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Santé - La parole aux médecins

Stress et obésité : un lien inextricable

Selon des études et des analyses scientifiques, le stress joue un rôle dans le développement et le maintien de l’obésité. Photo Bigstock

Le stress chronique et l’obésité sont deux problèmes majeurs auxquels est confrontée la société de nos jours. Deux problèmes qu’on rencontre d’ailleurs autant chez les hommes que chez les femmes, quelle que soit la tranche d’âge à laquelle ils appartiennent, augmentant ainsi les risques et les coûts de santé.

Mais qu’est-ce qui entraîne l’autre? Est-ce le stress qui cause cette épidémie d’obésité à l’échelle mondiale? Ou est-ce l’obésité qui augmente le stress chronique chez les gens ?

Des études et des analyses scientifiques ont clairement souligné une corrélation entre le stress chronique et l’obésité. Aussi, le stress joue un rôle dans le développement et le maintien de l’obésité à plusieurs niveaux. Et celle-ci entraîne une augmentation considérable du stress chronique puisque l’obésité est socialement stigmatisée.

Ne sommes-nous pas stressés lorsque nous prenons quelques kilos indésirables et que notre jeans devient serré ? Ne sommes-nous pas stressés par la stigmatisation sociale de l’obésité, principalement par le monde numérique et les médias sociaux, lorsqu’en faisant défiler l’écran, nous nous retrouvons bombardés par des corps parfaitement façonnés ? Nombreux sont les jeunes et moins jeunes, hommes et femmes, à être stressés par ce phénomène. Au lieu de chercher de l’aide, ils s’enlisent de plus en plus dans cet éternel cercle vicieux. Il est donc temps de hausser la voix et de briser le tandem obésité-stress. Pour ce faire, il est crucial de mettre l’accent sur un mode de vie sain pour une meilleure santé. Ce n’est pas uniquement une question d’alimentation, mais d’un ensemble de facteurs qui forment un grand puzzle : type d’aliments, activité physique, sommeil, stress, tabagisme… Autant de facteurs sur lesquels il convient de se concentrer.

Mais avant de se pencher sur cette corrélation entre l’obésité et le stress chronique, il convient de définir chacun de ces deux termes.

Le stress chronique est une réponse biologique à des situations exigeantes. Elle pousse l’organisme à produire des hormones, comme le cortisol et l’adrénaline, qui aident le corps à agir pour se défendre ou au contraire lâcher prise, en augmentant à titre d’exemple la fréquence du rythme cardiaque et celle de la respiration. Le stress chronique peut être causé par de mauvaises relations interpersonnelles, par le travail ou au contraire le chômage, par une mauvaise estime de soi, un niveau socioéconomique faible… Plus encore, ce stress chronique affecte l’ensemble de l’organisme. Sur une longue durée de temps, il entraîne l’apparition de plusieurs troubles physiques ou mentaux comme le diabète, des maladies cardiovasculaires, une hypertension artérielle, une dépression, une insomnie, une déficience immunitaire, des troubles sexuels, des troubles gastriques, une obésité…


(Pour mémoire : Diabète chez les femmes : le stress au travail dans la ligne de mire des chercheurs)

Vulnérabilité aux processus émotionnels

Oui, le stress chronique a un rapport direct avec l’obésité, celle-ci se définissant par un excès de graisse dans le corps. Selon l’Organisation mondiale de la santé, cette maladie a presque triplé depuis 1975 à l’échelle internationale. En fait, le stress chronique affecte les processus cognitifs tels que la fonction exécutive et l’autorégulation. Le stress peut également limiter la maîtrise des émotions cognitives, rendant ainsi les individus encore plus vulnérables aux processus émotionnels qui déclenchent une alimentation malsaine. Par conséquent, le stress peut conduire à l’obésité en retardant les processus cognitifs nécessaires à l’autorégulation. Nous mangeons simplement sans pouvoir arrêter, en optant pour des aliments riches en calories, graisses ou sucres. Ceux-ci sont connus dans la littérature scientifique pour être des « aliments de réconfort ». Les individus peuvent en fait manger plus ou différemment lorsqu’ils sont sous stress, avec un penchant pour les aliments savoureux riches en sucre, matières grasses et calories.

Le stress chronique a également une incidence sur le comportement. Aussi, on a tendance à diminuer son activité physique et à favoriser un mode de vie sédentaire, ce qui se traduit par une prise de poids. Plus encore, le fait de réduire sa durée de sommeil entraîne une obésité due aux dérèglements hormonaux et physiologiques.

De plus en plus d’études internationales mettent l’accent sur les bénéfices du sommeil et les risques de santé que peuvent entraîner des habitudes malsaines de sommeil. Il s’agit d’une relation en U : le fait de dormir moins de quatre heures ou plus de onze heures est corrélé à une augmentation des maladies mentales. La durée requise est entre sept et huit heures de sommeil de qualité.

Plus encore, le stress déclenche des changements physiologiques dans l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (axe qui relie les systèmes nerveux central et endocrinien et contrôle les réponses au stress) et le mécanisme de récompense dans le cerveau. En fait, le stress chronique augmente la libération de cortisol, une hormone du stress. Le cortisol favorise la consommation et l’envie d’aliments de réconfort en réduisant la sensibilité du cerveau aux hormones de suppression de l’appétit. De plus, le cortisol favorise le dépôt de graisse dans la région abdominale.


(Pour mémoire : Obésité, sous-alimentation, climat : trois maux pour une même menace)

Stigmatisation de l’obésité

Par ailleurs, le stress chronique peut stimuler la production des hormones qui régulent l’appétit et des peptides comme la leptine (qui supprime l’appétit), la ghréline et la neuropeptide Y (qui augmentent l’appétit). Le stress peut ainsi entraîner une obésité en augmentant sans cesse la leptine, causant ainsi sur le long terme une résistance à la leptine et une obésité. Cette hypothèse reste toutefois théorique et nécessite une plus grande recherche scientifique. Il n’en reste pas moins que certaines études ont montré que le stress chronique peut accroître les niveaux de ghréline et de neuropeptide Y, augmentant par conséquent l’appétit et l’apport alimentaire, et de ce fait l’apport calorique et l’obésité.

Enfin, l’obésité en soi peut générer un état de stress en raison de la forte stigmatisation pondérale dans notre société. L’obésité est liée à une faible estime de soi, à des troubles alimentaires, à la marginalisation, à un bas revenu, au chômage, à l’isolement, à une attitude négative, au suicide, à la dépression, à l’anxiété, à une mauvaise image corporelle, ainsi qu’à plusieurs autres troubles émotionnels et physiologiques. Et certainement, ces résultats augmenteront l’attrait pour des « aliments de réconfort » et conduiront à une prise de poids de plus en plus importante due aux graisses et à un stress chronique accru. Un cercle vicieux fermé qui doit certainement être brisé par des professionnels pour sauver la santé physique et mentale des gens. Une main n’applaudit jamais seule. Il s’agit de tout un système qui relie le patient à l’équipe de soins, dans un processus de guérison visant à lutter contre la boucle fermée formée par le stress et l’obésité.

Unissons nos voix pour sensibiliser l’opinion à cet enjeu essentiel dans nos sociétés.

Le Dr Rony ABBOUD est médecin nutritionniste.


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