Pour Kulluna Irada, « il n’est pas judicieux de procéder au paiement des eurobonds à leur prix d’émission, alors qu’ils s’échangent déjà à 40-50 % de moins que leur valeur initiale sur le marché secondaire ». Capture d'écran
L’organisation civile Kulluna Irada a appelé dans une note publiée le 4 février le gouvernement libanais à « procéder à un défaut organisé » sur sa dette en dollars, en vue « d’honorer ses engagements envers le peuple libanais » et non envers « quelques banques et investisseurs ».
« Des déclarations officielles semblent confirmer qu’une décision politique a été prise à haut niveau pour éviter à n’importe quel prix un défaut souverain, en assurant le remboursement des (eurobonds) arrivant à maturité en mars, et qui s’élèvent à 1,2 milliard de dollars », écrit l’organisation. Or en faisant un tel choix, « les autorités comptent une nouvelle fois donner la priorité aux détenteurs des titres de dette par rapport aux besoins économiques et sociaux du pays », car un tel remboursement « amenuiserait davantage les réserves en devises du pays au moment où celui-ci en a besoin pour couvrir les besoins primordiaux de la population ».
Pour Kulluna Irada, « être en défaut de paiement n’est pas une question de fierté nationale ». D’autant plus « qu’il n’est pas judicieux de procéder au paiement des eurobonds à leur prix d’émission, alors qu’ils s’échangent déjà à 40-50 % de moins que leur valeur initiale sur le marché secondaire. Ce serait privilégier les intérêts de quelques banques et investisseurs ».
L’organisation appelle donc le gouvernement « à honorer ses responsabilités envers le peuple libanais en procédant immédiatement à un défaut organisé, en se basant sur la négociation d’un plan de restructuration de la dette. Ce plan de restructuration de la dette devra lui-même faire partie d’un plan macroéconomique-budgétaire-financier-bancaire global et crédible qui permettra au pays de recueillir le soutien financier international dont il a besoin et de regagner la confiance du peuple ».
« Après des années de politiques vouées à l’échec ayant mené le pays à la crise actuelle et de plusieurs mois de contrôle de capitaux illégal et arbitraire, (...) des décisions courageuses et équitables doivent être prises afin de permettre une distribution juste des pertes qui épargnerait les petits déposants », recommande Kulluna Irada.
Elle met en garde contre une transformation de la crise socio-économique rampante en une crise humanitaire, qui n’est « qu’une question de temps ». Des centaines d’entreprises mettent la clé sous la porte, des dizaines de milliers de personnes perdent leurs emplois, tandis que d’autres voient leurs salaires ponctionnés. Avec une inflation et une pauvreté galopantes, une crise sanitaire et alimentaire est à craindre. Plus de la moitié de la population libanaise risque de se retrouver sous le seuil de pauvreté cette année selon la Banque mondiale. Les hôpitaux font face à de sérieuses pénuries en équipements médicaux. Human Rights Watch a mis en garde contre la menace d’une impossibilité à fournir services médicaux les plus basiques voire même les services médicaux d’urgence.
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18 h 22, le 05 février 2020