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À l’hôpital Rafic Hariri, un centre communautaire pour la santé mentale unique en son genre

Plus de 150 patients sont soignés gratuitement tous les mois dans cette structure et la demande est à la hausse, en raison des difficultés que traverse le pays.

À l’hôpital Rafic Hariri, un centre communautaire pour la santé mentale unique en son genre

Une partie de l’équipe du centre, situé au 3e étage d’un des bâtiments des consultations externes. Photo Mohammad Yassine

Après avoir été un des pionniers dans la lutte contre le Covid-19, l’Hôpital universitaire Rafic Hariri (HURH), situé dans le quartier de Jnah au cœur de Beyrouth, est rapidement devenu une référence en matière de soins de santé mentale avec son centre communautaire, le seul dans un hôpital gouvernemental offrant des séances gratuites et consacré aux pathologies de la psyché. Retour sur le parcours de cette structure qui accueille mensuellement plus de 150 patients, à l’occasion du Mois pour la sensibilisation à la santé mentale.

L’activité du centre, créé en 2017, s’est récemment intensifiée avec la multiplication des problèmes psychiques liés au confinement et à l’explosion dévastatrice du port de Beyrouth, le 4 août 2020. « Après la pandémie et la catastrophe du port, les langues ont commencé à se délier et nous avons constaté une diminution des tabous autour de la santé psychique, les gens commençant à solliciter l’aide des professionnels », indique la responsable, Ghina al-Ali.

Les patients sont accueillis discrètement au 3e étage de l’un des bâtiments des consultations externes du HURH, à l’entrée duquel sont disposées des brochures explicatives sur les différents troubles de l’humeur. S’y trouve également une salle dédiée aux enfants ayant besoin de suivi. Géré par Médecins du Monde (MDM), association médicale de solidarité internationale, grâce à un financement de l’Agence française de développement (AFD), le centre communautaire de santé mentale travaille également avec l’ONG Skoun, qui s’occupe du suivi psychologique des patients traités par le HURH pour des dépendances à la drogue ou l’alcool. Mme Ali explique que le centre traite de nombreux patients souffrant de troubles de l’humeur, de dépression majeure, de problèmes anxieux et psychotiques. « Nous avons deux psychiatres et deux psychothérapeutes qui reçoivent sur rendez-vous, les patients ont généralement entre 18 et 59 ans et la majorité d’entre eux sont des femmes », indique-t-elle en précisant que les médicaments sont fournis gratuitement en plus du transport pour certains. Entre août 2018 et fin 2020, 5 000 consultations ont eu lieu.

Un local est spécialement dédié aux jeunes patients. Photo Mohammad Yassine

Un modèle pilote, à exporter dans les régions

Le directeur de l’hôpital Rafic Hariri, Dr Firas Abiad, ne cache pas le sentiment de fierté qu’il éprouve en ce qui concerne ce centre et rêve d’en dupliquer le modèle dans d’autres régions du Liban. Le HURH, qui abrite également une aile psychiatrique, « est le seul hôpital gouvernemental à disposer d’un système complet de soins de santé mentale », se félicite-t-il en indiquant que « certains hôpitaux privés ont développé un système similaire, ce qui est assez rare au Liban, ce genre de structure coûtant cher et rapportant peu d’argent ». « Nous voulons que ce centre soit un modèle pilote que l’on pourra exporter dans d’autres régions comme le Nord ou la Békaa », poursuit-il. L’hôpital gouvernemental de Baalbeck avait accueilli un centre similaire pendant quelques mois, rappelle-t-il, mais il a finalement été déménagé dans le village de Douris, six kilomètres plus loin, pour des raisons logistiques.

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« Nous essayons de combattre la stigmatisation liée à la santé mentale. Le centre de santé mentale du HURH offre des soins gratuits, sans distinction de nationalité, de genre ou d’âge, en accord avec la stratégie nationale libanaise pour la santé mentale », explique pour sa part la coordinatrice MDM de la santé mentale au Liban, Foteini Christoforidou.

La directrice exécutive de Skoun, Tatiana Sleiman, dont l’organisation occupe également des locaux dans l’enceinte de l’hôpital, révèle à L’OLJ que le nombre de patients souhaitant se faire soigner pour des addictions est constamment en hausse. « Il n’y a malheureusement pas de chiffres officiels, mais depuis le soulèvement populaire (en octobre 2019) et la crise économique, nous recevons de plus en plus d’appels pour le traitement de toutes sortes d’addictions, comme l’abus d’alcool, l’usage occasionnel de drogues ou de certains médicaments de lutte contre l’insomnie », souligne-t-elle, ajoutant que la consommation de drogue augmente parmi les réfugiés, notamment les jeunes déscolarisés ou au chômage.

Face à l’augmentation de la demande de soins de santé mentale, le directeur adjoint de l’AFD au Liban, Thierry Liscia, appelle à accorder plus d’importance à ce type de services. « Des traumatismes multiples et répétés se manifestent dans le pays, on le perçoit dans l’attitude des gens, leur agressivité et leur impatience dans certaines situations, mais aussi au niveau de certaines peurs développées par les enfants », explique-t-il à L’OLJ. « L’AFD est la seule institution à avoir des projets de cette envergure pour la santé mentale au Liban, où une demande croissante pour les soins est notée aussi bien à Beyrouth qu’à Douris. L’objectif est de mettre en place des structures pérennes et de renforcer le système de santé public, ce pour quoi nous travaillons main dans la main avec le ministère de la Santé », ajoute-t-il.

L’AFD œuvre déjà à la réhabilitation des infrastructures de l’hôpital Rafic Hariri, en coopération avec le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), dans le cadre d’un projet financé à hauteur de 20 millions d’euros, auxquels l’AFD a ajouté 5 millions d’euros après l’explosion du port, rappelle M. Liscia. L’agence a également déboursé 2 millions d’euros pour la réhabilitation d’une partie de l’Hôpital gouvernemental de la Quarantaine, gravement endommagé par cette explosion.

Après avoir été un des pionniers dans la lutte contre le Covid-19, l’Hôpital universitaire Rafic Hariri (HURH), situé dans le quartier de Jnah au cœur de Beyrouth, est rapidement devenu une référence en matière de soins de santé mentale avec son centre communautaire, le seul dans un hôpital gouvernemental offrant des séances gratuites et consacré aux pathologies de la psyché....

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