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Politique - Focus

Les dernières cartouches de Bachar el-Assad au Liban

L’ombre d’un retour du régime syrien plane sur le pays du Cèdre, mais en a-t-il vraiment les moyens ?

Les dernières cartouches de Bachar el-Assad au Liban

Des partisans syriens du président Bachar el-Assad au Liban à l’occasion de l’élection présidentielle. Photo Hussam Shbaro

Les convois d’électeurs pro-Assad brandissant le portrait du président syrien la semaine dernière à l’occasion de l’élection présidentielle ont fait ressurgir des vieux démons et ravivé les pires craintes : celles d’un retour du régime syrien au Liban. La victoire militaire du camp Assad, permise par la double intervention russe et iranienne, ainsi que le rapprochement en cours avec les pays arabes, notamment l’Arabie saoudite, ont donné lieu à toute une série d’hypothèses en ce sens. Autant le dire tout de suite : ce scénario, à l’heure actuelle, paraît plus qu’improbable. Outre le fait que le régime syrien parvient à peine à contrôler les territoires qu’il a conservés et repris en Syrie, et n’a donc pas les moyens dans l’immédiat de reprendre pied au Liban, on ne voit pas comment les Occidentaux, pour qui Bachar el-Assad demeure un paria, pourraient l’accepter.

Au sein même du pays du Cèdre, le régime aurait en plus des difficultés à s’imposer compte tenu de l’évolution de ses rapports avec ses anciens alliés. Le Hezbollah, parrainé par l’Iran, est beaucoup plus influent dans le pays qu’il ne l’était en 2005, au moment du retrait des forces armées syriennes. Au point que le rapport de force s’est quelque part inversé entre Damas et le parti de Hassan Nasrallah. « Aujourd’hui, le Hezbollah a des barrages militaires à l’intérieur de la Syrie, alors que par le passé, les barrages et les quartiers généraux des services de renseignements syriens se trouvaient au Liban », dit un proche du parti chiite. Autrement dit, l’Iran, via le Hezbollah, a les moyens de bloquer toute tentative du régime de remettre le grappin sur le pays. Si le Hezbollah a combattu auprès du régime et a participé à le sauver, les avis divergent au sein du parti quant à la nécessité de lui permettre à nouveau de jouir d’une influence de ce côté de la frontière. Certains estiment que c’est désormais au Hezbollah de jouer ce rôle d’arbitre suprême, tandis que d’autres pensent qu’un retour a minima pourrait être profitable au parti puisqu’il renforcerait l’alliance au sein de l’autoproclamé axe de la résistance. L’idée serait de lui permettre de mettre un pied au Liban, en contrepartie de quoi, le parti chiite pourrait solidifier sa présence en Syrie.

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Damas ne pourra pas non plus complètement compter sur son ancien meilleur allié au Liban, à savoir Nabih Berry. Ce dernier s’est éloigné de son parrain depuis le déclenchement de la guerre syrienne. Si un proche du président du Parlement affirme que la relation est au beau fixe, le chef d’Amal a publié récemment ses Mémoires dans lesquelles il n’est fait aucune mention de la Syrie de 2011 à aujourd’hui. Nabih Berry ne s’est pas rendu une seule fois en Syrie au cours de ces dix dernières années. D’après des informations obtenues par L’OLJ, Bachar el-Assad aurait personnellement interféré auprès du Hezbollah lors des législatives de 2018 pour faire élire Jamil el-Sayyed, considéré comme l’homme de Damas et comme un concurrent à Nabih Berry, en tant que député de la Békaa. Le régime syrien a toujours cherché à entretenir des relations-clés avec des personnalités chiites qui occupent ou pourraient être amenées à occuper des postes stratégiques, à l’instar de Jamil el-Sayyed ou de Abbas Ibrahim.

Bassil allié privilégié ?
L’influence syrienne au Liban reposait notamment sur sa capacité à créer des liens étroits avec chaque communauté. En particulier après l’accord de Taëf qui a donné une forme de légitimité à l’occupation syrienne, Damas a renforcé ses relations avec de nombreuses personnalités chrétiennes et sunnites. Assef Chaoukat, l’ex beau-frère de Bachar el-Assad et ancien chef des services de renseignements, avait coutume de dire à un politicien libanais qu’il rencontrait souvent que la Syrie cherchait à se faire « des alliés utiles au Liban pour renforcer son influence à tous les niveaux et dans toutes les communautés ». Une stratégie théorisée et mise en place par Hafez el-Assad.

