Empêtrée dans les querelles de ses diverses composantes autour de la discussion du budget au Parlement sur fond de spectre de crise économique, la scène politique libanaise est plus que jamais le théâtre de la guerre d’usure que se livrent l’Iran et l’Arabie saoudite dans la région et qui se répercute au quotidien sur le pays, notamment sur le bon fonctionnement de ses institutions.
Au lendemain de la visite des trois anciens présidents du Conseil Fouad Siniora, Nagib Mikati et Tammam Salam à Djeddah, dans le cadre d’une « volonté de l’Arabie de donner un coup de fouet au camp sunnite souverainiste et au Premier ministre Saad Hariri face à l’emprise du Hezbollah pro-iranien sur la scène politique libanaise et le travail de sape mené contre l’accord de Taëf », Téhéran a réagi hier par une visite surprise à Beyrouth du vice-président iranien du Conseil de la Choura, Hussein Amir Abdellahyane.
M. Abdellahyane a entamé sa tournée par un entretien à Aïn el-Tiné avec le président de la Chambre Nabih Berry, à l’issue duquel il a rappelé le « soutien de son pays aux fils du peuple libanais, à l’armée, à la résistance et au gouvernement ». « Nous aspirons au développement des relations bilatérales au plus haut niveau et la République iranienne souligne la nécessité de préserver le Liban loin de toutes les crises de la région », a-t-il affirmé.
« Certaines menaces et démarches de l’ennemi sioniste ne sont pas dans l’intérêt de la région. L’Iran et ses alliés ne permettront pas à l’entité sioniste et à l’Amérique de badiner avec la sécurité de la région », a-t-il ajouté.
En dépit du ton quelque peu violent sur certaines tournures de phrase, ces prises de position avec le ton apaisant qu’avait employé vendredi dernier le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, lors de son entretien à la chaîne al-Manar. En substance, le leader du parti chiite avait le verbe haut en couleur, mais substantiellement, son message était que l’Iran ne veut pas de guerre avec les États-Unis et était ouvert à toute solution préservant sa dignité, que le Hezbollah ne cherche à croiser le fer avec Israël et qu’il est en faveur du maintien de la stabilité sur la scène intérieure libanaise.
Selon un expert libanais, la visite du responsable ne s’inscrit pas simplement dans le cadre de la tension qui prévaut dans la région entre l’Iran d’une part et les États-Unis, Israël et les pays du Golfe d’autre part. Elles ne seraient pas motivées non plus uniquement par les sanctions US strico sensu, ou encore directement par le geste saoudien de réunir les anciens présidents du Conseil pour soutenir Saad Hariri. Le ton employé jusqu’à présent augurerait plutôt d’une volonté de discuter de dossiers névralgiques avec ses alliés libanais, et principalement le Hezbollah, dans une perspective éventuelle de négociations, explique cet expert, même s’il pense qu’il est encore trop tôt pour juger de la nature de la visite.
(Lire aussi : L’opposition estime avoir « le devoir » d’œuvrer à délimiter « les frontières » entre le Liban et le Hezbollah)
Netanyahu menace le Hezbollah
La visite de l’émissaire iranien a coïncidé hier avec de nouvelles attaques verbales du Premier ministre israélien contre le Hezbollah dans le cadre d’une rencontre avec des parlementaires français. « Il est important que la France et d’autres pays européens déclarent le Hezbollah comme organisation terroriste. Cela doit être fait immédiatement », a écrit M. Netanyahu sur son compte Twitter, en postant une photo de la réunion. « Le Hezbollah est l’organisation terroriste principale au Moyen-Orient et dans le monde, et c’est lui qui oriente les terroristes à l’intérieur des terres européennes », a-t-il noté.
Des propos qui rejoignent ceux de la porte-parole du département d’État américain Morgan Ortagus lors d’un récent entretien à la chaîne Sky News Arabia, dans lequel elle affirme que les trois responsables du Hezbollah– les députés Mohammad Raad et Amine Cherri ainsi que le responsable de la sécurité du parti, Wafic Safa – contre lesquels des sanctions avaient été prises par le Trésor américain au début du mois « contribuent à déstabiliser le gouvernement libanais ». « Ces sanctions ont visé des personnes qui soutiennent une organisation classée terroriste et qui aident l’Iran dans son attitude de déstabilisation, ce que nous ne laisserons pas faire », a-t-elle ajouté, tout en précisant que le secrétaire d’État US, Mike Pompeo, était attaché à la préservation de la stabilité et de la sécurité du Liban.
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commentaires (4)
CEUX-CI POUR L,ARABIE ET CEUX-LA POUR L,IRAN... ET D,AUTRES POUR D,AUTRES PAYS. QUI EST LIBANAIS DANS CE PAYS QU,ON APPELLE LE LIBAN ?
LA LIBRE EXPRESSION
14 h 24, le 18 juillet 2019