Trente minutes auront suffi aux casseurs, mardi, pour saccager les installations aménagées par les révolutionnaires au cœur de Beyrouth, place des Martyrs et place Riad el-Solh. Ce saccage suivait de près l’intervention musclée d’habitants en colère du quartier de Khandak el-Ghamik, situé entre la rue Béchara el-Khoury et le ring Fouad Chéhab, pour déloger de cette voie express les manifestants qui bloquaient l’artère depuis plusieurs jours. Avec pour intention, disaient-ils, d’ouvrir les routes bloquées par les manifestants. Des hordes de jeunes gens ont alors envahi le centre-ville, insultant et agressant les protestataires pacifiques, même les femmes, cassant et incendiant tout sur leur passage, depuis les tentes jusqu’aux haut-parleurs, en passant par les installations électriques et les chaises.
Face à la scène, la force antiémeute a bien tenté au départ de protéger les manifestants installés nuit et jour sur l’artère qui relie les quartiers beyrouthins d’Achrafieh et de Hamra, bousculant les assaillants et tirant quelques grenades lacrymogènes. Mais elle a finalement jeté l’éponge, débordée, désorganisée face au déferlement de centaines de jeunes gens survoltés qui scandaient des slogans d’allégeance aux deux leaders chiites du Liban, Nabih Berry, président du Parlement et chef du mouvement Amal, et Hassan Nasrallah, secrétaire général du Hezbollah. L’armée libanaise, elle, n’a réagi que tardivement. Le cœur de Beyrouth ressemblait déjà à un champ de bataille. Qui sont ces contre-manifestants qui ont lancé en hurlant : « Avec notre âme et notre sang, nous nous sacrifions pour toi, Nabih », ou « Allah, Nasrallah et toute la banlieue sud » ? Sont-ils réellement de simples habitants en colère, des partisans télécommandés du Hezbollah ou d’Amal, ou autres ?
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Face à la rue chiite, au Sud
« Une trentaine de participants tout au plus viennent de Khandak el-Ghamik », reconnaît Mehdi Nahnouh, un habitant de ce quartier chiite défavorisé connu pour son allégeance à la « Haraké » du chef du Parlement. « Mais des renforts ont afflué d’autres régions de Beyrouth », poursuit-il, évoquant les quartiers proches du tandem chiite, comme Zokak el-Blatt, Bourj Abou Haïdar, Mar Élias ou Ras el-Nabeh. Il explique en revanche que la source du problème est le blocage de la voie express du Ring. « Les habitants de Khandak el-Ghamik ont voulu exprimer leur colère et tenter de rouvrir la voie, affirme-t-il. Depuis quatre jours, nous demandions aux manifestants de déplacer leur quartier général installé sur le Ring vers la place Tabaris. » Mais face à l’intransigeance des protestataires, le ton est monté entre les deux parties. « D’un côté, ils ont provoqué nos jeunes, alors qu’ils se prétendent pacifiques. D’un autre, la rue de Khandak el-Ghamik n’est pas tendre, d’où la violence, les saccages et les débordements », poursuit ce chef d’entreprise. Mehdi Nahnouh assure que les contre-manifestants n’ont pas été manipulés ni télécommandés par un quelconque parti. « Notre rue est toutefois connue, tient-il à préciser. Nous sommes chiites, et après Dieu, nous prêtons allégeance à Nasrallah. Et nous avons non seulement réagi à la rue du centre-ville et à ses propos insultants envers la communauté chiite, mais aussi à celle du Sud, qui s’est insurgée contre le leadership chiite en manifestant, brûlant les permanences d’Amal et le Rest House de Tyr, notamment. Ce qui est inadmissible », gronde-t-il, tout en insistant sur le fait que « les habitants de ce quartier défavorisé ont uni leurs voix à celles des manifestants durant les premiers jours ».