Sur la scène chrétienne, le régime syrien a créé plusieurs réseaux, notamment fondés sur l’alliance des minorités. Il y a d’abord son allié traditionnel, le parti des Marada de Sleiman Frangié, qui insiste toutefois depuis des années sur le caractère personnel et non politique de sa relation avec Assad. « La relation est toujours très forte avec le régime. Lorsque David Hale est venu au Liban (le sous-secrétaire d’État américain pour les Affaires politiques était à Beyrouth le 14 avril dernier), il a posé des questions sur Assad à Frangié », souligne un membre de premier plan des Marada. La relation entre les Assad et les Frangié date de 1958, époque à laquelle Sleiman Frangié, le grand-père de l’actuel leader du parti, s’est réfugié à Tartous et a fait la connaissance de Hafez el-Assad. Des partisans de Frangié avaient commis une tuerie dans une église à Miziara, ce qui avait obligé le leader du Nord et sa famille à fuir le Liban. Les Marada misent sur leurs bonnes relations avec Damas et Riyad pour faire revivre l’entente syro-saoudienne au Liban. Du point de vue de Damas, Sleiman Frangié est le candidat idéal pour la prochaine présidentielle.

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Paradoxalement, le régime tente pourtant de se rapprocher de son plus grand rival, Gebran Bassil. Le leader du CPL et le régime syrien se font les yeux doux depuis des années sans que le premier n’ose pour l’instant sauter le pas. « Bassil cherche à renforcer ses relations avec la Syrie et souhaite se rendre à Damas », dit un proche du gendre du président. En 2018, le leader chrétien avait l’intention de se rendre en Syrie, et une rencontre avait été fixée avec Bachar el-Assad. Mais Gebran Bassil tenait à venir à titre non officiel, espérant que sa visite ne fasse pas l’objet d’une grande couverture médiatique pour ne pas susciter le courroux des Occidentaux, en particulier les États-Unis. Dans ces conditions, le régime a annulé sa venue. Le chef du CPL parie aujourd’hui sur le retour de la Syrie dans le giron arabe, et sur l’accord nucléaire entre l’Iran et les États-Unis pour renforcer sa position sur la scène locale en tant qu’allié privilégié de l’axe de la résistance. De là à en faire le principal allié de la Syrie au Liban, il reste néanmoins un pas qu’il est encore trop tôt pour franchir.

Dicsours déconstruit
Au-delà de ces personnalités de premier plan, Damas mise aussi sur tout un tas de politiciens de second plan sur la scène chrétienne. C’est le cas d’Élie Ferzli, le vice-président du Parlement, et de quelques autres figures locales ici ou là. Tout cela sans compter le Parti syrien national social (PSNS) dont le défilé à Hamra a été interprété par certains analystes du 14 Mars comme une provocation commanditée par le régime syrien.

Sur la scène sunnite, le régime a vendu au contraire une politique fondée sur l’appartenance commune à la nation arabe, avec le Liban comme prolongement naturel de la Syrie. Ce discours a toutefois été largement déconstruit par l’éclatement de la guerre en Syrie qui a compliqué les relations de Damas avec les sunnites au Liban. Il ne peut plus s’appuyer que sur quelques personnalités de second plan qui n’ont pas vraiment d’influence dans la communauté.

Sur la scène druze, enfin, le régime tente encore de contourner le leadership de Walid Joumblatt en appuyant ses principaux rivaux, Talal Arslane et Wi’am Wahhab. Eux, tout comme le PSNS, espèrent un retour du régime syrien pour retrouver leur influence passée puisqu’ils sont désormais sous la coupe du Hezbollah. « Le Hezbollah passe son temps à ménager la chèvre et le chou, alors que le régime syrien était capable d’imposer sa volonté », dit l’un d’entre eux à L’OLJ.

Les convois d’électeurs pro-Assad brandissant le portrait du président syrien la semaine dernière à l’occasion de l’élection présidentielle ont fait ressurgir des vieux démons et ravivé les pires craintes : celles d’un retour du régime syrien au Liban. La victoire militaire du camp Assad, permise par la double intervention russe et iranienne, ainsi que le rapprochement en...

commentaires (17)

Puisqu’il a des vendus de toutes les confessions suspendus à ses lèvres pour exécuter ses ordres en caressant l’espoir d’être appuyer par lui pour devenir président ou occuper n’importe quel autre poste au pouvoir alors qu’il est à l’origine de la destruction de ce pays avec ses méthodes de terreur pourquoi s’en priver. Ça n’est pas Assad qui est à blâmer c’est bien sûr tous ces pourris qui s’acoquinent avec le Diable pour espérer une place en enfer que ce pays est devenu, depuis que les pourris ont spolié le pouvoir. Et les libanais continuent à les suivre et à voter pour eux croyant dur comme fer qu’ils les protègent et œuvrent pour le bien du pays.

