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Liban - Droits de l’homme

Le Liban perd des places en matière de liberté d’expression, d’indépendance judiciaire et de lutte contre les discriminations

L’association Alef-Act for Human Rights a publié hier son rapport 2018 sur les droits de l’homme, saluant toutefois quelques initiatives positives.

Lors de la conférence de presse, Élie Abou Aoun et Georges Ghali, présentant le rapport d’Alef à la presse. Photo AMH

Le Liban n’a fait aucun progrès notable dans les grands dossiers des droits de l’homme durant l’année 2018. Il est même en recul dans nombre de domaines, celui de la liberté d’expression, de l’indépendance du pouvoir judiciaire, de la discrimination basée sur le genre, notamment. Et il peine à répondre aux questions de la communauté internationale, liées à ses manquements. C’est ce qu’indique le rapport annuel publié hier par l’association Alef-Act for Human Rights, lors d’une conférence de presse au Club de la presse, à Furn el-Chebback, qui dénonce « l’absence de volonté politique et de capacité » pour améliorer la législation, appliquer les lois, respecter les obligations internationales du pays et initier le changement.

Le gouvernement libanais a toutefois pris « quelques initiatives positives visant à promouvoir et à respecter les droits de l’homme », tient à noter Alef, saluant à ce titre « le bon déroulement des législatives selon le mode proportionnel », qui a vu une participation élevée de femmes, « l’émergence d’un débat sur leur participation à la vie politique » et « l’attribution à une femme d’un ministère régalien pour la deuxième fois dans l’histoire du pays » dans le gouvernement post-législatives. Il reste toutefois beaucoup à faire dans ce domaine pour une meilleure parité, car il n’y a eu que « peu d’élues », seulement 6 femmes au Parlement et 4 au gouvernement, constate l’association, saluant « le courage » des femmes libanaises.


(Pour mémoire : Liberté d'expression, torture, discriminations : Amnesty épingle le Liban)


105e sur 137 pays
Tour à tour, le secrétaire général d’Alef, Élie Abou Aoun, et le directeur exécutif de l’association, George Ghali, ont présenté un état des lieux de la situation des droits de l’homme au Liban en 2018, qui se veut « plus une énumération des réalités qu’une analyse ». Les questions « des arrestations arbitraires et de l’absence de procès équitables » posent toujours problème, constate d’abord le secrétaire général, ajoutant que « ces pratiques existent depuis toujours » et que 2018 n’a vu « aucune évolution en matière d’indépendance de la justice ». Le pays du Cèdre a même été rétrogradé « à la 105e place sur 137 pays en 2018 » en matière d’indépendance de la justice par le Global Competitive Index, alors qu’en 2017, il occupait la 101e position sur 138 pays. « Il est aberrant que le pouvoir exécutif se charge de la nomination et du transfert de juges. Il est aussi désolant que le pouvoir judiciaire ne soit pas tenu responsable, en cas de corruption confirmée », regrette M. Abou Aoun, invitant le nouveau gouvernement à se pencher sur la séparation entre les pouvoirs exécutif et judiciaire. Et de dénoncer par le fait même « la persistance des tribunaux d’exception », plus particulièrement le tribunal militaire et la Cour de justice, qui ne donnent pas accès à un procès équitable. « Les prérogatives du tribunal militaire doivent être limitées aux affaires militaires et concernant les militaires », martèle-t-il. « Or en 2018, 544 civils étaient condamnés par contumace par ce tribunal, parmi lesquels 70 pour des crimes liés à la drogue », note le rapport.

Alef fait de plus part de ses craintes liées à « la pratique constante de la torture » au Liban, plus particulièrement « lors des enquêtes préliminaires, envers les collectivités les plus vulnérables ». « Les services de sécurité impliqués dans de telles pratiques n’ont jamais eu à répondre de leurs actes. Et qui plus est, la nouvelle loi criminalisant la torture n’est pas mise en application par la justice », dénonce le responsable.


(Pour mémoire : HRW publie un nouveau rapport accablant sur le Liban)


Arrêtés ou convoqués pour avoir exprimé leurs opinions
Également montrée du doigt par l’association de défense des droits humains, l’attitude des autorités libanaises vis-à-vis du dossier des réfugiés syriens, privilégiant la thèse du complot, de même que « les discours populistes qui attisent la haine envers les réfugiés ». Alef réitère son appel au gouvernement, l’invitant « à une approche plus scientifique du problème, pour accorder la protection nécessaire aux réfugiés syriens ». Il est nécessaire « de catégoriser » les ressortissants syriens présents au Liban entre réfugiés, déplacés économiques et travailleurs. Une fois réalisée, l’initiative devrait permettre aux autorités de « mettre en place une stratégie » à l’égard des réfugiés. « Car le pays du Cèdre doit remplir ses obligations envers les réfugiés, même s’il n’est pas signataire de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés », assure Élie Abou Aoun.

La situation des travailleurs migrants, l’accès à la santé et à l’éducation préoccupent tout autant l’association. À titre d’exemple, à l’école primaire, 12 % des enfants (libanais et non-libanais) ne sont pas scolarisés. Un chiffre qui grimpe à 34 % dans les classes les plus élevées du secondaire. Sans oublier que la moitié de la population libanaise n’a pas accès à une couverture médicale ni même aux soins d’urgence.

C’est un « important recul » que subit aussi « la liberté d’opinion et d’expression », constate Alef, faisant état « d’une recrudescence du nombre de personnes convoquées par des services sécuritaires ou par la justice pour des raisons politiques ou sociales ». « Rien qu’en 2018, 28 personnes ont été arrêtées ou convoquées pour avoir exprimé leurs opinions, le nombre de cas s’élevant au total à 2016, depuis trois ans. ». Parmi ces personnes, « deux militants des droits de l’homme, et notamment le responsable du CLDH, Wadih Asmar », révèle pour sa part Georges Ghali. « Des journalistes convoqués par des services de sécurité ont même été forcés de signer des engagements écrits », ajoute le directeur exécutif, dénonçant l’atteinte à la liberté de la presse. Le plus inquiétant, relève-t-il, c’est que « cette affaire figure à l’ordre du jour des questions des rapporteurs spéciaux (ONU) et que le Liban n’y a toujours pas répondu ». « Sur cinq communications dues aux rapporteurs spéciaux, conclut-il, le pays n’a répondu d’ailleurs qu’à deux questions. »


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Le Liban n’a fait aucun progrès notable dans les grands dossiers des droits de l’homme durant l’année 2018. Il est même en recul dans nombre de domaines, celui de la liberté d’expression, de l’indépendance du pouvoir judiciaire, de la discrimination basée sur le genre, notamment. Et il peine à répondre aux questions de la communauté internationale, liées à ses manquements....

commentaires (3)

Mais la France aussi pardieu ! Au fait quelle est la place de israel pays usurpateur ? On ne nous le dit jamais ça. C'est pas un pays comme les autres ?????

FRIK-A-FRAK

17 h 11, le 11 avril 2019

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Commentaires (3)

  • Mais la France aussi pardieu ! Au fait quelle est la place de israel pays usurpateur ? On ne nous le dit jamais ça. C'est pas un pays comme les autres ?????

    FRIK-A-FRAK

    17 h 11, le 11 avril 2019

  • MALHEUREUSEMENT ON LE CONSTATE TOUS LES JOURS.

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 33, le 11 avril 2019

  • Pas trop étonné. Cela dit priorité aux réformes et les libertés vont suivre logiquement, connaissant bien notre pays.

    Sarkis Serge Tateossian

    01 h 11, le 11 avril 2019

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