Carlos Ghosn qui s'exprime mercredi à Beyrouth pour la première fois de manière publique depuis sa fuite rocambolesque du Japon le 29 décembre dernier où il fait l'objet de plusieurs inculpations de la part de la justice nippone, a affirmé qu'il serait prêt à aider le Liban si on le lui demandait.
"Je ne suis pas un homme politique et je n’ai aucune ambition politique. Mais si un responsable vient me demander une aide pour améliorer la situation au Liban, je le ferai", a affirmé l'ancien PDG de Renault-Nissan, lors d'une conférence de presse très attendue au siège de l'Ordre des journalistes à Beyrouth. Carlos Ghosn s'est également dit "prêt à rester longtemps" au Liban.
Le Liban connaît depuis le 17 octobre un mouvement de contestation populaire de grande ampleur contre la classe dirigeante, accusée de corruption et d'incompétence, sur fond de grave crise économique et monétaire.
L'ancien PDG de Renault-Nissan Carlos Ghosn a dénoncé mercredi un "coup monté" contre lui et s'est dit décidé à "laver son honneur", lors de sa première apparition publique à Beyrouth depuis sa fuite du Japon. Devant un parterre de quelque 150 journalistes méticuleusement choisis par son équipe de communication, le capitaine d'industrie déchu, accusateur, l'a proclamé : "présumé coupable" par le système judiciaire japonais, il n'avait "d'autre choix" que de fuir face à des accusations "sans fondements". "J'étais otage" au Japon, a-t-il ajouté, arguant de son "innocence".
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Convocation par la justice libanaise
Pendant sa conférence de presse, l'on apprenait que l'ex-magnat de l'automobile, Carlos Ghosn, avait été convoqué par la justice libanaise et devra se présenter jeudi devant le procureur général près la Cour de cassation, Ghassan Oueidate, au palais de Justice de Beyrouth.
M. Ghosn avait été arrêté fin novembre 2018 au Japon et avait passé 130 jours sous les verrous, soupçonné de diverses malversations financières. Depuis fin avril 2019, il était en liberté sous caution avec interdiction formelle de quitter le pays dans l'attente de son procès qui devait s'ouvrir cette année. Mais, fin décembre, dans un scénario hollywoodien autour duquel demeurent plusieurs zones d'ombre et sur lequel M. Ghosn n'a pas voulu s'exprimer mercredi, il a réussi à fuir le Japon pour rejoindre le Liban, un pays dont il a la nationalité.
Devant le juge Oueidate, Carlos Ghosn sera appelé à témoigner dans le cadre de deux affaires distinctes. Il sera tout d'abord entendu dans le cadre de l'enquête sur la "notice rouge" envoyée à la justice libanaise par le bureau d'Interpol au Japon. Les notices rouges sont des avis de recherche internationaux lancés sur demande des pays membres d'Interpol. Il n'existe toutefois pas d'accord d'extradition entre le Liban et le Japon. A ce sujet, le ministre libanais sortant de la Justice, Albert Serhane, avait déclaré lundi que M. Ghosn est un "citoyen libanais et il sera donc traité comme tel par la justice".
L'ancien patron automobile sera ensuite interrogé dans le cadre de la plainte déposée contre lui la semaine dernière par trois avocats libanais qui l'accusent d'être entré en Israël, ce qui est interdit par la loi libanaise. Ces avocats ont basé leurs poursuites sur des photos remontant à 2008 d'une réunion entre l'ex-patron automobile et les anciens président et Premier ministre israéliens Shimon Peres et Ehud Olmert.
(Lire aussi : Ce que Ghosn a plaidé et vécu depuis son arrestation au Japon)
"Je ne me suis pas rendu en Israël en tant que citoyen libanais, mais en tant que PDG de Renault et en tant que citoyen français", a affirmé, à ce sujet, l'ancien PDG de Renault-Nissan, en réponse à une question du journaliste Maroun Nassif de la chaîne LBCI, lors d'une conférence de presse. Alors qu'il était encore président de Renault-Nissan, M. Ghosn s'était rendu en Israël en 2008 dans le cadre d'un partenariat pour le lancement d'une voiture électrique.
"Je fais confiance à la loi et au président du Liban", a également déclaré M. Ghosn lors des questions-réponses avec la presse mercredi. "Je n'ai aucun assurance de ne pas être extradé", a-t-il également déclaré. "Je suis prêt à me présenter devant un tribunal, où qu’il soit, si j’ai la garantie d’un procès équitable", a encore déclaré M. Ghosn.
Interrogé en outre sur un supposé entretien qu'il aurait eu à son arrivée à Beyrouth avec le président de la République, Michel Aoun, au palais de Baabda, M. Ghosn a éludé la question. "Je ne vais évoquer aucun des entretiens que j'ai eus", s'est-il contenté de dire.
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Les invités du soir, l'éditorial de Issa GORAIEB
La terminologie "aider le Liban" c'est aussi la terminologie que les pays donateurs de credits (CEDRE) utilise. Ils veulent "aider" le Liban en donant plus de credits mais c'est un euphemisme pour dire qu'ils aimeraient endetter le Liban un peu plus, pour vendre plus.
20 h 26, le 09 janvier 2020