Sissi zayyat

12 h 02, le 29 mai 2021

Tous les commentaires

Commentaires (17)

  • Puisqu’il a des vendus de toutes les confessions suspendus à ses lèvres pour exécuter ses ordres en caressant l’espoir d’être appuyer par lui pour devenir président ou occuper n’importe quel autre poste au pouvoir alors qu’il est à l’origine de la destruction de ce pays avec ses méthodes de terreur pourquoi s’en priver. Ça n’est pas Assad qui est à blâmer c’est bien sûr tous ces pourris qui s’acoquinent avec le Diable pour espérer une place en enfer que ce pays est devenu, depuis que les pourris ont spolié le pouvoir. Et les libanais continuent à les suivre et à voter pour eux croyant dur comme fer qu’ils les protègent et œuvrent pour le bien du pays.

    Sissi zayyat

    12 h 02, le 29 mai 2021

  • Ça n’est plus un Karcher qu’il nous faut pour nettoyer cette crasse politique mais un lance- flemmes.

    Sissi zayyat

    11 h 27, le 29 mai 2021

  • Remballez vos jumelages avec vos amis-dictateurs bourreaux de leurs propres peuples et du notre.

    Christine KHALIL

    07 h 37, le 29 mai 2021

  • Faut avoir le courage de d'évoiler son nom, sinon comment espérer un changement? Si la peur l'emporte, vaut mieux alors ne pas s'exprimer. Comme la peur l'exige.

    Onaissi Antoine

    06 h 13, le 28 mai 2021

  • MALHEUREUSEMENT NOUS AVONS UN TAS DE TRAITRES ET DE VENDUS DANS LE PAYS. ET LES FORCES NATIONALES, CHRETIENS EN TETE, DIVISEES ET NULLES.

    LA LIBRE EXPRESSION

    19 h 13, le 26 mai 2021

  • Sachez à la suite du congrès sur le TOURISME en ARABIE SAOUDITE IL Y A UN PLAN , A L’ÉTUDE , DU JUMELAGE DES RUINES DE PALMYRE ( SYRIE ) AVEC LES RUINES D’ EL ULA ( ARABIE SEOUDITE ) . PERSÉPOLIS ( IRAN ) POURRAIT SE JOINDRE A CE PLAN EN 2022 . ATTENTION , AU LIBAN , ON PERD NOTRE TEMPS A MOUDRE NOTRE HOMMOS DES ANNÉES 1975 A 2000 !! DOIT- ON CONTINUER DE FERMER NOS FRONTIERES AUX DICTATEURS (au choix parmi les Trois pays cités ci-haut) OU FAIRE ATTENTION AUX PROCHAINS JUMELAGES ???

    aliosha

    12 h 17, le 26 mai 2021

  • Alors comme ça il n’a plus d’influence au Liban, mais il a juste fait élire Jamil El Sayyed... en 2018. lequel n’a évidemment plus aucun tentacule au Liban, malgré sa longue et sanglante carrière dont les victimes croupissent encore aujourd’hui dans les geôles syriennes... Assad n’a jamais quitté le Liban...

    El moughtareb

    01 h 27, le 26 mai 2021

  • Quelle salade russe tellement compliqué que quelcun doit écrire un livre, best seller ???

    Eleni Caridopoulou

    16 h 32, le 25 mai 2021

  • LE PRESIDENT AOUN A TRAHI LE PEUPLE LIBANAIS PAR SES ALLIANCES CONTRE NATURE DU LIBAN ET LE PRESIDENT LAHOUD A TRAHI LA CONSTITUTION EN SE FAISANT REELIRE APRES SES PREMIERES 6 ANNEES LA VERITE LE VRAI LIBANAIS ETAIT CAMILLE CHAMOUN QUI N'A PAS HESITE A FAIRE APPEL A LA MARINE AMERICAINE POUR SAUVER LE LIBAN D'UNE REVOLUTION DIRIGEE A L'EPOQUE PAR NASSER

    LA VERITE

    13 h 55, le 25 mai 2021

  • Tant que des vendus tiennent le pouvoir rien ne se fera comme le souhaite la majorité des libanais. Les présidents se sont succédés aussi pourris les uns que les autres, ils ont servis à soumettre ce pays pour leurs propres intérêts et ont passé le flambeau à leurs successeurs pour perpétuer la trahison et le pillage qui sont devenus le leitmotiv de tout politicien aspirant à occuper un poste ou une fonction étatique et nationale. Voilà tout. Regardez autour de vous, leurs richesses soudaines après leurs mandats et leurs biens acquis ne souffrent d’aucun doute quand à leur honnêteté et leur loyauté.

