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La campagne de vaccination contre le Covid-19 enfin lancée

Des catégories professionnelles font cependant état d’un flottement dans l’application de la plateforme en ligne.

La campagne de vaccination contre le Covid-19 enfin lancée

« Abou Salim » vacciné à l’hôpital Rafic Hariri. Mohammad Azakir/Reuters

Ce n’est pas sans de sérieux handicaps sociaux, économiques et politiques que le Liban, bien en retard sur ce plan par rapport à d’autres pays du monde arabe, a donné hier le coup d’envoi de sa campagne de vaccination anti-Covid. Grâce à une première livraison de 28 500 doses du vaccin Pfizer/BioNTech, arrivée samedi au Liban à bord d’un avion de la MEA, cette campagne commence quasiment jour pour jour après le premier cas de coronavirus annoncé en 2020 au Liban. En un an, le pays a enregistré 336 992 cas et 3 961 morts, dont 32 durant les dernières 24 heures, avec un pic de près d’une centaine de décès par jour à la fin du mois de janvier. La flambée des contaminations en janvier était largement due au vaste relâchement des restrictions pendant les fêtes de fin d’année, mais aussi à la propagation de variants plus contagieux.

La première phase de la campagne déclenchée hier concerne le personnel médical et les personnes âgées de plus de 75 ans. Les vaccinations ont débuté dans trois CHU de Beyrouth, l’hôpital gouvernemental Rafic Hariri, l’hôpital Saint-Georges à Achrafieh et le Centre hospitalier de l’Université américaine (AUBMC). À l’hôpital Rafic Hariri, le Premier ministre démissionnaire Hassane Diab, qui a tenu à faire acte de présence, a remercié le personnel médical pour ses « sacrifices ». Il a par la suite présidé une cérémonie officielle au siège de la présidence du Conseil en présence de représentants de la communauté internationale.

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« Aujourd’hui, le Liban passe du stade de la peur à celui de la protection par la vaccination (…), en prévision d’un retour progressif à la normale », a-t-il affirmé dans son discours. Contrairement à ce qui avait été annoncé, M. Diab ne s’est pas fait vacciner. Il a précisé qu’il ne voulait pas faire d’exception puisqu’il n’était pas dans la tranche d’âge qui doit se faire vacciner en priorité. Le chef de l’État, lui, a remis à mercredi son rendez-vous de vaccination, précise son entourage.

« Abou Salim » vacciné

Les vaccinations se sont déroulées sans accroc dans les CHU. « Nous espérons que ce sera le début de la fin de cette épidémie dans le pays », a déclaré Mahmoud Hassoun, chef de l’unité des soins intensifs de l’hôpital Rafic Hariri, le premier à recevoir le vaccin. La star de la télévision Salah Tizani (93 ans), mieux connu sous le nom d’Abou Salim, faisait partie des personnes âgées vaccinées

Comme pour l’hôpital Rafic Hariri, l’AUBMC a eu droit à 400 vaccins.

« Zéro effet secondaire ; sans le sparadrap, je ne saurais même pas qu’on m’a piqué », a affirmé pour sa part le président de l’ordre des médecins Charaf Abou Charaf qui a reçu son vaccin à l’hôpital Saint-Georges, auquel ont été accordés 300 vaccins. Le Dr Abou Charaf a fait l’éloge de l’organisation qui préside à l’opération. « C’est l’avantage des centres hospitaliers, ajoute-t-il. Le personnel infirmer est là, les internes sont là en nombre et facilitent la bonne marche de la campagne. » L’épouse du président de l’ordre des médecins, qui l’accompagnait, n’a pu recevoir le vaccin du fait qu’elle n’appartient pas à une catégorie d’âge prioritaire.

À l’orée de la campagne de vaccination, le Dr Abou Charaf préside aujourd’hui une réunion consacrée aux médias, destinée à écarter les fausses informations qui sèment le doute sur l’utilité du vaccin, auquel le corps médical assure qu’il n’existe pas d’alternative.

Répertoriés dans la première catégorie des personnes à vacciner, des pensionnaires du couvent de la Croix-Broummana, une maison d’accueil pour religieux ayant atteint le grand âge, ont été vaccinés ainsi que le personnel soignant. Au micro d’une radio qui lui demandait ce qu’il conseillait aux Libanais, l’un des pensionnaires a affirmé, pince sans rire : « Attendez voir ce qui va m’arriver ! » Mais aucun effet secondaire significatif n’a été enregistré hier dans les trois grands centres ouverts ainsi qu’à Broummana. On rappelle que plus de 160 millions de personnes dans le monde ont déjà pris le vaccin Pfizer.

