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Lifestyle - La Mode

« Paramour » , une tendre anthologie de Rabih Kayrouz pour l’hiver prochain

On aurait tort d’associer la nouvelle collection Rabih Kayrouz automne/hiver 21-22 avec la multitude d’épreuves traversées par la maison l’année dernière, à commencer par la dévastation causée par la cauchemardesque explosion du 4 août qui a emporté son quartier général et gravement blessé son créateur. Rabih Kayrouz s’est déjà relevé. Il a regagné sa source et sa bulle bienveillante. Plus que jamais, ses vêtements nous prennent dans les bras.

« Paramour » , une tendre anthologie de Rabih Kayrouz pour l’hiver prochain

Maison Rabih Kayrouz automne/hiver 21-22. Photos Flavie Costamagna (Magna Presse)

Une chaise en lévitation, qui tourne sur elle-même. La chaise, c’est la stabilité, le lieu où l’on se pose. Et cette chaise de l’atelier refuse de se poser. Elle incarne le vertige de la pensée en joie, en perpétuelle recherche, en danse et en transe. Ainsi commence le film offert par Maison Rabih Kayrouz dans le cadre de la semaine parisienne du prêt-à-porter automne/hiver 21-22. En cela, Rabih Kayrouz poursuit une collaboration heureuse avec le réalisateur Nasri Sayegh dont l’esthétique est jumelle de la sienne autant que l’obsession d’un Orient sensuel et insouciant perdu dans les plis de l’histoire, et dont les pépites ressurgies des archives décuplent les sortilèges.

« Fiévreusement contemporaine »

« Comme son titre l’indique, c’est par et avec amour que ce film a été composé, réalisé », explique Nasri Sayegh. « Avec Rabih, les choses vont très vite. Nous fonctionnons tous deux à la confiance, à l’instinct. Il s’agit de notre seconde collaboration scellée, comme lors de notre première rencontre sur 320/38 Maison Rabih Kayrouz pour la Semaine parisienne de la haute couture, par l’échange de quelques mots, de gestes succincts qui très vite prennent forme », ajoute le réalisateur qui poursuit : « Fiévreusement contemporaine, la garde-robe de Rabih Kayrouz procède pour moi de l’évidence d’un souffle ou d’une respiration. Chacune de ses collections montre son allégeance indéfectible au beau.

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Matières, volumes, couleurs s’épousent inlassablement pour composer une esthétique de l’épure. Ses créations sont nées dans et pour le mouvement, le geste et leur beauté. Ce sont les pièces de Rabih qui insufflent et le rythme et le mouvement, et une certaine chorégraphie. Ses robes dansent. Parfois dans le silence. » « Dans Paramour, j’ai vite décelé la fluidité, une folle propension à entrer naturellement dans la danse. Ses couleurs deviennent formes, ses formes deviennent couleur. Sur les très belles images du chef opérateur Matteo Verzini, j’ai immédiatement entendu, entrevu le velours sublime de Yasmine Hamdan reprenant le mythique All is full of love de Björk. Là encore, une évidence. Interprété, incarné par l’envoûtant mannequin Alyssa Sardine, Paramour est un écrin voluptueux qui nous parle encore et toujours d’amour. Réaliser un film pour Rabih Kayrouz, c’est être à l’écoute des matières, des volumes et des couleurs. Un montage qui s’apparente tant à l’univers de la danse qu’à celui de la broderie. Paramour, c’est enfin, et là encore, l’évidence – candide – de l’amour. Que nous reste-t-il d’autre que la candeur ? » témoigne-t-il avec passion, et puis, après un silence : « Et puis il y a ce crépitement crépusculaire qui provient d’une archive de la radio égyptienne des années 50. Une conversation surannée avec Feyrouz. Ouhibbouka, dit la chanteuse : une déclaration d’amour murmurée ad libitum, sans cesse renouvelée. Björk, Feyrouz, Yasmine, Rabih, vous, nous, toutes et tous, des aveux d’amour. Paramour. »

Maison Rabih Kayrouz automne/hiver 21-22. Photo Flavie Costamagna (Magna Presse)

Puiser dans les trésors existants

Ne pas se laisser leurrer par ce fichu blanc-gaze qui ouvre la danse, ne pas se fier à ces images douloureuses que superpose dans notre subconscient la mémoire blessée. Non, dit Rabih Kayrouz, aucune blessure, aucune souffrance derrière la toile de cette collection qui se veut avant tout confort et réconfort. Elle est née aussi d’une volonté du créateur de « puiser dans ses propres trésors », tissus et patronages, pour ne pas ajouter de pression sur les processus de production une résolution mûrie au fil des saisons. Oubliant ici plus que jamais les contraintes que peuvent dicter, justement, les saisons de la mode, il confie n’avoir pensé qu’aux femmes qu’il aime. « Toute ma volonté dans cette collection était de créer pour elles des vêtements comme des objets qu’on garde longtemps, intemporels, fidèles. Ce geste d’amour a eu pour moi une grande importance », précise le couturier qui souligne avoir voulu créer un vestiaire urbain, qui permette de parcourir librement les villes, vestes fendues, jupes larges, blouses fluides, rien de contraignant, rien qui impose une attitude autre que naturelle. »

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Chasser l’image qui fait mal et imaginer, peut-être, sous le fichu blanc, le regard surpris de la Jeune fille à la perle de Vermeer, lumière dans la banalité d’un quotidien confiné, projection dans un temps antérieur qui nous semble brusquement révolu. Comme pour renouer ce fil rompu entre le présent et nos vies de naguère, le couturier nous offre ses mailles, ses tissus, des entrelacs qui font cocon. Dans la sobriété des tenues, la monochromie de verts, bleus, rouges francs, blanc et noir sans concession qui révèle la beauté des textures, velours, brocarts, draps de laine, double gabardine, les quelques éclats d’or des damas des débuts, et par-delà la beauté du geste couture, se révèle un souci de tisser des armures douces et enveloppantes, entre manteaux pour s’y blottir, capes et trench généreux, costumes masculins aux lignes épurées. Tout cela vous étreint comme au réveil d’une aube nouvelle, et l’amour circule à travers les formes et les fibres.

Une chaise en lévitation, qui tourne sur elle-même. La chaise, c’est la stabilité, le lieu où l’on se pose. Et cette chaise de l’atelier refuse de se poser. Elle incarne le vertige de la pensée en joie, en perpétuelle recherche, en danse et en transe. Ainsi commence le film offert par Maison Rabih Kayrouz dans le cadre de la semaine parisienne du prêt-à-porter automne/hiver 21-22....

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