Le secrétaire général adjoint du Hezbollah, Naïm Kassem, a appelé vendredi le président libanais Michel Aoun et le Premier ministre désigné Saad Hariri à "arrondir les angles" dans leur approche du dossier de la formation d'un gouvernement, alors qu'un bras de fer oppose les deux hommes sur cette question.
Le Liban est sans gouvernement depuis presque six mois, après la démission du cabinet de Hassane Diab le 10 août 2020 dans la foulée de l'explosion meurtrière au port de Beyrouth. Saad Hariri a été nommé au poste de Premier ministre le 22 octobre dernier. Mais les tractations sont désormais au point mort, les deux responsables ne se sont pas entretenus depuis fin décembre et les tensions sont vives entre leurs formations respectives.
"Le mandat du président américain Joe Biden sera celui du dialogue avec l'Iran et d'une tentative de retour à l'accord nucléaire, bien que cela demande du temps", a affirmé Naïm Kassem lors d'une interview sur les ondes de la radio "al-Nour", proche du parti chiite. "Je m'attends à ce que les choses se calment", a-t-il estimé, soulignant toutefois que "les négociations entre les États-Unis et l'Iran n'ont rien à voir avec l'évolution des relations entre le Hezbollah et Washington". "Les questions dont l'Iran discute avec les États-Unis concernent l'accord nucléaire et l'intérêt des deux pays. Le Hezbollah n'a qu'une préoccupation, c'est la présence sioniste dans la région, et il n'y a pas de place dans un avenir proche pour des discussions entre l'Amérique et le Hezbollah. En effet, nous voyons qu'il ne sert à rien de s'asseoir avec eux, car les résultats sont connus à l'avance, c'est-à-dire que l'Amérique favorisera Israël", a-t-il tranché.
"L'Iran n'a rien à voir avec les décisions du Hezbollah dans le dossier de formation du gouvernement, et le Hezbollah œuvre pour que le cabinet soit formé sans aucune interférence", a-t-il poursuivi, notant qu'"après les élections américaines, il est devenu clair que le blocage au Liban est principalement interne". Et le responsable chiite d'appeler Michel Aoun et Saad Hariri à "arrondir les angles et essayer de trouver une solution à leurs désaccords", assurant que "le tiers de blocage n'a été évoqué par aucune des deux parties". Le CPL et Michel Aoun sont accusés par leurs détracteurs de chercher à obtenir le tiers du nombre total de ministres au sein du futur gouvernement, ce qui leur accorderait la possibilité de faire tomber le cabinet en cas de démission de leurs ministres.
"Coopératifs"
"Nos discussions avec les Français n'ont jamais été interrompues et elles se poursuivent. Il y a des signes indiquant un retour de l'initiative de Paris, mais nous n'avons pas encore compris les conditions posées et à quel point celle-ci est sérieuse. Nous encourageons toute initiative constructive, car la formation d'un gouvernement est la solution", a en outre affirmé Naïm Kassem. "Il est nécessaire que nous œuvrions collectivement et positivement à la mise en place d'un cabinet, et quand la mouture du gouvernement sera prête, nous serons coopératifs", a-ajouté M. Kassem.
Le 1er septembre, lors de sa deuxième visite au Liban en moins d'un mois, le président français, Emmanuel Macron, avait présenté une initiative pour le redressement économique et financier du pays. Dans cette feuille de route figuraient plusieurs priorités, en tête desquelles la formation d'un "cabinet de mission", dont toutes les formations politiques libanaises s'étaient engagées à faciliter la mise sur pied dans un délai de quinze jours. Près de six mois se sont écoulés depuis cet engagement. C'est dans ce contexte que M. Macron avait annoncé il y a une dizaine de jours qu'il entendait revenir à Beyrouth pour une troisième visite. Et dans un entretien téléphonique avec son homologue libanais samedi dernier, il avait déclaré "être prêt à aider" Beyrouth à former le nouveau gouvernement.
Entente avec le CPL
Le numéro deux du Hezbollah est par ailleurs revenu sur l'entente liant le parti pro-iranien au Courant patriotique libre (CPL, aouniste). "Le document d'entente avec le CPL repose sur 10 points et nous avons constaté mutuellement que certains d'entre eux doivent être clarifiés et détaillés, d'où la nécessité d'y apporter des changements après quinze années". La perspective d'un dialogue entre les deux formations concernant leur relation avait déjà été évoquée le 10 janvier par le chef du CPL, Gebran Bassil.
Le responsable chiite a en outre commenté les incidents de Tripoli de la semaine dernière qui constituent selon lui "un acte de vandalisme qui pave la voie à l'instrumentalisation politique de la souffrance du peuple". La semaine passée, la capitale du Nord a été le théâtre de manifestations contre la situation socio-économique aggravée par le confinement strict, qui ont dégénéré en affrontements entre contestataires et forces de l'ordre, faisant un mort et plusieurs centaines de blessés. "Il faut trouver une réponse à la crise socioéconomique afin que les fauteurs de troubles ne l'instrumentalisent pas à des fins sécuritaires", a estimé M. Kassem.
commentaires (7)
Bon sang, mais c'était qui déjà qui a fait des pieds et des mains pour exiger le ministère des finances pour les chiites, ce qui a enrayé tout le processus de formation du gouvernement? Je l'ai sur le bout de la langue. Ça va me revenir...
Gros Gnon
18 h 33, le 05 février 2021