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Nos Lecteurs ont la Parole

Dialogue des dates

14 Mars : Puis-je savoir pourquoi tu t’es dégonflé ? Tu avais le vent en poupe !

17 Octobre : C’est toi qui parles ? Tu as du culot !

14 Mars : Je peux me le permettre, puisque j’ai tenu plus longtemps, plusieurs années, et j’ai un palmarès quand même plus chargé ! J’ai rassemblé des centaines de milliers de Libanais sur une longue période, envahi toutes les places, engorgé toutes les rues, pavoisé à satiété, étalé le drapeau libanais sur la majeure partie du territoire national, entonné son hymne aux quatre coins et remporté deux législatives !

17 Octobre : Ce qui rend la chute plus douloureuse et la déception plus cuisante… plus pour ta base qui a fondé en toi tant d’espoirs, sans compter tes martyrs. Tu les oublies ?

14 Mars : Ma tête, ou plutôt ceux qui étaient à ma tête, les ont oubliés pour chercher leurs propres intérêts, mais pas moi, pas mon cœur ! Je pense beaucoup à eux et je les pleure ! J’ai même honte de parcourir la galerie de leurs portraits. Leurs yeux inquisiteurs me torturent. Mais que veux-tu de moi ? Je fais partie du passé. Je suis un has been. Revenons à toi. Comment puis-je t’aider ? Te faire profiter de mon expérience, des leçons que je n’ai pas su retenir ? Il n’est pas trop tard. Tu es dans le coma mais tu n’es pas encore mort !

17 Octobre : Tu ne peux pas m’aider parce que tu t’es corrompu et tu fais partie des « Kellon ya3ni kellon » !

14 Mars : Je te prie de ne pas faire l’amalgame entre ma tête malade – mon leadership – et mon cœur sain : mon peuple. Toi et moi, nous avons des traits communs, une base commune. J’ose même dire que nous nous ressemblons !

17 Octobre : Ah bon ? Nous nous ressemblons ? Vraiment ?

14 Mars : Bien sûr ! Nous partageons les mêmes principes et valeurs : souveraineté, liberté, laïcité, intégrité, État de droit, bonne gouvernance, justice, imputabilité… sauf que l’ordre de priorité diffère. Nous sommes frères ! Tu as repris le flambeau, mais de l’autre main !

17 Octobre : De grâce, ne me compare pas à toi ! Tu es le reflet de tes dirigeants ! Tu es responsable d’avoir élu et réélu ces irresponsables, de les avoir greffés comme une tumeur dans le corps de la patrie, de les avoir vissés à la tête de l’État, de les avoir laissés le vider de ses ressources, de sa substance, de sa dignité… Tu as laissé cette « tête malade », comme tu dis, fragmenter la patrie en partis qui se partagent la cagnotte. Tu as livré, par ta partisanerie aveugle, par ton panurgisme, par ton idolâtrie, la patrie à des partis communautaires tyranniquement tenus par des seigneurs de guerre ou des naufrageurs de paix.

Tu as renouvelé ta confiance à des élus qui n’ont pas su mettre à profit leur première victoire aux élections, qui se sont soumis au diktat des armes illégales par leur indéfectible syndrome de Stockholm. Tu as contribué, par tes mauvais choix, par ton mauvais vote, par ton attachement au « zaïm » communautaire, à mettre le pays, son économie, son environnement, son identité, son avenir en grand péril. Tu es aussi responsable que ces irresponsables ! 

14 Mars : Et j’en paye le prix amer, du fond de mon exil, du tréfonds de mon remords et du creux de mon lit de mort ! Et mon dernier vœu de mourant à mes partisans restants est qu’ils rejoignent tes rangs ! D’ailleurs, beaucoup de désabusés et de désillusionnés l’ont déjà fait ! Il y a pas mal de moi en toi… le bon moi… le moi pur, non confessionnel, non corrompu. Beaucoup de mes gens se sont ralliés à toi. Réveille-toi et va chercher les autres ! Laisse ma tête malade et va trouver mon cœur. Il continue à battre, même au ralenti, ici et là ! Et fais-toi une tête, une bonne, contrairement à la mienne, parce que tu n’en as pas, et c’est là le défaut béant de ta cuirasse. Tu as un grand cœur, mais tu es sans tête !

17 Octobre : Sans tête, moi ?

14 Mars : Pas au sens figuré, mais au sens propre ! Il faut une tête à ton mouvement ! Un directoire ! C’est l’absence de leadership qui te fait aller dans tous les sens de façon disparate et désordonnée, qui te rend perméable au noyautage et qui fait de toi la proie de l’hydre à plusieurs têtes, l’une plus pourrie que l’autre ! Et pour te doter de la bonne tête, inspire-toi non de mon esprit certes, mais de l’esprit de mes martyrs que mes dirigeants ont trahis : l’esprit de Rafic, de Gebran (Tuéni bien sûr, pas l’autre), de Samir, de Pierre, de Wissam… de tous les martyrs de la révolution du Cèdre et leurs prédécesseurs… jusqu’à l’esprit de Bachir qui a voulu mettre le holà à l’immense écurie où l’on survit.

17 Octobre : Pas mal vivace pour un mourant ! Tu me redonnes un peu de chaleur ! Il faut dire que j’ai été refroidi par la répression qui a fait, dans mon cas, plus de martyrs vivants que morts, outre les débordements dans mes rangs et, pour ma malchance, la pandémie, mais pourquoi faut-il que celle-ci ait une seconde vague et pas moi ?

14 Mars : Que les lames de ta seconde vague fassent rouler leurs têtes à tous sans exception !


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14 Mars : Puis-je savoir pourquoi tu t’es dégonflé ? Tu avais le vent en poupe ! 17 Octobre : C’est toi qui parles ? Tu as du culot ! 14 Mars : Je peux me le permettre, puisque j’ai tenu plus longtemps, plusieurs années, et j’ai un palmarès quand même plus chargé ! J’ai rassemblé des centaines de milliers de Libanais sur une longue période, envahi toutes les...

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