    Sissi zayyat

    13 h 17, le 25 mai 2021

  • ainsi il se trouvera toujours des libanais pret a jouer le role de vassaux pourvu qu'ils puissent en tirer le moindre profit, le moindre morceau de sucre

    Gaby SIOUFI

    10 h 34, le 25 mai 2021

  • comment/pourquoi blamer les syriens qd des centaines de libanais "responsables" agissent evers eux comme des vassaux(terme en vogue ces derniers jours)? ..."""Assef Chaoukat, l’ex beau-frère de Bachar el-Assad et ancien chef des services de renseignements, avait coutume de dire à que la Syrie cherchait à se faire « des alliés utiles au Liban pour renforcer son influence à tous les niveaux et dans toutes les communautés...""" PRESQUE VECU : un responsable syrien de haut rang avait dit a un libanais -avec toute l'ironie et le sarcasme possible- que bcp de politiques libanais ou autres vassaux donnaient a la syrie BEAUCOUP PLUS que ce que la syrie demandait. a nous d'en tirer la conclusion & consequences qu'il faut

    Gaby SIOUFI

    10 h 20, le 25 mai 2021

  • QUEL PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE ACCEPTE QUES LES PHOTOS DES AYATOLLAHS ET GENERAUX IRANIENS SOIENT DRESSES TOUT AU LONG DE L,AUTOSTRADE QUI MENE A L,AEROPORT ET QU,AVEC CELLE D,ASSAD SOIENT TRIMBALLEES PAR LES MILICES ET LEURS FANATIQUES DANS LES RUES DE BEYROUTH QUAND SA PROPRE PHOTO PENDUE SUR LE MUR DE SON BUREAU EST PRETE A TOMBER ?

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 00, le 25 mai 2021

  • C'est donc ce safavidisme qui cimente de manière occulte l'Axe dit de la Résistance. La junte militaire des pasdaran et la junte militaire assadienne sont autant safavide l'une que l'autre, de même que les sionistes religieux et les sionistes laïcs sont autant laïcs les uns que les autres. La différence entre l'idéologie sioniste et l'idéologie safavide est que la seconde se dissimule derrière une religion (la junte des Pasdaran prétend défendre tous les musulmans, sunnites comme chiites, et même exporter l'islam dans le monde entier), une autre idéologie: le tiers-mondisme, et même (sans en être à une contradiction près) derrière la résistance des chrétiens contre l'islam pour peu que par islam on entende uniquement les jihadistes sunnites opposés au projet safavide. Pour le Liban c'est sans doute la troisième dissimulation qui est la plus dangereuse, qui a mis tant de chrétiens dans les bras de l'occupant assadien et aujourd'hui du Hezbollah.

    Citoyen libanais

    08 h 17, le 25 mai 2021

  • Il n'y a pas d'un côté la tutelle syrienne et de l'autre côté la tutelle iranienne. Il y a un même Axe qui regroupe les deux et duquel le Liban ne s'est jamais libéré. C'est seulement le moyen d'oppression qui a changé: on est passés de l'armée d'occupation assadienne au Parti du nitrate d'ammonium et des feux d'artifices du port de Beyrouth. L'objectif reste exactement le même: que le Liban serve de poumon économique au régime assadien ou plutôt à ce qu'il en reste, ni plus, ni moins. La junte militaire assadienne a fait des sunnites des citoyens de seconde zone dans son pays et des non-sunnites des pions au service de son pouvoir, de même la junte militaire des pasdaran poursuit également le même objectif mais en incluant aussi l'Iraq afin d'établir un corridor chiite entre l'Iran et la méditerranée. Car le peuple iranien dans sa grande majorité hait cette junte sectaire autant que les libanais, syriens et iraquiens. Donc celle-ci a besoin de conquêtes pour se protéger elle-même. Les Safavides étaient au départ confrérie anatolienne qui s'est convertie au chiisme et a été persécutée par les Ottomans pour cela. Plutôt que de résister chez eux ils sont allés conquérir l'Iran, y ont importé de force le chiisme en prétendant protéger les iraniens contre les ottomans alors qu'en procédant ainsi ils ne faisaient en fait que se protéger eux mêmes. Conquérir pour se protéger au lieu de résister chez soi, cela rappelle également le sionisme comme par hasard.

    Citoyen libanais

    08 h 01, le 25 mai 2021

  • Parmi les personnalités de premier plan qui ont toute la confiance de nos voisins , vous ne mentionnez pas le Président Emile Lahoud qui a gouverné le Liban d'une main de fer et instauré l'ordre et la prospérité économique tout le long de son mandat , sans courber une seule fois l'échine devant quiconque , Il est curieux que cet article l'ait ignoré .

    Chucri Abboud

    02 h 46, le 25 mai 2021

  • La Russie gouverne le secteur qu'elle a réservé à Assad. Rien ne se passe sans son accord dans la petite Syrie.

    Esber

    00 h 38, le 25 mai 2021

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