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Moyen Orient et Monde - Plan de paix de Jared Kushner

L’Égypte, l’intermédiaire indispensable

Présentant l’avantage de parler à l’ensemble des parties, Le Caire devrait aussi chercher à ménager sa relation avec Washington lors de la conférence.

Le gendre et conseiller du président américain, Jared Kushner, et le président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, le 23 août 2017 au Caire. Handout/AFP/Getty Images

La paix n’est pas possible sans l’Égypte. Médiatrice-clé au cours des quatre dernières décennies sur le dossier israélo-palestinien, sa présence est attendue les 25 et 26 juin lors de la conférence de Manama. Organisé par Washington, ce rendez-vous a pour objectif de révéler la partie économique du plan de paix avancé par le conseiller et gendre de Donald Trump, Jared Kushner.

Alors que des rumeurs faisaient état de pressions palestiniennes pour qu’ils ne s’y rendent pas, les Égyptiens ont confirmé leur présence, a rapporté la Maison-Blanche la semaine dernière. L’Égypte présente l’avantage de pouvoir parler à l’ensemble des parties alors qu’elle est le seul pays de la région – avec la Jordanie – à avoir conclu un traité de paix avec l’État hébreu, en 1979. Un avantage qui lui a permis d’entretenir des liens avec tous les acteurs au conflit et de détenir une certaine légitimité et crédibilité à leur égard. En ce sens, Le Caire « a toujours aidé à mettre en place des cessez-le-feu pendant les hostilités, en particulier pendant cette turbulente année passée », rappelle Mirette F. Mabrouk, directrice du programme sur l’Égypte au Middle East Institute, interrogée par L’Orient-Le Jour. « Ces cessez-le-feu ont permis de sauver des vies et, peut-être plus important encore, d’empêcher possiblement une invasion terrestre israélienne », note-t-elle, alors que l’aspect sécuritaire concerne aussi directement l’Égypte qui partage une frontière avec Israël et la bande de Gaza. L’année 2018 a été fortement marquée par les manifestations palestiniennes dans le cadre de la « Marche du retour » lancée le 30 mars et devant s’étendre jusqu’au 15 mai, soit le 70e anniversaire de la Nakba (« catastrophe » en arabe). Le mouvement s’est toutefois prolongé les mois suivants, donnant lieu à de violents affrontements entre Palestiniens et forces israéliennes. L’Égypte, de pair avec les Nations unies, est intervenue à plusieurs reprises afin de favoriser l’instauration de cessez-le-feu tandis que le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a effectué le déplacement au Caire au mois de mai pour s’entretenir avec le président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, au sujet d’une trêve à Gaza. « Tout ce qui se passera à Gaza sera fait avec la médiation de l’Égypte », avait ensuite confirmé le ministre israélien des Finances, Moshe Kahlon.


(Lire aussi : Sommet de Manama : Le Qatar aura aussi son mot à dire...)



Tâche difficile

Une position de médiateur que Le Caire devrait à nouveau adopter lors du sommet de Manama. Alors que les représentants palestiniens ont fait savoir qu’ils comptaient boycotter l’événement, M. Sissi a tenu à souligner au début du mois que « l’Égypte n’acceptera rien de ce que les Palestiniens ne veulent pas ». « C’est un geste sage, estime Mirette F. Mabrouk. Outre le fait que la question palestinienne revêt une importance énorme dans le monde arabe, toute violence à Gaza a tendance à se répercuter sur le Sinaï en Égypte », souligne-t-elle. Le Caire va toutefois devoir naviguer habilement entre les parties au cours du sommet afin de ménager ses liens avec chacune d’entre elles, à commencer par Washington.

Le président américain, Donald Trump, a fait savoir à plusieurs reprises qu’il apprécie son homologue égyptien et sa manière de gouverner alors que ce dernier table sur une approche autoritaire et répressive pour diriger le pays. En ce sens, « nous travaillons ensemble et je pense qu’il n’y a jamais eu une meilleure relation entre l’Égypte et les États-Unis qu’aujourd’hui », a déclaré le locataire de la Maison-Blanche suite à une visite du président Sissi aux États-Unis en avril dernier pour discuter de la coopération sur les plans militaire et commercial entre leurs deux pays. Jared Kushner espère pouvoir s’appuyer sur ses liens pour amener l’Égypte à encourager l’adoption de son plan de paix. Le gendre du président américain, accompagné de l’envoyé des États-Unis pour le Moyen-Orient, Jason Greenblatt, s’était déjà rendu au Caire en juin 2018 où il avait abordé avec M. Sissi « la nécessité de faciliter les secours humanitaires à Gaza et les efforts de l’administration Trump pour faciliter la paix entre Israéliens et Palestiniens », selon la Maison-Blanche. Faciliter un arrangement sur le dossier israélo-palestinien s’avère toutefois difficile pour le moment alors que le contenu exact du plan de paix de Jared Kushner est encore inconnu et que le camp palestinien se fait de plus en plus méfiant à l’égard de l’administration Trump.


(Lire aussi : Plan de paix de Kushner : Pourquoi la conférence a-t-elle lieu à Bahreïn ?)



La reconnaissance de Jérusalem en tant que capitale officielle de l’État hébreu et l’annonce du déménagement de l’ambassade américaine en décembre 2017 ont été perçues comme un coup fatal au processus de paix par l’Autorité palestinienne – qui a depuis rompu ses liens diplomatiques avec Washington. Si l’Égypte est toutefois en mesure de ramener les parties autour d’une même table, elle va devoir clairement se démarquer de l’axe émirato-saoudien perçu comme trop proche de Washington et des Israéliens par la partie palestinienne. Au-delà de l’équilibre à maintenir entre ses relations avec ses alliés, « l’Égypte pourrait suivre l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, dans la mesure où elle n’aurait pas à supporter de coûts financiers ou militaires », nuance Walid Kazziha, professeur de sciences politiques à l’Université américaine du Caire. « Ce régime est prudent et refuse de prendre des risques coûteux », poursuit-il, alors qu’il cherche également à protéger ses intérêts. Autant d’éléments qui devraient influencer la posture de l’Égypte à Manama alors que le plan économique de Jared Kushner doit comporter une « combinaison de subventions, de prêts à faible taux d’intérêt et de capitaux privés », a déclaré un responsable américain à la presse en mai dernier.


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