Le gouverneur de la Banque du Liban, Riad Salamé. Photo d’archives Reuters
La situation du secteur bancaire libanais, depuis l’été dernier, alimente l’inquiétude des clients, pris de court par les mesures de contrôle de capitaux informelles et temporaires mises en place par le secteur face à la forte détérioration de la situation économique et financière du pays. Une inquiétude que la formation d’un nouveau gouvernement mardi dernier, environ trois mois après la démission du précédent dans le sillage du début du mouvement de contestation populaire contre la classe politique, n’a pas réussi à calmer, la question de la sécurité des dépôts bancaires alimentant tous les jours le débat public.
Durant le week-end écoulé, la question a été au centre d’un échange sur Twitter entre le puissant homme d’affaires émirati Khalaf Ahmad al-Habtoor et le gouverneur de la Banque du Liban (BDL) Riad Salamé. Le président du conglomérat al-Habtoor, qui possède d’importants investissements et dépôts au Liban (notamment dans le secteur hôtelier), a en effet demandé au patron de la Banque centrale des assurances concernant les fonds déposés par les non-résidents dans le pays.
« C’est une question très simple (…) Nous, investisseurs arabes et étrangers, avons des centaines de millions de dollars au Liban. Ces investissements et ces fonds en dollars sont-ils exposés (à quelque danger que ce soit) ? » a notamment demandé l’homme d’affaires dans une vidéo publiée sur son compte Twitter. Il a également évoqué « les nombreux experts et analystes » qui évoquent dans les médias la possibilité qu’un « haircut » (une ponction) sur les dépôts enregistrés dans les banques libanaises soit effectué pour éviter une faillite des banques et de l’État, jugeant cette perspective « effrayante ». « Ce serait une catastrophe. Je demande au gouverneur de la BDL de répondre », a encore insisté Khalaf Ahmad al-Habtoor.
Ce n’est pas la première fois que l’homme d’affaires interpelle les autorités libanaises. En 2016, le milliardaire s’était par exemple insurgé contre « la domination de l’Iran » au Liban, dans une tribune publiée sur le site de la chaîne panarabe al-Arabiya. En 2007, il s’était insurgé, lors d’une conférence de presse organisée à l’Aéroport international de Beyrouth, contre l’incurie de l’État libanais qui avait miné à l’époque déjà la confiance des investisseurs étrangers.
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Restrictions et taux de change
Selon les derniers chiffres disponibles, les dépôts des non-résidents – en livres et en dollars – ont atteint 33,2 milliards de dollars à fin novembre 2019, soit un peu plus de 20 % du total de 162,6 milliards de dollars (pour un taux de dollarisation de 74,7 %). Les inquiétudes de ces déposants sont plus particulièrement liées aux restrictions sur les retraits d’espèces en dollars et les transferts vers l’étranger. Aucun texte ou décision n’a pour l’instant légitimé ces mesures, ce qui a poussé certains déposants s’étant vu refuser l’exécution d’opérations de retrait ou de transfert à assigner leur banque en justice. Les procédures lancées n’ont pour l’instant pas abouti à des décisions sur le fond. Les restrictions sur la circulation du dollar ont, de plus, provoqué une hausse du taux livre/dollar dans les bureaux de change où il se négocie au-dessus de 2 000 livres depuis plusieurs mois, alors que la parité fixe de 1 507,5 livres est maintenue pour les transactions bancaires (avec une marge de 10 à 15 livres). La situation a marginalement évolué après la décision prise mardi dernier par le syndicat des bureaux de change suite à une réunion avec la BDL de plafonner à 2 000 livres le taux de change du dollar afin de limiter son inflation. Une mesure que les changeurs ne sont toutefois pas certains de continuer d’appliquer si le secteur bancaire ne desserre pas rapidement la circulation du billet vert sur le marché local.
L’hypothèse d’une ponction sur les dépôts a, elle, été largement alimentée par les interventions de plusieurs experts, principalement des banquiers et économistes. Certains d’entre eux ont d’ailleurs considéré que le fait qu’une banque puisse obliger un client à accepter de retirer en livres et au taux fixe dans les circonstances actuelles des fonds sur un dépôt en dollars pouvait s’apparenter à une ponction indirecte.
Réponse « maladroite » sur le « haircut » ?
