Le ministre libanais sortant de la Justice, Albert Serhane, a affirmé mardi que le patron déchu de Renault Nissan, Carlos Ghosn, était entré "légalement" au Liban, pays dont il détient la nationalité, et que son séjour y est dès lors également légal. Ces déclarations du ministre Serhane interviennent à la veille d'une conférence de presse attendue de Carlos Ghosn, demain à 15h.
M. Ghosn avait été arrêté fin novembre 2018 au Japon et avait passé 130 jours sous les verrous, soupçonné de diverses malversations financières. Depuis fin avril 2019, il était en liberté sous caution avec interdiction formelle de quitter le pays dans l'attente de son procès qui devait s'ouvrir cette année. Mais, fin décembre, dans un scénario hollywoodien autour duquel demeurent plusieurs zones d'ombre, il a réussi à fuir le Japon pour rejoindre le Liban, un pays dont il a la nationalité. Il fait depuis l'objet d'une demande d'arrestation par Interpol.
"Le bureau du procureur général a bien reçu la 'notice rouge' de la part du bureau d'Interpol au Japon et il effectuera les procédures nécessaires à cet égard", a souligné le ministre sortant. Suivant la procédure en vigueur, le procureur général devrait convoquer le magnat de l’automobile pour entendre sa version des faits. Les notices rouges sont des avis de recherche internationaux lancés sur demande des pays membres d'Interpol. Il n'existe toutefois pas d'accord d'extradition entre le Liban et le Japon.
M. Ghosn est un "citoyen libanais et il sera donc traité comme tel par la justice", a ajouté M. Serhane, qui a précisé que l'entrée de l'ex-PDG de Nissan sur le territoire libanais "est légale, et donc son séjour au Liban l'est également".
Concernant l'épouse du patron déchu de Renault-Nissan, Carole Ghosn, il a indiqué que "l'Etat libanais, représenté par le ministère de la Justice, n'a pas reçu de dossier concernant son mandat d'arrêt". Le parquet de Tokyo avait annoncé plus tôt dans la journée avoir obtenu un mandat d'arrêt contre Carole Ghosn, qui est elle aussi actuellement au Liban, soupçonnée de faux témoignage dans l'enquête japonaise visant son mari.
En ce qui concerne la note d'informations déposée par trois avocats contre M. Ghosn pour "collaboration avec Israël", Albert Serhane a souligné que ce dossier était "en train d'être étudié". Les avocats ont basé leurs poursuites contre M. Ghosn sur des photos remontant à 2008 d'une réunion entre l'ex-patron automobile et les anciens président et Premier ministre israéliens Shimon Peres et Ehud Olmert.
(Lire aussi : Le Japon défend son système judiciaire avant la conférence de Ghosn)
Le Japon "très inquiet"
De son côté, le président libanais, Michel Aoun, a reçu l'ambassadeur du Japon à Beyrouth, Takeshi Okubo, en présence notamment du ministre d'Etat sortant pour les Affaires de la présidence, Salim Jreissati, et du directeur général de la Sûreté générale, Abbas Ibrahim. A l'issue de cet entretien, l'ambassadeur a souligné "la grande inquiétude du Japon, de son gouvernement et de son peuple vis-à-vis de l'affaire Carlos Ghosn, notamment en ce qui concerne sa sortie du Japon et son entrée au Liban". Il a précisé avoir demandé au chef de l'Etat de "une meilleure coopération" à ce sujet, afin d'éviter les "répercussions négatives" de cette affaire sur les relations entre Tokyo et Beyrouth.
Le président libanais, Michel Aoun, recevant l'ambassadeur du Japon à Beyrouth, Takeshi Okubo, à Baabda, le 7 janvier 2020. Photo Dalati et Nohra
Lors de sa conférence de presse de mercredi, la première depuis son arrestation au Japon, Carlos Ghosn pourrait lever un coin de voile sur les circonstances de son évasion vers le Liban et sur le "complot" à l'origine, selon lui, de sa disgrâce soudaine. Le patron déchu n'a eu de cesse de clamer son innocence et se présente comme la victime d'une machination ourdie, selon lui, par des dirigeants de Nissan décidés à faire échec à son projet de renforcement de l'alliance des deux constructeurs.
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Pauvre Carlos Ghosn! Maintenant il va devoir séxpliquer sur ses relations avec Israel. Car c'est un fait qu'il a ete plusieus fois en Israel et qu'il a rencontre des officiels. Nous verrons si les autorites vont oser l'importuner...
22 h 25, le 07 janvier 2020