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À La Une - diplomatie

Réunion du GIS : aide internationale conditionnée à la mise en place d'un gouvernement réformateur

Saad Hariri a de nouveau appelé à la formation d'un gouvernement de spécialistes, qui puisse répondre "aux aspirations des Libanais".

Le chef de la diplomatie française Jean-Yves Le Drian (c) présidant la réunion du GIS, mercredi 11 décembre 2019, à Paris. Photo tirée du compte Twitter de la diplomatie française

Les principaux soutiens internationaux du Liban ont conditionné mercredi toute aide financière à ce pays en crise à la mise en place d'un gouvernement "efficace et crédible", qui engage rapidement des réformes "d'urgence".
Le Premier ministre libanais Saad Hariri a démissionné le 29 octobre après plusieurs semaines de manifestations contre une élite politique jugée corrompue et incapable de sortir le pays de sa plus grave crise économique depuis la guerre civile (1975-1990). Aucun gouvernement n'a pu être formé depuis. Les manifestants réclament une équipe de technocrates et de personnalités indépendantes, ce que rejette totalement le Hezbollah et ses alliés.

Le Groupe international de soutien au Liban (GIS), réuni à Paris sous les auspices de la France - soutien traditionnel de Beyrouth - et des Nations unies, a exhorté les responsables politiques libanais à sortir au plus vite de ce blocage. "Ils doivent mettre de côté leurs intérêts propres et avoir à l'esprit l'intérêt général de tous les libanais. Le seul critère doit être celui de l'efficacité du gouvernement, au service des réformes", a martelé Jean-Yves Le Drian. "Seule cette voie permettra à l'ensemble des participants autour de cette table et au-delà de se mobiliser pour apporter au Liban tout le soutien dont il a besoin", a-t-il averti.

La Chine, l'Égypte, l'Allemagne, l'Italie, la France, le Koweït, les Émirats arabes unis, la Russie, le Royaume-Uni et les États-Unis ont participé à cette réunion, de même que plusieurs institutions internationales, dont la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI). Les États-Unis étaient représentés par leur secrétaire d'État adjoint pour le Moyen-Orient, David Schenker. L'Arabie saoudite, donnée initialement présente, n'était finalement pas autour de la table. Le Liban y était représenté par le directeur général du ministère des Affaires étrangères Hani Chmaytelli, le directeur général du ministère des Finances, Alain Bifani, la conseillère pour les affaires économiques du Premier ministre démissionnaire Saad Hariri, Hazar Caracalla, et le directeur exécutif au sein de la Banque du Liban, Raja Abou Asli.

Depuis le 17 octobre, le Liban est en proie à une contestation sans précédent contre l'ensemble de la classe politique, jugée incompétente et corrompue. La situation économique et financière du Liban, déjà très précaire avant le début de la contestation, s'est profondément dégradée depuis, avec des restrictions bancaires croissantes et une pénurie de liquidités.

Dos au mur, Saad Hariri, qui continue de gérer les affaires courantes, a demandé une aide financière d'urgence à plusieurs "pays frères et amis" (France, Arabie saoudite, États-Unis, Russie, Chine, Égypte et Turquie). Mais la communauté internationale subordonne l'octroi d'une aide financière à la concrétisation de plusieurs réformes, d'une plus grande transparence des transactions publiques à l'indépendance de la justice.

Réagissant à l'appel du GIS, Saad Hariri a de nouveau appelé à la formation d'un gouvernement de spécialistes, qui puisse répondre "aux aspirations des Libanais", tout en remerciant la France et les Nations unies qui ont appelé à cette réunion, ainsi que tous ceux qui y ont participé, pour leur "engagement à aider le Liban à sortir de la grave crise économique à laquelle il est confronté".


"Un message capital"
Le chef de la délégation libanaise Hani Chmaytelli a déclaré à l’OLJ que la communauté internationale avait adressé un "message capital" au Liban, en renouvelant son engagement à l’égard de la stabilité et de la prospérité du pays.

"La communauté internationale a adressé un message capital : c’est l’engagement de la communauté internationale à soutenir le Liban en ces circonstances délicates. C’est un message qui a été renouvelé d’une manière positive et d’une manière constructive", a déclaré le directeur général du ministère des Affaires étrangères à notre correspondante Anne Ilcinkas, à l’issue de la réunion au Quai d’Orsay. "C’est un message clair qui démontre encore une fois l’attachement de la communauté internationale à la stabilité, au développement et à la prospérité du Liban", a-t-il ajouté.

Interrogé sur l'appel, formulé dans le communiqué final, pour que soient menées réformes au Liban, il a répondu : "Engager des réformes n’est pas un diktat de la communauté internationale, c’est une nécessité libanaise interne, donc c’est un jeu à somme positive et il y a un terrain commun sur lequel nous pourrons travailler ensemble". A la demande de savoir si la communauté internationale était disposée à fournir des aides au Liban au cas où un gouvernement n’est pas formé, il a répondu : "la formation du gouvernement est une condition sine qua non, mais il s’agit d’une exigence commune à la communauté internationale et au Liban".




La délégation libanaise qui a participé à la réunion du GIS mercredi à Paris, présidée par le directeur général du ministère des Affaires étrangères Hani Chmaytelli (centre). Phoot DR



"Pas de chèque en blanc"
"Le message est clair. Il n'y aura pas de chèque en blanc. Il ne s'agit pas d'un énième exercice de renflouement du système", a souligné une source diplomatique française citée par l'AFP. "Il faut un gouvernement très vite et que cette équipe prenne des décisions très vite", insiste-t-on à Paris tout en soulignant bien qu'il "n'appartient pas à la communauté internationale de décider de la composition du gouvernement".

