Le patriarche maronite Béchara Raï a estimé vendredi qu'il était "honteux" de commencer l'année 2021 sans que ne soit formé un nouveau gouvernement, regrettant que les responsables politiques chargés de cette mission se comportent "comme s'ils n'étaient que des pions sur l'échiquier du Moyen-Orient et des grandes puissances". Cette nouvelle admonestation du patriarche à la classe dirigeante a été lancée alors que depuis août et la démission du cabinet de Hassane Diab, le nouveau gouvernement n'a pas encore vu le jour.
"Deux mois et dix jours ont passé depuis la désignation (de Saad Hariri, ndlr) et le Liban se dirige rapidement vers l'effondrement total et la faillite", a-t-il regretté. Il a estimé que la responsabilité de mettre sur pied le cabinet est "plus forte et plus grande que celle des personnes qui ont détruit le port de Beyrouth, ravagé la moitié de la capitale et causé des centaines de morts innocentes", sachant que si cette responsabilité n'est pas assumée, c'est "le peuple tout entier et l'État qui en paieront ls prix".
Retour au point de départ
"Il est honteux d'entamer l'année sans qu'un gouvernement ne soit formé et ne se consacre à sa mission", a encore déclaré le patriarche, qui a également qualifié de "honte" le fait que les personnes bloquant la formation du cabinet "agissent comme si elles n'était que des pions sur l'échiquier du Moyen-Orient et des grandes puissances". Pour certains observateurs, les responsables libanais attendent l'investiture du président américain élu Joe Biden pour que le cabinet voit le jour, sur fond de tensions entre les États-Unis et l'Iran. "Il faut que nous rappelions à la classe politique que la formation du gouvernement est leur premier devoir et qu'il est essentiel", a lancé Mgr Raï.
"En cette occasion, nous réitérons que nous sommes engagés à trouver une solution à la cause libanaise, que cela passe par la volonté des Libanais eux-mêmes ou en coopération avec la communauté internationale et arabe", a ajouté le chef de l'Église maronite, qui a souligné la nécessité de créer "un État de droit dans lequel nous pourrons vivre ensemble, avec une seule armée nationale, une seule Constitution et un seul drapeau".
Près de cinq mois après la démission du Premier ministre Hassane Diab, le 10 août dernier, dans la foulée de la gigantesque explosion du 4 août au port de Beyrouth, le Liban ne s'est toujours pas doté d'un nouveau gouvernement. Le cabinet sortant est chargé de la gestion des affaires courantes, alors que le pays est englué dans une série de crises socio-économique, politique, financière et sanitaire. Lors de sa désignation comme Premier ministre, le 22 octobre, Saad Hariri s'était engagé à former un cabinet de spécialistes indépendants. Mais il se heurte aux revendications des différentes formations politiques au sujet la distribution des portefeuilles. Il lui est notamment reproché par le chef de l'État et le parti fondé par ce dernier (le Courant patriotique libre, CPL) d'avoir promis au tandem chiite Amal-Hezbollah de pouvoir nommer leurs ministrables mais de refuser ce droit aux autres parties. Pour tenter de sortir de l'enlisement des tractations, le patriarche maronite avait lancé il y a deux semaines une initiative et rencontré dans ce cadre le chef de l'État, le Premier ministre désigné et une série de responsables, mais alors que l'optimisme prévalait avant Noël, il était retombé aussi rapidement, ce qui avait valu aux dirigeants une nouvelle salve de reproches de la part du chef de l'Église maronite. Les négociations sont depuis revenues au point de départ, Saad Hariri étant actuellement à l'étranger.
commentaires (5)
Monseigneur Hariri ne peut rien faire sans l'aval du Hezbollah ?????
Eleni Caridopoulou
18 h 33, le 02 janvier 2021