L'armée libanaise a déploré lundi le "chaos généralisé" qu'a connu la veille le centre-ville de Beyrouth, alors que des manifestations au départ pacifiques à proximité du Parlement ont dégénéré en affrontements entre les militaires et les forces de l'ordre face aux contestataires. De son côté, la ministre sortante de l'Intérieur Raya el-Hassan a reconnu, dans une interview au magazine el-Amn relevant des Forces de sécurité intérieure, que "des erreurs avaient été commises" au cours des deux derniers mois par les Forces de sécurité intérieure, lesquelles avaient pourtant toujours "respecté leur code de conduite".
Samedi et dimanche soir, les rassemblements organisés dans le centre-ville de Beyrouth ont fini par perdre le côté pacifique qui avait caractérisé les deux mois de révolte populaire libanaise, lorsque les forces de l'ordre ont lancé une grande quantité de gaz lacrymogènes sur les manifestants. Certains agents des forces de sécurité, notamment les brigades anti-émeutes et la police du Parlement, ont fait usage de grande violence envers les contestataires. Ces accrochages ont été dénoncé avec force, notamment sur les réseaux sociaux.
La Croix-Rouge libanaise a dit avoir soigné dimanche 45 personnes sur place, selon un bilan donné à l'AFP. Et "28 personnes" ont été hospitalisées, a indiqué son directeur Georges Kettané.
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"Chaos généralisé et émeutes"
"En raison du chaos généralisé qu'a connu le centre-ville de Beyrouth hier soir, après que quelques personnes ont lancé des émeutes, attaqué les biens publics et privés et lancé des pierres et de bombes sonores en direction des forces de l'ordre, plusieurs unités de l'armée déployées dans la région ont soutenu les FSI afin de maintenir la stabilité et mettre un terme à ces agressions", a écrit l'armée dans un communiqué. Suite à cette intervention, "la situation est revenue à la normale", ajoute la troupe.
De son côté, Raya el-Hassan a affirmé que "les FSI représentent la protection des droits et des libertés et garantissent la sécurité, l'ordre et l’État de droit". La ministre a été vivement critiquée, à chaque regain de tensions entre manifestants et forces de l'ordre.
Depuis le début du mouvement de contestation, le 17 octobre, les FSI ont réagi "de manière excellente" avec les manifestants, a souligné la ministre, qui a affirmé que la contestation avait permis aux Libanais de "découvrir comment travaillent ces forces sur le terrain". Insistant sur l'ampleur de la mission de la police au cours de ces deux derniers mois, elle a reconnu que "certaines erreurs avaient été commises". "Mais cela n'annule pas la réalité des faits, qui est que les policiers ont respecté le code de conduite" qui leur est imposé, a-t-elle toutefois ajouté. Et Mme Hassan de préciser que ce code de conduite ne préconise l'usage de la force et des armes qu'en cas d'absolue nécessité".
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Travail "exemplaire"
Soulignant "la situation délicate et les pressions sur le terrain" que subit la police depuis deux mois, la ministre de l'Intérieur a affirmé que les agents "sont parvenus à protéger les droits et les libertés publiques de manière exemplaire comparé à des situations similaires dans d'autres pays du monde et de la région".
Par ailleurs, la ministre sortante de l'Intérieur a demandé aux FSI et à la Sûreté générale (SG) de respecter l'article 47 du code de procédure pénale ayant trait aux droits des personnes interrogées, appelant notamment les agents des FSI et de la SG à les notifier de la possibilité de faire appel à un avocat ou de se faire ausculter par un médecin.
Dimanche, Mme Hassan avait déjà publié un communiqué dans lequel elle pointait du doigt "l’intervention d’éléments infiltrés" et annonçait avoir demandé au commandement des FSI d’effectuer une enquête rapide et transparente", sur ces incidents. Des sources de sécurité ont assuré à la chaîne LBCI que même si l’enquête est loin d’être terminée, la version complète des incidents du samedi soir est connue, et que les infiltrés responsables des débordements ont bel et bien été identifiés.
Fait marquant et inédit depuis le début de l’insurrection : le directeur général des FSI, le général Imad Osman, était lui aussi descendu dans la rue pour s’adresser aux agents des FSI et aux manifestants dimanche soir, alors même qu’un nouveau rassemblement était organisé dans le centre-ville. Il a tenu à rassurer de vive voix les contestataires et leur demander de préserver le caractère pacifique de leur mouvement, mais n’a pas répondu à de nombreuses questions, comme celle de savoir qui sont les éléments en tenue civile qui s'étaient permis d’arrêter des protestataires la veille.
Sur le plan international, le coordonnateur spécial du secrétaire général des Nations unies pour le Liban, Jan Kubis, a estimé lundi que "la violence et les affrontements qui ont eu lieu lors du week-end ont une fois de plus prouvé que les reports d'une solution à la crise politique créent un terreau fertile pour les provocations et manipulations politiques". "Il faut identifier les instigateurs de cette violence et enquêter sur ces incidents et l'utilisation excessive de la force par les forces de sécurité, afin d'empêcher que la situation ne dégénère vers des comportements encore plus agressifs de la part de tous", a-t-il appelé.
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commentaires (3)
CHAOS GENERE COMME TOUJOURS PAR CEUX QU,ON SAIT. QUE FAIT-ON POUR LES EMPECHER DE S,INFILTRER PARMI LES MANIFESTANTS PACIFIQUES ET D,ATTAQUER LES FORCES DE SECURITE POUR CREER CE CHAOS ?
LA LIBRE EXPRESSION
18 h 01, le 16 décembre 2019