De mémoire de gouvernement (depuis les années 90), la rédaction de la déclaration ministérielle n’avait jamais pris autant de temps ! Quatre réunions au plus et le tour était joué, le gouvernement portait alors sa déclaration devant le Parlement, où les députés se lançaient dans des discours axés sur les demandes de leurs électeurs (transmission en direct oblige!), sans discuter le fond de cette déclaration, avant de donner (ou non, ce qui était plus rare) leur confiance au cabinet. Cela, c’était avant Hassane Diab ! Aujourd’hui, la situation paraît totalement différente et montre bien que le nouveau président du Conseil et son cabinet ont réellement entendu les cris de la rue et veulent offrir aux Libanais une matière différente, dans le fond et la forme.
À ceux qui s’inquiètent donc de ce qui est considéré comme une lenteur inhabituelle dans l’élaboration de la déclaration ministérielle, les sources proches du Premier ministre répondent que c’est parce qu’il ne veut pas que la déclaration ministérielle du gouvernement qu’il préside se limite à de grands titres, sitôt énoncés, sitôt oubliés, qu’il y met le temps nécessaire. Selon ceux qui le connaissent, Hassane Diab est en effet un homme pointilleux jusqu’à l’obsession, méticuleux et précis. Il souhaiterait ainsi que la déclaration ministérielle donne un avant-goût réel et concret aux Libanais de l’action que le gouvernement compte mener, ainsi qu’un calendrier-programme de solutions.
Toujours selon les sources précitées, les questions politiques devraient être secondaires dans cette déclaration qui comportera évidemment un refus du plan américain de paix tel qu’il a été annoncé dans son volet relatif au sort des réfugiés palestiniens, cette question étant devenue d’une actualité pressante après l’annonce par Donald Trump de son projet de paix israélo-palestinien.
Mais le gros de la déclaration ministérielle devrait être consacré aux dossiers économiques et financiers. Et c’est ce qui prolonge encore les discussions. S’il est vrai qu’une partie des ministres du cabinet ne sont pas directement concernés par ces questions, il n’en demeure pas moins que le président du Conseil souhaiterait assurer un accord unanime sur le plan de travail, pour ne pas rééditer les scénarios des gouvernements précédents, où dès qu’un dossier était évoqué, chaque partie cherchait à l’utiliser contre ses rivaux politiques et où les réunions gouvernementales se transformaient en échanges à travers des barricades...
Selon des sources ministérielles qui suivent les discussions, trois grands dossiers devraient figurer dans la déclaration ministérielle, de façon à montrer aux Libanais la vision et le programme du gouvernement pour sortir de la crise actuelle.
Il y a d’abord le dossier purement financier portant sur la dette publique libanaise et l’obligation d’en payer les intérêts. Le Premier ministre pencherait vers une réduction de ces intérêts ou un rééchelonnement, mais il ne peut pas prendre seul une telle décision. Celle-ci est tributaire d’un accord qui devrait être conclu entre le gouvernement (le chef du gouvernement et le ministre des Finances), le gouverneur de la Banque du Liban et le président de l’Association des banques. Cette question avait été déjà évoquée à plusieurs reprises au cours des derniers mois, mais l’ancien Premier ministre était opposé à ce qu’on touche aux intérêts de la dette. Hassane Diab, lui, ne l’est pas. Il cherche donc à aboutir à un accord sur cette question, avant d’inclure ce point, essentiel dans la situation actuelle, au sein de la déclaration ministérielle. Selon les sources précitées, le chef de l’État devrait tenir des réunions consacrées à ce dossier au cours des prochains jours pour intensifier les échanges et permettre d’aboutir le plus rapidement possible à un accord.
Le second dossier important que le chef du gouvernement voudrait inclure dans la déclaration ministérielle porte sur l’électricité, notamment sur la nécessité de construire de nouvelles centrales électriques pour augmenter la production et renoncer ainsi progressivement aux apports de l’extérieur. Les protagonistes ne sont pas encore d’accord sur le nombre de nouvelles centrales qui devraient être construites. Mais la tendance générale est de penser que cette question ne devrait pas poser de problèmes, car il n’y a pas au sein de l’actuel cabinet des parties opposées qui chercheraient à marquer des points face aux autres. Au contraire, l’atmosphère générale est à vouloir régler ce dossier très lourd et à chercher les moyens concrets de placer son règlement sur les rails le plus rapidement possible et avec des décisions sérieuses, qui ne visent pas à jeter de la poudre aux yeux.
Enfin, le troisième dossier qui devrait figurer dans le programme de travail du gouvernement est celui des projets prévus dans le cadre de la conférence de Paris (CEDRE). Cette question a d’ailleurs été évoquée lors du contact téléphonique entre le président français et son homologue libanais, il y a quelques jours, et il semble que le processus devrait se mettre en marche dès que le nouveau cabinet aura obtenu la confiance du Parlement.
Selon les sources ministérielles précitées, ce que l’on considère comme une certaine lenteur dans la rédaction de la déclaration ministérielle est donc le reflet du souci de sérieux de l’équipe actuelle et sa volonté de présenter aux Libanais et à leurs représentants au Parlement des solutions concrètes, non des slogans. Les mêmes sources se veulent rassurantes sur le fait que les solutions existent, mais qu’elles ne sont pas faciles et peuvent prendre du temps, l’essentiel étant de ne pas faire de faux pas.
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commentaires (10)
on a l'impression de lire la porte parole de Baabda .
Le Point du Jour.
16 h 52, le 03 février 2020