À l’AUBMC, une infirmière se fait vacciner. Anwar Amro/AFP

Le calendrier des vaccinations

Les vaccinations se poursuivront aujourd’hui dans une dizaine d’hôpitaux à travers le pays, selon le ministère de la Santé. Le Dr Abdel Rahman Bizri, président du Comité de supervision de la campagne de vaccination, a précisé hier que de nouveaux centres de vaccination se joindront à partir d’aujourd’hui aux centres déjà opérationnels et qu’ils seront « entre 15 et 17 » dès mercredi.

Selon le Dr Bizri, le cercle des centres de vaccination s’élargira dès que parviendra au Liban, début mars, le vaccin AstraZeneca dont les conditions de conservation sont moins rigoureuses que le vaccin Pfizer, qui doit être conservé à -70 degrés, et qui pourra donc être transporté loin de la capitale. Des médecins et des personnes figurant dans la première phase de la campagne ont cependant fait part hier d’un flottement dans l’application du programme de vaccination, affirmant qu’ils n’ont encore reçu aucune notification du centre où ils doivent se rendre. D’autres catégories de travailleurs, notamment dans le secteur des médias, qui se trouvent au contact quotidien de la foule, ou de l’administration ignorent toujours dans quelle catégorie ils se trouvent.

En tout état de cause, selon des sources administratives et médicales, la campagne de vaccination n’étant qu’à ses débuts, des ratés pourraient se produire dans la transmission des rendez-vous de vaccination, compte tenu de leur nombre (environ 350 000 inscriptions ont déjà été prises) et de leur disparité. Des sources informées font également état d’un manque de personnel et d’expérience. Les jours qui viennent diront ce qu’il en est.

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Au ministère de la Santé, on souligne que 20 % des doses du vaccin Pfizer reçues seront tenues en réserve afin d’assurer l’injection de la seconde dose, trois semaines après la première prise, dans le cas de retards dans les livraisons.

La LBCI précise par ailleurs que les arrivages des doses de Pfizer s’étaleront sur six semaines, chaque arrivage portant sur successivement 31 000, 41 000, 32 000, 36 000, 54 000 et 25 000 doses, sachant qu’une dose équivaut à six vaccins.

Avec ses six millions d’habitants, dont plus d’un million de réfugiés syriens et palestiniens, le Liban attend deux millions de doses de vaccins Pfizer/BioNTech, mais en tout, il entend obtenir au total quelque six millions de doses, notamment 2,7 millions dans le cadre de la plateforme internationale Covax lancée pour aider les pays les plus défavorisés. Le vaccin sera administré gratuitement aussi bien aux Libanais qu’aux ressortissants étrangers.

À l’AUBMC, la salle d’attente. Mohammad Azakir/Reuters

« No wasta »

L’ouverture de la campagne de vaccination s’accompagne nécessairement de questions sur la transparence du processus, tandis que des rumeurs sur une attribution clientéliste du vaccin circulent depuis des jours. Ainsi, pour « garantir un accès équitable, élargi et rapide » pour tous, la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge va superviser le stockage et la distribution des vaccins tout au long de l’année. Cette initiative de contrôle international s’explique par la méfiance que la communauté internationale nourrit à l’égard de ce clientélisme qui mine toutes les activités publiques au Liban.

Ce sujet, le vice-président de la région MENA de la Banque mondiale, Farid Belhadj, l’a abordé dans une intervention par vidéoconférence à la cérémonie de lancement de la campagne : « Afin d’aider à lutter contre la pandémie de Covid-19 et dans le but de sauver des vies, la Banque mondiale a réaffecté 34 millions de dollars dans le cadre du projet existant de résilience sanitaire au Liban pour aider le pays à se procurer des vaccins et à lancer une campagne nationale qui ciblera deux millions de Libanais et de non-Libanais. » « La Banque mondiale insiste pour que les normes de transparence les plus élevées soient respectées dans la gestion de la campagne nationale de vaccination. (...) La priorité est de vacciner les agents de santé qui risquent leur vie chaque jour pour sauver les personnes contaminées, les personnes âgées de plus de 65 ans et les personnes souffrant de maladies chroniques appartenant à une tranche d’âge spécifique. La crédibilité et la transparence sont les deux éléments fondamentaux de tous les programmes et projets financés par la Banque mondiale dans le monde sans aucune exception. Et laissez-moi le dire très clairement : il n’y aura pas de wasta », a dit M. Belhadj.

Ce n’est pas sans de sérieux handicaps sociaux, économiques et politiques que le Liban, bien en retard sur ce plan par rapport à d’autres pays du monde arabe, a donné hier le coup d’envoi de sa campagne de vaccination anti-Covid. Grâce à une première livraison de 28 500 doses du vaccin Pfizer/BioNTech, arrivée samedi au Liban à bord d’un avion de la MEA, cette campagne...

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