Rechercher
Rechercher

Société - Coronavirus

Non-respect du confinement dans certains quartiers populaires : « Si je ne travaille pas, je ne mange pas »

Pour de nombreux commerçants et travailleurs journaliers, l’arrêt des activités commerciales pour contrer le Covid-19 est impossible à concevoir, tant la situation économique est mauvaise.

Non-respect du confinement dans certains quartiers populaires : « Si je ne travaille pas, je ne mange pas »

Les déchets s’amoncellent en pleine rue dans le souk populaire de Sabra. Photos João Sousa

Dans un Liban qui sombre de plus en plus dans la pauvreté, il est extrêmement difficile, pour certains, de se conformer aux exigences sanitaires mises en place par les autorités pour endiguer la progression du Covid-19. Face au nouveau confinement imposé jusqu’à la fin du mois, il n’est pas question, dans certains quartiers populaires et pauvres du pays, de fermer les commerces pendant deux semaines. Car cela reviendrait, tout simplement, à ne plus avoir les moyens de nourrir sa famille.

Dans le souk populaire de Sabra, en banlieue de Beyrouth, les mesures liées au reconfinement, qui a débuté samedi dernier, ne semblent avoir aucunement impacté les activités quotidiennes. Sous un impossible enchevêtrement de câbles électriques et au milieu de piles d’ordures ménagères, les primeurs, les supérettes, les marchands à la sauvette, boulangers, mécaniciens, vendeurs de chaussures et de vêtements vaquent à leurs occupations habituelles comme si de rien n’était.

Lire aussi

« Que faut-il pour que les gens croient au Covid-19 ? »

« Si je ne travaille pas, je ne mange pas. C’est aussi simple que cela », soupire Mahmoud Fahham, 77 ans, vendeur de vêtements à Sabra. « Je ne suis pas convaincu par le confinement, ni par la menace du coronavirus. D’ailleurs, je n’utilise pas de masque », ajoute ce père de 11 enfants issus de deux mariages. Son aîné a 52 ans et les plus jeunes sont des triplés de 11 ans. « Hier, les FSI sont passés pour nous demander de fermer nos boutiques. Ils nous ont un peu brusqués. Ils ont jeté une partie de ma marchandise par terre », dénonce Mahmoud. Quand ce ne sont pas les FSI qui débarquent, ce sont les agents municipaux qui sillonnent ce quartier aux routes quasi impraticables, pour rappeler les commerçants à l’ordre. Dès que la nouvelle du passage d’une patrouille se répand, c’est la panique dans le souk, accompagnée du roulement assourdissant de dizaines de rideaux de fer promptement baissés. Une fois les agents passés, les magasins rouvrent. Certains ont d’ailleurs choisi de travailler avec leurs rideaux de fer à moitié baissés et font entrer leurs clients en catimini. « Les patrouilles sont un peu gênées quand elles constatent que je suis âgé, mais elles me disent que ce sont les ordres. Je leur dis que je fermerai lorsque j’aurais gagné de quoi m’acheter deux sacs de pain et deux paquets de cigarettes pour la journée », poursuit Mahmoud. Ce commerçant s’acquitte d’un loyer de 300 000 LL pour sa boutique, tandis que son appartement, situé à l’intérieur du camp de réfugiés de Sabra, lui coûte 600 000 LL. À cela s’ajoutent 120 000 LL de frais de générateur chaque mois, ce qui lui permet d’obtenir 3 ampères « pour pouvoir faire fonctionner le frigo ».


Aussitôt les patrouilles municipales parties, les commerçants rouvrent leurs boutiques à Sabra. Photo João Sousa


« Si j’avais de l’argent, je ne serais pas là »

Si les contrevenants craignent d’être verbalisés, à Sabra, personne ne semble avoir écopé pour l’instant d’une amende. D’ailleurs, qui pourrait payer une contravention dans ce quartier, qui compte parmi les plus miséreux du pays ? Les Forces de sécurité intérieure ont annoncé avoir dressé 7 430 procès-verbaux depuis samedi, pour des violations du confinement et du couvre-feu, sur l’ensemble du territoire.

Lire aussi

Les résultats du confinement ne se feront pas sentir avant mercredi, selon Hassan

« Si la patrouille vient, je ferme. Et je rouvre quand elle repart. Si on me dresse une amende, je ne la paierai certainement pas. Si j’avais de l’argent, je ne serais pas là », lance Ali, un Syrien de 17 ans qui gère une boutique de vêtements.

Abdallah, 38 ans, père de 5 enfants, continue de réparer des machines à laver et des frigos dans son échoppe, malgré la peur de voir la police débarquer à tout instant. « Je le fais en cachette, dans le dépôt. Ne me prenez surtout pas en photo, lance-t-il. Il faut que je gagne de l’argent. J’ai une famille à nourrir et des loyers à payer », explique-t-il.

À Bar Élias, dans la Békaa, comme à Sabra et ailleurs, beaucoup d’ouvriers journaliers et de petits commerçants peuvent difficilement interrompre leur activité, et contournent les directives gouvernementales parce que, disent-ils, ils doivent travailler pour subvenir aux besoins de leurs familles. Ziad, lui, a un petit café que ses clients aiment surtout pour sa table de billard. « Je ne peux pas fermer boutique parce que les temps sont durs et que je dois nourrir ma famille », confie-t-il à notre correspondante Sarah Abdallah.

