Depuis le début des manifestations, il y a à peu près un mois, des dizaines de protestataires ont été interpellés dans des circonstances floues par les services de sécurité. Dernier incident en date, l’interpellation de l’activiste Khaldoun Jaber et sa détention pendant 18 heures par les renseignements de l’armée, alors qu’il participait à une manifestation pacifique avant-hier devant le palais présidentiel à Baabda. M. Jaber aurait tout bonnement disparu de la manifestation, après avoir été emmené de force par des militaires habillés en civil. Son lieu de détention est resté inconnu pendant 12 heures, avant que des activistes de la société civile n’apprennent qu’il avait été transféré au poste de police de Hobeiche, à Beyrouth, en vue d’être libéré.
Le jeune homme est apparu à la télévision à sa sortie du poste, où il a été accueilli par de nombreux militants, et a montré des traces de coups sur son dos. Des images de lui qui circulent sur les réseaux sociaux montrent également des blessures au visage. « Ils m’ont emmené au ministère de la Défense puis à l’hôpital militaire. J’ai ensuite été transféré au poste de la police militaire à Sayyad. Ils m’ont demandé à plusieurs reprises qui nous finançait et ont essayé de m’intimider », a expliqué le jeune homme aux médias présents sur place. « Je n’ai pas peur de l’État policier. Nous allons manifester à nouveau, la révolution est plus forte que tout », a écrit Khaldoun Jaber sur son compte Facebook, quelques heures après sa remise en liberté.
Auparavant, un groupe d’activistes avait manifesté devant le poste de police de Hobeiche, en attendant que le jeune activiste soit relâché. Un groupe d’avocats avait également observé un sit-in hier devant le Palais de justice de Beyrouth, afin de connaître le sort de Khaldoun Jaber. Selon l’Agence nationale d’information (ANI, officielle), M. Jaber aurait été amené au poste de police de Hobeiche à cause d’une amende de circulation impayée.
« Nous avons perdu la trace de Khaldoun pendant 12 heures, même le procureur général n’était pas capable de nous dire où il était. Il a passé donc plusieurs heures soustrait à la protection de la justice », confie à L’Orient-Le Jour Wadih el-Asmar, directeur du Centre libanais pour les droits humains (CLDH).
L’interpellation de Khaldoun Jaber et le flou ayant entouré sa détention, ainsi que le fait qu’il a été tabassé par les forces de sécurité, ont suscité des réactions indignées sur les réseaux sociaux. Certains dénoncent le fait que M. Jaber a été emmené de force pendant qu’il manifestait pacifiquement, alors que les personnes qui ont agressé les protestataires sur la voie express du Ring à visage découvert, le 29 octobre dernier, n’ont pas été interpellées. L’un des assaillants, Oussama Chamas, est même passé à la télévision sur la chaîne LBCI pour tenter de se justifier. Une photo de lui, armé d’un bâton et poursuivant une manifestante, avait massivement circulé en ligne.
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Interpellations à Jal el-Dib et Zahlé
L’activiste Charbel Kahi a par ailleurs été interpellé hier à Jal el-Dib, ainsi que deux manifestants tripolitains présents sur place. M. Kahi a été relâché quelques heures plus tard, alors que le sort des deux autres manifestants était toujours flou hier soir. Ils seraient détenus au poste de police de Naccache, selon certaines informations. « Plusieurs avocats sont en train de suivre le dossier de ces manifestants. Malheureusement, les personnes qui forcent les barrages ou qui tirent sur les manifestants ne sont pas inquiétées », déplore Wadih el-Asmar qui dénonce « une tendance des services de sécurité à ne rien faire dans ces cas-là ». Par ailleurs, la Sûreté de l’État a annoncé hier avoir interpellé un homme dans la région de Zahlé pour avoir déchiré une photo du président de la République.
Sur un autre plan, une dizaine de jeunes âgés entre 25 et 15 ans seraient toujours détenus au poste de police de Beydoun à Achrafieh, après des heurts qui les ont opposés dimanche dernier à des hommes venus troubler une manifestation tenue place Sassine. Les assaillants, eux, n’ont pas été inquiétés.
À Tyr, une audience prévue hier pour 18 personnes suspectées d’avoir saccagé le Rest House, le 18 octobre dernier, a été reportée à mardi prochain en raison de l’incapacité du premier juge d’instruction, Marcel Haddad, à se rendre au tribunal à cause de la fermeture des routes. Ces personnes devaient être représentées par un groupe d’avocats mandatés par le bâtonnier de Beyrouth André Chidiac. Sauf que les avocats ont été surpris de découvrir, hier matin, que le bâtonnier avait retiré le mandat qu’il leur avait accordé pour défendre les manifestants, sans donner plus d’explications.
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12 h 13, le 15 novembre 2019