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Nos Lecteurs ont la Parole - Daniel DIB

Le pays des plats qui est le mien, suite et faim !

Heureusement que l’on mange bien dans le pays des plats qui est le mien. Tellement bien que l’on se retrouve chez sa diététicienne, aux urgences… ou à la morgue parce qu’on perd le sens de la vie quand on n’a pas les 1 000 LL à donner à son enfant pour acheter une man2ouché à l’école.

On y mange tellement bien dans le pays des plats qui est le mien que plus du tiers de la population vit sous le seuil de la pauvreté.

On y mange tellement bien dans le pays des plats qui est le mien que cela laisse peu de temps entre un repas gargantuesque et un autre pour ouvrir la bouche autrement que pour mastiquer, critiquer les zo3rane qui bloquent les rues ou réfléchir à qui profite le crime de polluer cette eau qui a arrosé ces magnifiques légumes et leur donne cet fumet de « je ne sais quoi » !

On y mange tellement bien dans le pays des plats qui est le mien que la recette des mezzés a été perfectionnée à souhait pour atteindre un summum d’équilibre équilibrationniste entre les ingrédients de notre cuisine traditionnelle. Prenons le tabboulé par exemple. L’équilibre délicat entre le jaune du citron, l’orange de la tomate, le bleu de l’huile et le vert du persil est devenu sacro-saint et intouchable. Aucun « fils de femme » (ibn mara pour les intimes) n’ose contester, proposer une amélioration ou sublimer sans être taxé de traître, collabo, à la solde de moult cuisines étrangères ignares de nos traditions.

On y mange tellement bien dans le pays des plats qui est le mien que certains n’hésitent pas à se reservir sur la table et en dessous de table pour prolonger leur plaisir inique. Et c’est toujours les mêmes qui iniquent.

On y mange tellement bien dans le plat pays qui est le mien que certains se sont roulés sous la table – sans rire – et ne font rien avancer, rien que leur poche qui se remplit plus vite que leur panse, plus vite que je ne pense. Tellement gonflée cette poche que les portails de sécurité vers et du monde extérieur, cette bouffée d’oxygène, ce nerf de la guerre qui maintient le pays en survie font « tilt » et que la communauté internationale va bientôt nous renvoyer en cuisine, puis la fermer pour raison sanitaire, tellement ça pue.

Que le « silly cone » sur lequel est assis le citoyen – ou plutôt le « si tellement pris pour un cone » de citoyen – fait « tilt ». L’été indien (à défaut de printemps – arabe soit-il, ou phénicien) a amené avec lui les bsstyés moulants d’où surgissent comme des torpilles les poitrines de nos concitoyennes. Nos citoyennes se sont levées ensemble. Elles se sont levées et avec cette intelligence émotionnelle dont les femmes libanaises ont intuitivement le subtil secret ont su créer les airbags de la révolution en cordon maternel entre les forces de sécurité et les manifestants. Quand les bsstyés se lèveront d’un seul bond, je peux vous garantir messieurs qui nous avez gouvernés sans représentation féminine conséquente ni paritaire au gouvernement, messieurs qui roulez sous la table et ramassez les « znoud es-set » et les « moss esb3o », les bsstyés sont en train de se lever d’un seul bond et elles feront une onde de choc, une lame de fond, une secousse tellement forte que Beyrouth sera détruite une énième fois pour mieux renaître, différente, de ses cendres. Citoyennes, citoyens, manifestantes, manifestants, révolutionnaires, révolutionnaires (enfin l’égalité au moins dans l’accord !), levez-vous, la tête haute, la poitrine en avant et qu’enfin la liberté, la vraie démocratie (pas la fausse nôtre, actuellement), le respect de l’autre au-dessus de toute affiliation et estezlem, au-delà de toute confession, de toute corruption morale nous sauvent des pleurs et des crissements de dent à venir – wa hounaaka al boukaa2 wa sarirou al asnaan !

« Certains disent que nous sommes en danger. Je leur réponds : peu importe, n’ayez pas peur car nous sommes nés des dangers ! »

Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour.

Heureusement que l’on mange bien dans le pays des plats qui est le mien. Tellement bien que l’on se retrouve chez sa diététicienne, aux urgences… ou à la morgue parce qu’on perd le sens de la vie quand on n’a pas les 1 000 LL à donner à son enfant pour acheter une man2ouché à l’école. On y mange tellement bien dans le pays des plats qui est le mien que plus du tiers de la...

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