Dans ce contexte, le gouverneur a rapidement répondu à Khalaf Ahmad al-Habtoor sur le compte Twitter de la Banque centrale. Il a ainsi assuré que les mesures prises par la BDL visaient à protéger tous les établissements libanais du risque de faillite et à protéger les déposants. Une référence notamment à la circulaire n° 532 du 4 novembre 2019, à travers laquelle la Banque centrale a demandé aux banques d’augmenter en deux temps leurs fonds propres de 20 % par rapport au 31 décembre 2018 ; ou encore à la circulaire n° 536 du 4 décembre qui a suivi et dans laquelle elle a plafonné pendant six mois les taux d’intérêt sur les dépôts à venir en livres et en devises et permis aux banques de rémunérer en livres les intérêts sur les dépôts en dollars enregistrés avant cette date.
Il a ensuite souligné que la loi libanaise n’autorisait pas les banques à procéder à une ponction sur les dépôts et que ce type d’opération devait être autorisée par le Parlement.
Une réponse jugée « maladroite » sur la forme par un banquier contacté par L’Orient-Le Jour, qui l’attribue au service de communication de la BDL. « Le gouverneur avait été beaucoup plus ferme sur le sujet lors de son passage à la télévision il y a quelques semaines (dans l’émission Sar el-Waqt sur la chaîne locale MTV, le 9 janvier, NDLR), au cours duquel il avait clairement dit qu’il n’y aurait pas de haircut, avant de rappeler que cette décision n’était de toute façon pas de son ressort », explique-t-il. Un autre banquier souligne que la question n’est pas de savoir qui va donner son feu vert à un haircut, mais s’il sera inévitable ou non. « Tout va dépendre des choix du nouveau gouvernement concernant la dette publique et du Parlement, qui doit encore accorder sa confiance à l’exécutif », note-t-il.
Le gouverneur a aussi précisé que les banques pouvaient librement transférer en dehors du pays les fonds reçus de l’étranger après le 17 novembre. C’est à cette date que l’Association des banques du Liban avait annoncé l’entrée en vigueur d’une nouvelle salve de restrictions bancaires temporaires, bien plus drastiques que celles en vigueur jusque-là, après avoir fermé leurs portes pendant près d’un mois juste après le début des manifestations le 17 octobre. Le gouverneur a en outre affirmé que les fonds en dollars déposés avant cette date pouvaient être transférés à l’intérieur du Liban. Il a enfin assuré que la BDL fournissait « les liquidités nécessaires aux banques en livres et en dollars, mais à une condition : que les dollars prêtés par la BDL ne soient pas transférés à l’étranger ».
Le premier des deux banquiers interrogés rappelle pour sa part que ces mesures de contrôle des capitaux sont en principe illégales tant qu’elles n’ont pas été entérinées par une loi et que le gouverneur a attendu plusieurs mois avant de demander aux autorités de lui déléguer les pouvoirs nécessaires afin qu’il les officialise.
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commentaires (7)
MR RIAD SALAME LA VERITE EST QUE VOUS SAVEZ BIEN QUE LA SITUATION NE POURRA PAS ETRE SAUVE MAIS VOUS GAGNEZ DU TEMPS UNIQUEMENT COMME CETTE LOI QUI GARANTIE LES DEPOTS DE MOINS DE 75 MILLION QUI SONT D'APRES VOUS 80% DES DEPOTS EXPLIQUEZ MOI COMMENT SI LES DEPOTS SONT DE L'ORDRE DE 120 MILLIARDS DE DOLLARS , VOUS POUVEZ GARANTIR LE PAIEMENT DE 96 MILLIARDS AU PEUPLE QUI A MOINS QUE 75 MILLIONS ASSEZ D'ETRE LE PION DU CPL OU DE HEZBALLAH OU DE BERRY AYEZ LE COURAGE DE LA VERITE REPONDEZ A CETTE QUESTION CAR KANAAN A FAIT LE PAEN AU PARLEMENT AVEC SON AMENDEMENT DE LA LOI DU BUDGET GARANTISSANT CES SOMMES ALORS QU'ILS SAVENT TOUS ET VOUS AUSSI QUE C'EST IMPOSSIBLE MEME SI VOUS FAITES UN HAIRCUT DE 100% SUR LES RICHES DE PLUS DE 75 MILLIONS DE LIVRES LIBANAISES VOUS N'AVEZ TOUJOURS PAS COMPRIS VOUS ET TOUS LES POLITICIENS QUE LE PEUPLE DEMANDE LA VERITE ET DES COMPTES A CEUX QUI NOUS ONT MIS DANS LE PETRIN ET TOUS CAD TOUS VOUS INCLUS
LA VERITE
01 h 44, le 28 janvier 2020