Les pays présents ont énuméré dans une feuille de route les grands objectifs des réformes : retour à la stabilité financière, meilleure gouvernance, lutte contre la corruption et l'évasion fiscale, etc... sans détailler de mesures concrètes. Le Groupe a ainsi appelé le Liban à adopter immédiatement un budget 2020 fiable (...). Il a exhorté également les autorités libanaises à prendre des mesures décisives pour rétablir la stabilité et le caractère durable du modèle de financement du secteur financier, pour lutter contre la corruption et l'évasion fiscale, (...) et à mettre en œuvre le plan de réforme de l'électricité". "À plus long terme, dans les six premiers mois suivant la formation du gouvernement, des mesures structurelles ambitieuses pour assurer un modèle économique durable devraient être mises en place, a ajouté le GIS. Les conclusions de la conférence CEDRE, approuvées par les autorités libanaises le 6 avril 2018, sont toujours valides. À cet égard, les autorités libanaises devraient accélérer la mise en œuvre des projets existants et s’engager à hiérarchiser les différents projets du plan d’investissement conformément aux besoins et aux attentes des populations et mettre en place un comité interministériel pour superviser leur mise en œuvre en temps voulu", selon le communiqué.

En avril 2018, la conférence CEDRE des donateurs demandait déjà qu'en contrepartie de promesses de prêts et de dons à hauteur de 11,6 milliards de dollars, Beyrouth procède à des réformes structurelles et à des coupes budgétaires. "Rien ne s'est passé depuis côté libanais, et rien du côté financement", relève-t-on à Paris.


Alors que se tenait la réunion du GIS, des contestataires s'étaient rassemblés dans la matinée devant le consulat de France à Beyrouth pour réclamer notamment l'aide de la France pour "la restitution des fonds volés". Par ailleurs, une autre manifestation a été organisée dans l'après-midi devant le Quai d'Orsay.


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Les principaux soutiens internationaux du Liban ont conditionné mercredi toute aide financière à ce pays en crise à la mise en place d'un gouvernement "efficace et crédible", qui engage rapidement des réformes "d'urgence". Le Premier ministre libanais Saad Hariri a démissionné le 29 octobre après plusieurs semaines de manifestations contre une élite politique jugée corrompue et...

commentaires (7)

"... la formation du gouvernement est une condition sine qua non ..." C’est pareil que "quid pro quo" ça?

Gros Gnon

20 h 23, le 11 décembre 2019

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Commentaires (7)

  • "... la formation du gouvernement est une condition sine qua non ..." C’est pareil que "quid pro quo" ça?

    Gros Gnon

    20 h 23, le 11 décembre 2019

  • On parle souvent d'une équipe de technocrates comme si c'est "positive" mais le dictionnaire Petit Robert dit : technocrate mot 1920, repris mil. XX de technocratie, un anglicisme de 1919- systeme politique dans lequel les techniciens ont pouvoir predominant au détriment de la vie politique proprement dite. Aussi le dictionnaire avertit : souvent péj. c.a.d. péjoratif !! ministre, haut fonctionnaire technicien tendant a faire prévaloir les conceptions techniques d'un probleme au détriment des conséquences sociales et humaines. Est-ce les manifestants veulent des techniciens qui ne s'occupent PAS des conséquences sociales et humaines ??? On utilise le mot "technocrate" dans un autre sens, je crains. Il faut bien indiquer la signification du mot "technocrate".

    Stes David

    19 h 54, le 11 décembre 2019

  • Un gouvernement réformateur tombera-t-il du ciel ?France imposez une solution à notre petite nation .

    Antoine Sabbagha

    19 h 47, le 11 décembre 2019

  • Jadis, mes parents et mes grands-parents chantaient le refrain : La France est la mère du monde entier, Ô Libanais, soyez-en fiers. (França omm ed-dounia...).

    Un Libanais

    19 h 18, le 11 décembre 2019

  • A bon entendeur salut!!!

    Houri Ziad

    19 h 03, le 11 décembre 2019

  • LE GIS APPELLE ET CONSEILLE. ENCORE FAUT-IL QUE NOS ABRUTIS CORROMPUS ET INCOMPETENTS SE DESABRUTISSENT. CHOSE IMPROBABLE. ILS SONT AGRIPPES ONCLES ET CROCS A LEURS POSTES ET AUX AVANTAGES ET VOLS QU,ILS COMMETTENT. IL FAUT QU,ILS DEGAGENT ! SINON LE PAYS SERA PERDU ET S,EFFONDRERA SUR LA TETE DE TOUT LE MONDE... EXCEPTE LES DEUX MILICES IRANIENNES COMME ILS LE PRETENDENT ?... TOUT LE PEUPLE VA SOUFFRIR ENORMEMENT.

    LA LIBRE EXPRESSION

    16 h 36, le 11 décembre 2019

  • "La stabilité du Liban impose une formation rapide d'un gouvernement, selon le GIS" C'est bien évident! Repousser sans cesse les consultations parlementaires préalables à la formation du gouvernement signifie donc que l'on ne veut pas de la stabilité du Liban. Il ne peut y avoir d'autre explication.

    Yves Prevost

    15 h 42, le 11 décembre 2019

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