le 02 juin 2021

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