Le président Michel Aoun a réitéré hier son attachement à l’initiative française visant à sortir le Liban du marasme politique et économique, dans le cadre d’une rencontre avec Patrick Durel, conseiller du président français Emmanuel Macron pour les affaires de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient. Il a toutefois affirmé que les sanctions américaines ont compliqué la tâche du Premier ministre désigné.
La visite du diplomate s’inscrit dans le prolongement de l’initiative française qui vise à aider le Liban à sortir de sa crise économique et financière, alors que les tractations gouvernementales menées par le Premier ministre désigné Saad Hariri s’enlisent (lire par ailleurs). C’est donc principalement pour remettre sérieusement sur le tapis l’initiative portée par Emmanuel Macron que l’émissaire français est à Beyrouth. Ce déplacement revêt une importance au vu de son timing. Il intervient peu après la fin de l’élection présidentielle américaine, remportée par le démocrate Joe Biden, et avant la réunion du Groupe international de soutien humanitaire au Liban, prévue fin novembre, afin de mobiliser une fois de plus la communauté internationale en faveur du pays du Cèdre, notamment sur le plan financier. Sans vouloir trancher sur le point de savoir si cette réunion risque d’être reportée sine die en cas d’échec à former le prochain cabinet, une source diplomatique se contente de faire valoir que « la conférence serait principalement axée sur l’aide humanitaire aux ONG parce qu’il est difficile de s’engager politiquement avec un pays sans gouvernement ». Selon des sources citées par notre correspondante Hoda Chédid, la tenue de la conférence sera tributaire de la formation du nouveau gouvernement.
Crise délicate et dangereuse
Lors de son entretien avec le président Aoun au palais de Baabda, par lequel il a entamé sa tournée, M. Durel a appelé, selon la présidence libanaise, à « hâter la formation d’un gouvernement compétent et accepté par toutes les parties afin qu’il puisse mener les réformes requises pour regagner la confiance de la communauté internationale ». Selon ce communiqué, l’émissaire français a constaté que la crise économique au Liban était « délicate et dangereuse ». Il a ensuite insisté sur la « nécessité de hâter la formation d’un gouvernement compétent et accepté par toutes les parties afin qu’il puisse mener les réformes requises pour regagner la confiance de la communauté internationale ». Toujours selon Baabda, M. Durel a indiqué que la France « allait continuer à octroyer des aides urgentes sur plusieurs plans, notamment pour le secteur éducatif », rappelant que « l’engagement de la communauté internationale envers le Liban est conditionné à la mise en place de réformes ».
Pour sa part, Michel Aoun a affirmé à Patrick Durel que « le Liban est attaché à l’initiative française car elle est dans l’intérêt du pays. Cela ne peut se traduire qu’à travers un gouvernement digne de confiance et capable de mener les réformes nécessaires qui figurent dans la feuille de route, laquelle a fait l’objet d’un accord entre le président Macron et les forces politiques libanaises ».
« Les sanctions américaines qui ont ciblé des politiques libanais ont également compliqué la donne », a en outre estimé M. Aoun, en allusion aux sanctions imposées par Washington à son gendre, le député Gebran Bassil, en insistant sur la nécessité de « mener des tractations nationales élargies durant cette période délicate ».
L’audit de la BDL
Sur le plan financier, le président Aoun a reconnu que l’audit juricomptable des comptes de la Banque du Liban, pointée du doigt pour sa responsabilité dans cette crise, faisait face à « de nombreux obstacles ». « Mais face à cela, nous sommes très déterminés à aboutir, et c’est pourquoi un délai de trois mois a été accordé pour que le cabinet Alvarez & Marsal puisse effectuer sa mission », a rappelé le chef de l’État.
L’audit de la BDL occupe pourtant une position importante dans la liste des réformes urgentes que le Liban doit lancer pour prétendre à une aide financière internationale. Il s’agit aussi d’un pilier de la feuille de route française.
Tournée auprès des chefs de file
M. Durel s’est par la suite rendu à Aïn el-Tiné où il a rencontré le président du Parlement Nabih Berry. Ce dernier a fait état d’un « bon » entretien. Le chef du législatif a estimé que « la seule voie pour le sauvetage du Liban passe par la formation d’un gouvernement dès aujourd’hui, formé d’experts jouissant d’une confiance ». Il a fait part lui aussi de son attachement à l’initiative française, selon les médias locaux.Patrick Durel s’est également entretenu avec le Premier ministre désigné Saad Hariri à la Maison du Centre. Par contre, il a fait l’impasse hier sur le Premier ministre sortant Hassane Diab.
L’émissaire français, qui s’envole aujourd’hui pour Paris, a en outre entamé une tournée auprès des chefs des principaux partis politiques, dont Walid Joumblatt et le chef du groupe parlementaire du Hezbollah Mohammad Raad.
Pourquoi pas de gouvernement ? Est-ce possible de tourner en rond indéfiniment ? Pourquoi ce silence criminel ? Depuis bien avant son accession à la présidence, il semble que c'est un amateur avide du vide. C'est tellement triste.
14 h 40, le 13 novembre 2020