De son côté, Mohammad, mécanicien, réussit à déjouer la vigilance des autorités en introduisant l’une après l’autre les voitures de ses clients en douce dans son garage, avant de refermer la porte. « Si j’appliquais les directives officielles à la lettre, je ne pourrais pas payer le loyer de mon garage et ne pourrais pas, par conséquent, subvenir aux besoins de mes proches », lance-t-il. La petite boutique d’habillement de Khaled constitue sa seule source de revenus, et il y applique à la lettre les gestes barrières… tout en refusant de baisser le rideau. « J’attends le moindre client pour écouler ma marchandise, dit-il à L’OLJ. Je ne peux pas me permettre de rester oisif durant deux semaines. Si je ne génère pas de revenus quotidiennement, je ne peux pas gagner ma vie. » Révolté, Khaled fait valoir que les grands supermarchés, eux, sont ouverts, et que les clients s’y entassent sans aucune précaution. « Seuls les petits commerces sont pénalisés », déplore-t-il.


Mahmoud Fahham, 77 ans, se dit incapable de se conformer au confinement, en raison de la situation économique du pays.


Colère des commerçants

À Tripoli, les commerçants du vieux souk ont laissé éclater leur colère hier, estimant que fermer leurs boutiques « les mènera à la faillite ». Pour faire entendre leur colère vis-à-vis du bouclage, ces commerçants ont tenu un sit-in qui a été marqué par des tensions avec les militaires déployés sur les lieux. Hormis ces tensions dans le souk de Tripoli, sur le terrain, le respect des mesures de bouclage restait relativement élevé, notamment sur les artères principales de la ville.

À Saïda, la circulation était plus dense que les deux derniers jours, en raison de la réouverture de certains établissements bancaires et du sérail de la ville, précise notre correspondant sur place Mountasser Abdallah. Dans cette grande ville du Sud, le port du masque était également peu respecté, tout comme la circulation alternée, et certains commerces éloignés du centre-ville ont ouvert leurs portes en violation du confinement.

Dans la banlieue sud de Beyrouth, la circulation était dense et la circulation alternée peu respectée. En revanche, les commerces se sont conformés aux mesures de confinement. Seuls les supermarchés, les primeurs, les restaurants et snacks, les stations-service et les sociétés de transfert d’argent étaient ouverts. Les FSI patrouillaient en permanence sur les grandes artères, selon les commerçants sur place.


Dans un Liban qui sombre de plus en plus dans la pauvreté, il est extrêmement difficile, pour certains, de se conformer aux exigences sanitaires mises en place par les autorités pour endiguer la progression du Covid-19. Face au nouveau confinement imposé jusqu’à la fin du mois, il n’est pas question, dans certains quartiers populaires et pauvres du pays, de fermer les commerces pendant...

commentaires (4)

Grâce à cette clique de corrompus et de vendus les libanais sont humiliés et appauvris un peu plus tous les jours. Dans les pays qui se respectent le chômage partiel est payé par l’état pour aider les citoyens et surtout les plus démunis à garder leur dignité et se confiner en sachant que leur pain et leurs besoins vitaux sont assurés par l’état, d’où le succès du confinement. Au Liban le nombre des gens atteints par le virus a presque doublé depuis une semaine alors que ça devrait au moins se stabiliser. Les libanais se retrouvent devant deux choix cruciaux, soit mourir de faim pour sûr, soit mourir éventuellement du virus ils préfèrent prendre un moindre risque. CQFD

Sissi zayyat

11 h 30, le 19 novembre 2020

Tous les commentaires

Commentaires (4)

  • Grâce à cette clique de corrompus et de vendus les libanais sont humiliés et appauvris un peu plus tous les jours. Dans les pays qui se respectent le chômage partiel est payé par l’état pour aider les citoyens et surtout les plus démunis à garder leur dignité et se confiner en sachant que leur pain et leurs besoins vitaux sont assurés par l’état, d’où le succès du confinement. Au Liban le nombre des gens atteints par le virus a presque doublé depuis une semaine alors que ça devrait au moins se stabiliser. Les libanais se retrouvent devant deux choix cruciaux, soit mourir de faim pour sûr, soit mourir éventuellement du virus ils préfèrent prendre un moindre risque. CQFD

    Sissi zayyat

    11 h 30, le 19 novembre 2020

  • Ce sont dans mon opinion des mesures qui ne sont pas realistes ... il faut accepter un certain risque. En plus il ne faut pas avoir peur des souks. Ca serait mieux si les policitiens et le gouvernement faisait quelque chose pour encourager les gens a utiliser et faire les achats dans les souks traditionnels au lieu d'essayer d'interdire ces echoppes.

    Stes David

    13 h 31, le 17 novembre 2020

  • LES CLIQUES DES CORROMPUS ET VOLEURS DE LA GROTTE ETOILEE D,ALIBABA LE GOUPIL ET DE CELLE DES GOUVERNEMENTS CAPORALIENS QUI SE SONT SUCCEDES LES QUATRE DERNIERES ANNEES AVEC LES MERCENAIRES AUSSI ONT TRANSFORME LE PEUPLE LIBANAIS EN UN PEUPLE DE MISERABLES. ET LES CHRETIENS SURTOUT MAIS ET TOUS LES LIBANAIS EN UN PEUPLE D,EMIGRES. SOULEVE-TOI PEUPLE LIBANAIS ET DERACINE LE VERT ET LE PETRIDE POUR UN VRAI CHANGEMENT.

    LA LIBRE EXPRESSION

    11 h 47, le 17 novembre 2020

  • On dirait l'Inde.....

    Eleni Caridopoulou

    10 h 59, le 17 novembre 2020

Retour en haut