Le Liban a retenu son souffle jeudi soir, lorsque trois roquettes ont été tirées depuis le sud du pays en direction d’Israël. Très vite, la tension est toutefois retombée lorsque tout le monde a compris que l’événement témoignait plutôt, et paradoxalement, d’une volonté des parties libanaises, en premier lieu le Hezbollah, de ne pas prendre part pour le moment au conflit qui oppose Israël et le Hamas. L’envoi de roquettes par une faction palestinienne proche du Hamas avait pour objectif de faire montre de solidarité sans pour autant impliquer le front libanais. Elles ont été pointées vers le large des côtes israéliennes de façon à ne provoquer aucune réponse de la part de l’État hébreu. Les personnes à l’origine de ces tirs ont été arrêtées par les autorités libanaises tandis que le Hezbollah a démenti toute implication dans ces événements. « Il y a un consensus général pour éviter l’escalade », affirme à L’Orient-Le Jour un proche du parti chiite.
Comme en 2014, lors de la dernière confrontation entre Israël et le Hamas, le Hezbollah n’a pas l’intention de s’impliquer directement dans le conflit. Il tient à conserver les règles d’engagements que le secrétaire général du parti Hassan Nasrallah a exposé à plusieurs reprises : toute frappe israélienne contre le parti en Syrie doit recevoir une réponse depuis la Syrie, et si un membre du parti est tué, celui-ci est autorisé à riposter de partout, que ce soit de la Syrie ou du Liban. Si le parti est agressé au Liban, la riposte viendra du Liban. Autrement dit, si Israël n’ouvre pas le front du nord, le parti chiite n’a pas l’intention de le faire.
L’armée israélienne devait lancer au mois de mai le plus grand exercice militaire de son histoire, impliquant une mobilisation à la frontière nord avec le Liban. Le Hezbollah s’était mis en état d’alerte, des unités militaires avaient été déployées et des missiles étaient prêts à être lancés en cas d’escalade. Selon des informations recueillies par L’OLJ, Israël avait fait passer un message au Hezbollah, via les Russes, signifiant que ces exercices n’avaient pas vocation à provoquer le parti chiite. Les manœuvres ont finalement été annulées au deuxième jour en raison du déclenchement des hostilités avec le Hamas et du soulèvement des Palestiniens dans les territoires et en Israël.
Pour le Hamas, un choix pragmatique
Le Hezbollah observe désormais avec attention l’évolution des événements de l’autre côté de la frontière, se sentant indirectement partie au conflit. Tant les capacités armées du Hamas – que le Hezbollah considère comme faisant partie de l’Axe de la Résistance – que la réponse israélienne donnent des indications précieuses pour une éventuelle future confrontation directe avec Israël. Le parti pro-iranien considère pour le moment que l’Axe de la Résistance est en train de marquer des points puisque le Hamas a été capable d’atteindre Tel-Aviv, malgré le système de défense antimissile israélien Dôme de fer. Le Hezbollah met en avant le fait que ses capacités militaires sont bien supérieures à celles du Hamas et qu’il pourrait ainsi infliger de lourdes pertes à l’État hébreu. L’Iran et le Hezbollah auraient joué un rôle de premier plan dans l’amélioration de l’armement du parti islamiste, selon la majorité des observateurs.
Les deux mouvements politico-militaires entretiennent une relation assez étroite, qui s’est toutefois distendue en raison du conflit syrien. La branche politique du Hamas a pris le parti de la révolution – l’ancien dirigeant du parti, Khaled Mechaal, a quitté la Syrie où il avait établi son QG en janvier 2012 – tandis que le Hezbollah est intervenu en soutien du régime de Damas à partir de 2013. Les relations entre les deux parties se sont toutefois améliorées après la défaite militaire des rebelles syriens. Ismaïl Haniyé, le chef du bureau politique du Hamas, s’est rendu au Liban en septembre dernier et a été notamment reçu par Hassan Nasrallah. « Le parti œuvre à la réhabilitation des relations entre le Hamas et le régime syrien », dit le proche du Hezbollah. L’un des plus hauts responsables militaires du mouvement, Saleh al-Arouri, a même résidé ces dernières années dans la banlieue sud de Beyrouth. Naïm Kassem, numéro deux du Hezbollah, s’est rendu samedi dans les bureaux du Hamas à Beyrouth. Il a assuré aux responsables du mouvement islamiste palestinien que la « Résistance » se tenait à ses côtés. « Ce qui se passe actuellement contribue à la restauration et au renforcement de la relation entre le Hezbollah et le Hamas », affirme le proche du parti chiite. « C’est la preuve que la Résistance existe toujours et qu’elle reste la seule option face à l’occupant sioniste ».
L’envoi de roquettes sur Tel-Aviv a été interprété par le Hezbollah comme un message politique du Hamas destiné à l’Iran, pour lui montrer son alignement dans l’Axe de la Résistance. Le parti met en avant le fait qu’Ismaïl Haniyé a envoyé une lettre au guide suprême de la République islamique juste avant le début de l’offensive du mouvement islamiste. « Il y a des désaccords au sein du Hamas. Certains considèrent que le fait de parier sur l’Iran est un choix pragmatique et non stratégique, en raison de l’absence d’alternative et de la pression exercée sur le mouvement par l’Organisation de libération de la Palestine et par plusieurs pays arabes », explique un proche du Hamas. « Le mouvement n’est pas d’obédience purement iranienne. Il a aussi des affiliations avec l’Égypte, la Turquie et le Qatar », assure pour sa part un diplomate arabe sous couvert d’anonymat. Du point de vue du Hezbollah, le Hamas n’a pas d’autres choix que rallier complètement l’Axe de la Résistance s’il veut être capable de tenir tête à Israël.
Le fait que la question palestinienne soit à nouveau au centre de toutes les attentions fait aussi le jeu du parti chiite. Cela rappelle à ses partisans ce qui constitue le cœur de sa rhétorique et remet le parti dans une position plus confortable sur les scènes libanaise et régionale. La guerre de Gaza se déroule dans un contexte régional de négociations sur plusieurs fronts, entre les États-Unis et l’Iran à Vienne, entre Riyad et Téhéran à Bagdad. Les détracteurs de l’Iran l’accusent de vouloir utiliser cette carte dans les discussions avec les États-Unis.
QUAND L,ANE RECOIT PLUS DE COUPS DURS IL BRAIT CI-HAUT... IL CHANTE SA VICTOIRE !
14 h 32, le 18 mai 2021