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Les collections institutionnalisées - Collections

Les trois mots magiques de la Saradar Collection : préserver, réfléchir, partager

I 260 œuvres, tous médiums confondus, voilà ce que comprend la « Saradar Collection », accessible jusqu’à ce jour sur un site web (wwwsaradarcollection.com). Comment est-elle née et comment fonctionne-t-elle ? Lyna Kiryakos Chidiac, membre du comité et directrice générale du projet, en livre tous les secrets.


Huguette Caland, « Kaslik », 1968, huile sur lin, 102x102 cm.

Le pourquoi

C’est en 2012 que le projet, initié par Mario Saradar et financé par la famille Saradar, prend son départ. Cette année-là, le musée Sursock fermait ses portes pour cause de rénovation, et aucun projet muséal n’avait été encore annoncé. Ce projet venait donc répondre à un manque sur la scène artistique libanaise, et le contexte de l’époque allait dans le sens d’une telle initiative. Parallèlement, le marché de l’art à l’étranger connaissait une dynamique en hausse, et les institutions ainsi que les musées étrangers (du Centre Pompidou au MOMA, en passant par la Tate) s’intéressaient aux artistes libanais. C’était l’époque où des maisons comme Sotheby’s ou Christie’s prenaient de l’ampleur, le marché était en ébullition. Pour donner à ces artistes en manque de repère une plateforme comme une sorte d’ancrage pour exister, Mario Saradar décide de former une collection institutionnelle qu’il réfléchit comme une démarche culturelle. Une fois le projet initié, il prendra ses distances pour le laisser voguer dans un fonctionnement maîtrisé, et pour cela, il était nécessaire de mettre en place un comité d’experts. C’est ainsi que se sont retrouvés autour d’une table : Joe Tarrab, Gregory Buchakjian et des expertes étrangères qui ont le savoir-faire pour former des collections, telles que Catherine David, Jessica Morgan (de la Tate). Pour avoir toutes les deux travaillé sur les acquisitions du Moyen-Orient, elles connaissaient bien la scène contemporaine locale. Sans oublier Sandra Dagher, directrice artistique. Ce comité a été le point de départ et la crédibilité du projet. Après six mois de réunions et d’échanges, le comité se met d’accord sur la forme : une collection privée qui va mettre en avant les principaux moments de l’histoire de l’art du Liban.

Le comment

C’est un comité consultatif et non décisionnel qui se réunit deux fois par an. Une première rencontre sert à évaluer les lacunes et à mettre en place une stratégie, et une seconde réunion sert à faire les choix, proposer des directions curatoriales, des propositions d’acquisition, et prendre les décisions finales. Chaque année, afin de redynamiser les échanges, un « guest member » est invité à donner son avis. C’est ainsi que tour à tour Saleh Barakat, Christine Tohmé, Tarek Abou el-Fetouh et Achim Borchardt-Hume ont partagé leurs commentaires et donné un avis par rapport à la collection en général et au fonctionnement du projet en particulier. Afin d’affiner les visions et réorienter les choix.

La mission

1- Préservation du patrimoine. Le souci majeur de Mario Saradar était de préserver les œuvres dans leur pays d’origine. L’année 2012 assistait à une fuite vers l’étranger du patrimoine artistique libanais. Cette collection s’intéresse principalement aux artistes libanais de la période moderne et contemporaine (début du siècle) ou à des artistes étrangers qui ont travaillé sur des thématiques purement libanaises, comme Dia Azzawi, qui a réalisé une série de lithographies sur le massacre de Sabra et Chatila, ou Martin Giesen qu’on ne présente plus, mais 90 pour cent de la collection est constituée d’artistes libanais dans tous les domaines (sculpture, photographie, vidéo, installation, céramique). La collection présente aussi des dessins qui communiquent avec de grandes œuvres. Quand on remonte au début du siècle dans la période moderne, il est souvent d’usage de s’adresser aux héritiers ou de réunir un campus d’œuvres.

2- Développer un savoir. Qu’il s’agisse d’écrits concernant les artistes ou de simples documentations, le comité de recherche réalise qu’une grande lacune reste à combler. En partant de cette collection pour démarrer des chantiers de recherches, il a réussi à retrouver plus de 500 textes écrits, que ce soit des articles de fonds ou des commentaires de critiques d’art, en rapport avec les artistes de la collection. Saradar Collection Essays est une autre démarche qui consiste à commissionner des écrivains ou des commissaires qui interviennent sur la collection, proposent des thématiques d’essais et présentent des textes. Sans omettre l’édition, une fois par an, d’un livre autour d’un artiste de la collection et sur lequel il n’y a pas eu assez de références. Une série de vidéos Works on Works est également développée, où les artistes sont invités à présenter leurs démarches artistiques et à les défendre devant une caméra vidéo.

3- Partager ! Voilà l’ultime mission. Toute la collection mise en ligne sera bientôt à la portée du public, installée dans un espace ouvert. Tel est le but de la Saradar Collection. Il suffit d’un clic pour remonter le temps, se promener à travers les toiles, les sculptures et les installations, faire un bain de culture, plonger dans les biographies d’Etel Adnan, de Walid Raad, Ali Cherri, Akram Zaatari et tant d’autres, consulter les archives des articles et des écrits qui les concernent, décrypter leur art, le comparer et s’en réjouir. Un seul clic pour apprendre ce que jusqu’à ce jour vous ignoriez (peut-être), pour pénétrer les méandres des couleurs, caresser des yeux la pierre et la terre glaise aux formes généreuses, écouter les artistes parler de leur passion, et un clic pour ne pas oublier qu’ils sont ce qu’on a de plus cher et de plus valeureux, notre patrimoine culturel et artistique. Et que serait un pays sans sa culture ?

Le pourquoiC’est en 2012 que le projet, initié par Mario Saradar et financé par la famille Saradar, prend son départ. Cette année-là, le musée Sursock fermait ses portes pour cause de rénovation, et aucun projet muséal n’avait été encore annoncé. Ce projet venait donc répondre à un manque sur la scène artistique libanaise, et le contexte de l’époque allait dans le sens...

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