Le ministre libanais des Finances, Ghazi Wazni, a affirmé dans un entretien publié aujourd'hui par le Financial Times que les discussions entre le gouvernement et le Fonds monétaire international (FMI) concernant les termes d’un éventuel programme d’assistance pour soutenir le pays qui traverse une grave crise économique et financière, avaient été « constructives » jusqu’ici et constituaient « un premier pas positif ».
Le ministre a néanmoins estimé que les négociations à venir ne seront pas simples. « Il y a beaucoup de différences entre notre point de vue et celui du FMI », a-t-il concédé, évoquant par exemple le fait que l’organisation internationale serait en faveur d’une hausse généralisée de la TVA, alors que le gouvernement voudrait la limiter aux produits de luxe. « Nous ne voulons pas prendre de mesures qui augmentent la souffrance de la population » a encore souligné Ghazi Wazni, un message qu’il a répété à plusieurs reprises ces dernières semaines.
Fragilisé par des années de mauvaise gestion et d’instabilité politico-sécuritaire locale et régionale, le Liban s’est engouffré courant 2019 dans la pire crise depuis la fin de la guerre civile (1990). Une situation qui a conduit les autorités à faire défaut sur l’échéance d’eurobonds (titre de dette en dollars) du 9 mars pour négocier une restructuration de sa dette publique avec ses créanciers, une première dans l’histoire du pays. Courant février, une délégation du FMI s’est rendue au Liban à la demande des autorités pour établir un premier diagnostic en amont. Le gouvernement prépare un plan de redressement qui devrait être prêt dans les prochaines semaines et dont le contenu sera décisif pour la suite des négociations avec les créanciers. Le pays est enfin quasiment à l’arrêt depuis le début de la semaine, en raison de l’état d’urgence sanitaire décrété par les autorités pour contrer la propagation de la pandémie du nouveau coronavirus (Covid-19).
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Divergence sur la TVA
Pour l’heure, le gouvernement n’a toujours pas officiellement sollicité un programme d’aide du FMI. Initialement opposé à toute intervention de l'organisation, le Hezbollah a récemment assoupli sa position en affirmant consentir à toute aide internationale, pourvu qu’elle ne soit pas couplée à des conditions rédhibitoires qui iraient à l’encontre des « intérêts nationaux », selon les propos du secrétaire général du parti chiite, Hassan Nasrallah.
Le point d’achoppement entre les autorités libanaises et le FMI évoqué par le ministre des Finances (qui appartient au mouvement Amal, l’autre principale formation chiite du pays) concernant la TVA ne devrait pas convaincre tous les experts qui observent la situation. Dans une interview à L’Orient-Le Jour, l’économiste en chef pour la zone Mena de l’institut de la finance internationale, Garbis Iradian, avait jugé peu probable que l’organisation recommande d’augmenter la TVA à un moment où le PIB libanais se contracte, pour éviter de fragiliser davantage la situation économique du pays, déjà précaire.
(Lire aussi : Haircut sur les dépôts : les trois alternatives envisagées par le gouvernement)
Dans son entretien au FT, le ministre des Finances est enfin revenu sur les alternatives envisagées pour éviter qu’une opération de restructuration de la dette passe par un haircut (une coupe) sur les dépôts bancaires, un point qu’il avait déjà évoqué lors de l’entretien accordé il y a deux semaines à la chaîne LBCI – et sur lequel L’Orient-Le Jour était revenu en détail mardi dernier.
L’une des pistes consiste à proposer aux grands déposants de geler une partie de leurs dépôts pour une durée déterminée allant de cinq à six ans. Une option que le ministre a précisée dans le FT, en indiquant que cette mesure, si elle était adoptée, pourrait être limitée aux dépôts en dollars pour une durée de six ans et que les déposants concernés pourront retirer à l’issue de la période en livres libanaises (sans préciser à quel taux). Ghazi Wazni a également évoqué l’alternative consistant à proposer aux déposants de convertir une partie de leurs dépôts en prise de participation (actions) dans les banques où ils avaient initialement placé ces dépôts. La troisième alternative, sur laquelle le FT n’est pas revenu, serait de leur proposer une prise de participation dans un fonds, qui serait créé ultérieurement, et qui regrouperait l’ensemble des actifs de l’État (entreprises publiques ou semi-publiques génératrices de revenus).
Toutefois, sur Twitter, le ministre des Finances a "démenti avoir dit ce qui a été mentionné dans le titre de l'article du Financial Times au sujet des droits des déposants et de leurs avoirs" et "insisté que sa politique porte sur la préservation de ces avoirs, en les considérant comme un droit sacré pour leurs propriétaires".
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commentaires (8)
Le casse du siècle !!! Le mot d’ordre de nos autorités financières pas trop regardantes sur l’honnêteté et la rectitude semble le suivant : Chers épargnants et autres gogos naïfs, Déposez toutes vos économies en dollars dans votre agence bancaire, non seulement nous vous les confisquerons en cours de route, non seulement nous vous empêcherons d’accéder aux économies de toute une vie, non seulement nous vous humilierons comme jamais vous ne l’avez été, mais, au final et quand nous vous aurons privé de vos ressources et après que nous vous les aurions bloqué pendant cinq ou six ans, nous vous les rendrons en .... livres libanaises. En monnaie de singe(s) , quoi !!!! Quelle honte !!!
DC
19 h 53, le 20 mars 2020