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Nos Lecteurs ont la Parole

En route vers la prochaine République

Une nouvelle donne géopolitique semble se profiler dans le pourtour oriental de la Méditerranée et y annoncer un potentiel de grands changements. Le bras de fer engage des puissances régionales et mondiales, mais il y a fort à parier que, dans la foulée, le Liban en aura sa part, bon gré, mal gré. Pour être réalistes, reconnaissons que l’enjeu dépasse le poids du Liban dans la balance moyen-orientale. En effet, aujourd’hui, le pays est en difficulté, et il est donc plus vulnérable aux transbordements régionaux ; mais même s’il ne l’était pas, les remous autour de lui l’auraient vraisemblablement impacté. Nous en avons déjà eu la preuve avec l’afflux de réfugiés depuis 1948 et plus récemment encore, suivi des conséquences qui se sont multipliées au fil des ans. En 1958, nous avons également vécu l’expérience du conflit entre le nassérisme et le pacte de Bagdad dont les comptes ont été réglés en partie au Liban. L’astuce serait par conséquent de faire en sorte que le pays du Cèdre participe lui-même à l’initiative concernant sa part des choses au lieu d’être contraint de prendre acte d’une nouvelle donne mal distribuée. Le président Fouad Chéhab avait parfaitement compris cette règle du jeu : grosso modo, le Liban ne s’opposait pas à l’Égypte dans les relations que le président Chamoun avait bâties outre-mer, et, en contrepartie, Nasser ne s’occupait pas de sa « cuisine interne ».

Si donc le Liban n’a pas d’envergure lui permettant de renverser les vapeurs des alentours, il peut en revanche se concentrer exclusivement sur sa copie, surtout avec la perche que lui tend aujourd’hui la France; cette même France qui lui avait jadis donné les moyens de faire valoir ses droits. Il doit donc travailler cette copie de manière à sécuriser la pérennité des dispositions-clés de la Constitution en vigueur élaborées par ses aînés, entre autres, I) qu’il est une patrie définitive pour tous ses fils, II) liberté d’opinion, d’expression et de culte, III) rejet de toute forme d’implantation, IV) pacte de vie en commun, V) rejet de toute forme de partition, VI) liberté de l’enseignement et de l’économie (Constitution actuelle : préambule, et articles 2, 9, 10 et 13). Ce sont là des constantes qui ont contribué à forger l’esprit de la Constitution conformément à l’identité de la nation ; et les retombées internes de ce qui se passe autour de nous ne devraient en aucune façon altérer ces constantes. À ce titre, force est de signaler que la politique de « neutralité active », plaidée par le cardinal Béchara Raï comme « garantie de l’unité, de la stabilité et de la souveraineté du pays », ne ferait que renforcer cet esprit de la Constitution malgré l’absence du terme dans la lettre (voir son « Mémorandum sur le Liban et la neutralité active », Dimane, le 7 août 2020) ; ce serait d’ailleurs l’occasion d’y insérer explicitement ce concept de neutralité.

Il faut aussi admettre que, l’idéal étant souvent loin du possible, la laïcité n’est pas un substitut à la bonne entente interconfessionnelle. Nous l’avons déjà constaté dans plusieurs régions du globe et maintes fois rappelé, exemples à l’appui (Caucase, ex-Yougoslavie, Chypre, etc. : voir notre article intitulé « Libérons le confessionnalisme de sa captivité », L’OLJ 19 août 2020, p. 11).

Sans cette bonne entente, l’objectif même de la laïcité ne peut être atteint en dépit du fait qu’elle aura été instaurée. Cette idée du « laïc », en vogue actuellement, ne saurait donc être dogmatiquement postulée comme réponse à un besoin de rapprochement intercommunautaire ou, à défaut de rapprochement, à une volonté bien arrêtée de réduire l’impact communautaire sur la chose publique. Les expériences précitées ont montré que la laïcité, dépourvue de bonne entente, est loin de pouvoir produire ses effets et d’être le meilleur moyen de faire vivre ensemble des communautés qui divergent sur certains préceptes de foi ou qui ont des disparités d’ordre socioreligieux. Il y a bien eu des divisions et des répercussions irréversibles dans lesdits pays. Inversement, si l’entente existe, le besoin de laïcité en est spontanément réduit. Le paradoxe est que plus les soudures intercommunautaires sont solides, moins l’effet escompté de la laïcité est pressant et plus elle est facile à instaurer ; par contre, plus les soudures intercommunautaires sont fragiles, plus le besoin de bonne entente est prioritaire à une laïcité qui ne naîtra que par « césarienne ». Le maître mot est donc la bonne entente.

L’essence même de cette bonne entente nous oriente naturellement vers la représentativité électorale et le mode de scrutin. Car la bonne entente entraîne avec elle un vœu de ne pas effacer le prochain ; et les Libanais, toutes confessions confondues, ont déjà fait ce choix volontaire de vivre ensemble, et ce malgré les périodes troubles traversées par le pays. Ceci est inscrit dans plusieurs chapitres de l’histoire du Liban. Il est donc primordial de faire attention à toute forme de marginalisation et à toute disposition qui risquerait de noyer les minorités dans les masses. C’est la raison pour laquelle, dans les cas de sociétés pluricommunautaires, la logique est de restreindre la circonscription électorale pour garantir l’authenticité de la représentation (une idée soutenue par le regretté cardinal Nasrallah Sfeir). Autrement, les voix des minorités n’auraient plus qu’un effet de surface qui n’atteindra jamais le fond des choses en matière de répartition des responsabilités et de contribution effective au processus de décision et de gestion des affaires du pays. De surcroît, ces voix minoritaires auraient indirectement servi à légaliser l’inadéquation du résultat quant au fait de donner une image fidèle du tissu sociopolitique du pays.

Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour. Merci de limiter vos textes à un millier de mots ou environ 6 000 caractères, espace compris.

Une nouvelle donne géopolitique semble se profiler dans le pourtour oriental de la Méditerranée et y annoncer un potentiel de grands changements. Le bras de fer engage des puissances régionales et mondiales, mais il y a fort à parier que, dans la foulée, le Liban en aura sa part, bon gré, mal gré. Pour être réalistes, reconnaissons que l’enjeu dépasse le poids du Liban dans la...

commentaires (1)

toujours cette meme question, toujours aucune reponse ! qui et qu'est ce qui provoquerait le changement salutaire dans les textes? qui et qu'est ce qui insufflerait aux citoyens libanais le besoin de changer, celui de ne plus aduler ces "zaims" impotents, mafieux ? car sans cela, sans ces personnes miracles rien ne changera sous le ciel libanais . il ne suffira pas a m.macron de s'imposer,loin de la ! la route est immensement longue et le tunnel extrement long et sombre

Gaby SIOUFI

12 h 59, le 14 septembre 2020

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Commentaires (1)

  • toujours cette meme question, toujours aucune reponse ! qui et qu'est ce qui provoquerait le changement salutaire dans les textes? qui et qu'est ce qui insufflerait aux citoyens libanais le besoin de changer, celui de ne plus aduler ces "zaims" impotents, mafieux ? car sans cela, sans ces personnes miracles rien ne changera sous le ciel libanais . il ne suffira pas a m.macron de s'imposer,loin de la ! la route est immensement longue et le tunnel extrement long et sombre

    Gaby SIOUFI

    12 h 59, le 14 septembre 2020

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