Vingt-quatre heures après des échauffourées entre un groupe de manifestants et des proches du député Ziad Assouad, membre du Courant patriotique libre (aouniste), un nouvel incident a éclaté entre des partisans de ce dernier et des protestataires à Maameltein, dans le Kesrouan mercredi soir.
Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), le député membre de la formation fondée par le chef de l’État, Michel Aoun, dînait dans le restaurant al-Jazira, à Maameltein, lorsque des manifestants hostiles à la classe politique au pouvoir se sont rassemblés dans le parking de l'établissement pour le conspuer. "Les soldats et les agents des Forces de sécurité intérieure sont intervenus afin de disperser les deux groupes et mettre un terme à l'incident", précise l'agence.
(Lire aussi : Ziad Assouad menace de mettre au pas « toute personne qui osera s’en prendre » à lui)
"C'est le Kesrouan ici, espèce d'animal"
Selon une vidéo circulant largement sur les réseaux sociaux depuis hier soir, on voit un jeune manifestant, isolé et apeuré, pris à partie par un groupe d'individus, vraisemblablement des partisans de Ziad Assouad, dans un parking, probablement à l'entrée du restaurant.
"Qui t'a envoyé ici ?", lui demande l'un des hommes. Ce à quoi répond le jeune homme : "Je vous jure que je suis ici pour...", avant d'être interrompu par un flot d'insultes de la part de son interlocuteur. "Tu viens de Tripoli ?", lui demande son interlocuteur. Le jeune manifestant reçoit ensuite un coup de pied, et répond "Oui", avant de recevoir un coup de poing dans la mâchoire. La scène est filmée par l'un des éléments du groupe agresseur. "Que viens-tu faire ici ? Tu es originaire de Tripoli, non ?", lui lance l'individu. La victime, qui s'effondre en pleurs et tente de calmer la situation, se protège alors le visage. "C'est le Kesrouan ici, espèce d'animal", l'insulte alors son assaillant qui a été interpellé jeudi soir.
مشرف جداَ الكلام المناطقي الطائفي وانكن تستقووا على شب لبناني من طرابلس عم بيطالب بحقوقه. لا كسروان ولا أيا منطقة ملك فئة وحدي من الناس. ارحموا الناس بقا pic.twitter.com/IWsP6ZXg8T
— joemaalouf جو معلوف (@joemaalouftv) February 5, 2020
"Les propos sectaires et communautaires sont édifiants. Vous vous en prenez à un jeune homme de Tripoli qui réclame ses droits. Ni le Kesrouan, ni aucune région n'appartient à une quelconque catégorie de personnes. Ayez pitié des gens enfin !", s'insurge le journaliste Joe Maalouf sur Twitter.
"Informations douteuses"
"Avant de lancer des mensonges et des rumeurs dans les médias, trois voitures sont venues là où je me trouvais. L'un de mes gardes du corps a été renversé et blessé, et les agresseurs ont pris la fuite. On a ensuite tenté d'entrer par la force dans les lieux (le restaurant, ndlr) en étant armé d'un pistolet qui a été confisqué et remis au commissariat de Ghazir. Il s'est avéré que l'arme était semi-factice. Le question n'est pas d'ordre confessionnelle. Il s'agit plutôt d'une prise en chasse et d'une agression. (Il s'agit de savoir) qui a cherché l'autre et qui l'a agressé. Vos informations sont douteuses", a réagi Ziad Assouad, sur Twitter, en réponse à ses détracteurs.
Cette agression a indigné de nombreux internautes et responsables et suscité la colère dans les milieux contestataires à Tripoli. C'est ainsi qu'un groupe de manifestants se sont rassemblés vers 1h du matin sur la place al-Nour, haut lieu de la contestation dans la ville, afin de protester contre l'incident du Kesrouan. Des routes ont été brièvement coupées dans la région. Une permanence du CPL a également été saccagée et brûlée à Halba, dans le Akkar.
Une permanence du CPL incendiée dans le Akkar, dans la nuit du 5 au 6 février. Capture d'écran/ANI
La section du Akkar au sein du CPL a condamné l'attaque contre sa permanence et a estimé que "de tels actes condamnables ne reflètent pas les valeurs des habitants du Akkar" et a appelé à "ne pas se laisser aller à l'affrontement entre les habitants d'une même région et d'un même pays". La section du CPL a également reproché aux forces de l'ordre de "n'avoir pas agi alors qu'elles se trouvaient sur les lieux".
Quelques heures après l'incident, le comité central des médias au sein du CPL avait réagi à l'incident de Maameltein dans un communiqué dans lequel il apporte son soutien à Ziad Assouad. Il a condamné "les atteintes aux libertés individuelles dans les espaces publics et privés", estimant que "ces méthodes ne servent pas les demandes justes des contestataires". "S'en prendre aux responsables politiques, à leur vie et leur dignité est inacceptable et provoque des réactions spontanées de la part de leurs partisans (...)", poursuit le CPL.
Note d'information judiciaire
L'incident de mercredi soir rappelle celui qui avait éclaté mardi, dans des circonstances similaires. Ce soir-là, des échauffourées ont opposé une quinzaine de contestataires qui appelaient Ziad Assouad, installé dans un restaurant d'Antélias, à quitter les lieux. Les gardes du corps du parlementaire, ainsi que des partisans du CPL, ont alors attaqué les manifestants à l'aide de bâtons, faisant plusieurs blessés. Certains militants aounistes étaient armés, selon plusieurs témoignages.
Ces dernières semaines, plusieurs responsables politiques ont été forcés de quitter des restaurants et lieux publics, sous les huées de contestataires. L'ancien ministre Youssef Fenianos avait dû se retirer du centre commercial de luxe Aïshti à Dbayé, et le vice-président de la Chambre Élie Ferzli avait mis fin à un dîner dans un restaurant de Gemmayzé à Beyrouth. L'ancien Premier ministre Fouad Siniora avait pour sa part été contraint de quitter l'Assembly Hall de l'AUB, où se tenait un concert, sous les huées des spectateurs.
Mercredi soir, c'est l'ancien ministre de l’Économie Raëd Khoury qui a été interpellé par quelques manifestants en colère, dans un bar de Beyrouth. Réagissant à cet incident, Raëd Khoury a écrit sur Twitter : "A ceux qui ont refusé de m'écouter hier soir, ceux qui m'ont accusé de participer à la corruption (...), je leur rafraîchis la mémoire en leur rappelant que depuis 2017, nous nous sommes soulevés contre la corruption et avons mis en garde contre la dangerosité de la situation financière". Il a accompagné ce message, repris trois fois, de différentes vidéos regroupant des extraits de ses discours au sujet de la crise financière du pays qui durant ces dernières années.
Lire aussi
« Et le Liban est mon unique allégeance », le billet de Fifi Abou Dib
La mémoire aux oubliettes, le billet de Fady Noun
commentaires (13)
Quand ce député promet de mettre au pas tout le monde qui s'en prend à lui, pense t il réagir personnellement ou promet il d'envoyer ses" sbires" gonflés à la testostérone qui ignorent que Tripoli fait partie intégrante du Liban et qu'à ce jour on ne réclame pas un visa pour le keserwan.. et on ne tient pas des propos séditieux et insurrectionnels.
C…
14 h 52, le 06 février 2020