Un habitant de la banlieue sud de Beyrouth observe que le quartier de Khandak el-Ghamik est un « lieu de non-droit, où les habitants, majoritairement au chômage et vivant de boulots parfois illicites », sont « difficilement contrôlables par les partis », même s’ils sont « proches du mouvement Amal » et en tirent certains bénéfices. « Il suffit en revanche qu’un seul habitant reçoive l’ordre de son leader chiite pour que la rue bouge », fait-il remarquer. De son côté, un autre habitant constate que « lorsque le Hezbollah et Amal ont besoin de soutien, les mobylettes font illico leur apparition dans les rues ».
Coup de poing sur la table
Pour le professeur universitaire Karim el-Mufti, les casseurs sont bien des partisans d’Amal et du Hezbollah. « Ce grand coup d’éclat s’est déroulé aux yeux de tous, sous forme d’une attaque sauvage des installations des manifestants. Il n’est autre que le poing sur la table du Hezbollah qui tient à rappeler à l’ordre la scène libanaise en affirmant que c’est lui qui décide, et non pas les protestataires rassemblés sur les places publiques », explique le chercheur à L’Orient-Le Jour. Et de constater que ces débordements « se sont déroulés de manière concomitante avec l’apparition dans les rues de partisans d’autres formations politiques proches de Hariri et du Courant patriotique libre (de Gebran Bassil), histoire de prouver que les partis sont toujours forts sur la scène locale ».
L’essayiste et réalisateur Lokman Slim, fervent opposant au Hezbollah, rappelle pour sa part que ce n’est pas la première fois que la jeunesse de quartiers défavorisés comme Khandak el-Ghamik est utilisée par les chefs politiques. « Il ne s’agit pas de groupes hautement structurés, mais de réseautages locaux couverts par les partis », dit-il à L’OLJ, évoquant « l’affiliation passionnelle au mouvement Amal de ce quartier ». D’où l’utilisation de cette jeunesse défavorisée pour l’opération de déstabilisation sur le Ring. « Quant à l’opération qui s’est déroulée dans le centre-ville, elle était parfaitement étudiée, organisée et exécutée par un groupe paramilitaire, affirme-t-il. Elle n’a d’ailleurs duré qu’une petite demi-heure, mais peut être considérée comme un apéritif, voire une répétition d’une intervention ultérieure plus violente d’Amal et du Hezbollah. » M. Slim révèle dans ce cadre que trois casseurs au moins ont déjà été identifiés grâce aux images des événements. « Deux d’entre eux sont membres de la police du Parlement et le troisième de la Sûreté de l’État », assure-t-il.
Également contactée par L’OLJ, une source proche des milieux sécuritaires préférant garder l’anonymat accuse « le pouvoir politique et militaire de connivence avec le Hezbollah ». « Ce pouvoir a accordé au parti chiite 30 minutes pour démanteler les installations des protestataires, au cœur de Beyrouth, avant une intervention de l’armée libanaise », déplore-t-elle.
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Qui sont les jeunes hommes qui ont déferlé, mardi, sur le centre-ville de Beyrouth ? titre appotheose du fake news vraiment personne ne le sait? vraiment se sont des " jeunes gens " TOUT LE MONDE SAIT QUI SONT LES JEUNES GENS QUI ONT DEFERLE.... LES SBIRES DE BERRY ET DE NASRALLAH CE NE SONT PAS DES JEUNES GENS CE SONT DES VOYOUX A LA SOLDE DE LEADERS QUI JOUENT D'EUX COMME ILS VEULENT, LES UNS SE FONT TUES EN SYRIE POUR LES BEAUX YEUX DE L'IRAN ET DE LEUR DIEU HN ET D'AUTRES GARDENT LE PARLEMENT POUR ASSURER QUE LE PRESIDENT ACTUEL QUI N'A QUE 29 ANS DE REGNE DICTATORIAL SUR LE PARLEMENT CONSERVE POUR UN AUTRE 29 ANS SON SIEGE LE TITRE AURAIT DU ETRE DES MEMBRES DE AMAL ET DE HEZBOLLAH S'ATTAQUENT A DES MANIFESTANTS PACIFIQUES FEMME ET ENFANTS AVEC BRUTALITE A RIAD EL SOLH ( OU A LA PLACE DES MARTYRS ) CELA AURAIT ETE PLUS CORRCT DE VOTRE PART
12 h 58, le 01 novembre 2019