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Nos Lecteurs ont la Parole - par Amine ISSA

Syrie, la seconde vie programmée des barbares

L’apparence et les propos des femmes sorties du dernier bastion de l’État islamique, Baghouz, au nord-est de la Syrie. Silhouettes informes plus noires que les plus effrayantes ténèbres et des invectives à ceux qui les emmènent dans des camps de transition. Elles revendiquent le paradis du califat et prophétisent une guerre éternelle hors de ses frontières désormais brouillées.

Ces femmes ne souhaitent aucune rédemption, ni même les jardins de Dieu, elles ne veulent plus le martyre qui les y mène, mais la mort de l’humanité ! Celle qui est en eux s’est déjà éteinte. Elles sont prêtes à mourir sans contrepartie de l’au-delà, du moment qu’elles donnent la mort.

L’islam le plus obscur et violent n’est plus qu’un leitmotiv vide de sens, tel le nihilisme, un mot qui ne peut en être « un » puisqu’en définitive il ne reconnaît plus rien, il ne signifie que le « rien ».

Tel le communisme, devenu la politique du néant dans les goulags et la famine organisée. Tel le national-socialisme devenu la « solution finale » qui, en ne s’accomplissant pas, mena Hitler au suicide.

Les tribus primitives, quand elles sacrifiaient un humain, voulaient amadouer un Dieu-Nature imprévisible dans son déchaînement. Mais jamais le meurtre ne prétendit à l’annihilation, même du pire ennemi. Ce sont des tribus américaines qui furent annihilées dans le plus grand massacre organisé de l’humanité par les colons venus d’Europe.

Les deux grands tueurs en Syrie sont le salafisme et la dictature. Aussi différents dans leur habillage doctrinal, pour l’un religieux pour l’autre politique, ils sont tous les deux essentiellement utilitaires, dominateurs.

Malgré leurs cruautés, les tribus primitives accordaient à l’esprit une fonction transcendantale qui les

élevait au-delà de leurs contingences. Le souffle des religions monothéistes, libérateur des idoles propitiatoires, a disparu avec la résurrection des idoles par les clergés. L’esprit se retrouvait confiné chez une poignée de croyants et d’hommes de religion.

Puis vinrent la modernité et l’humanisme ensemble. L’esprit délesté de la peur de la nature proposa de transcender l’individu dans un mouvement perpétuel qui accompagne un monde qu’on savait désormais dynamique. Transcender l’individu vers un point le plus subtil « l’homme sans qualité » de Musil.

Il fallait de l’ordre et des lois pour gérer la cité des individus. Néanmoins sans justice, qui est une idée que l’esprit imagine, les lois privilégieraient les plus forts. Un travers de la raison, réduire tout phénomène à une équation, transforma les idées en idéologies. Celles-ci sont mathématiques, figées, absolues, elles se libèrent de l’esprit en mouvement qui est à leur origine. Elles ne sont plus idées, mais moyens, utilités, pour dominer.

Ainsi il en est du salafisme et de la dictature en Syrie. Domination par l’humiliation, l’appauvrissement, la confiscation de liberté, l’abêtissement par l’instruction sans éducation aux valeurs humaines, la répression banalisée. La mort par action ou par défaut aussi parce que la vie de l’individu n’a pas de sens, il n’est qu’un élément interchangeable d’une mécanique dont il ne touche à aucun levier. Sauf que le dominé même s’il se meut encore et se reproduit est également mort-à-lui-même et c’est à ce stade de déshumanisation qu’il devient le plus dangereux.

Telles ces femmes que je décrivais qui n’engendreront que des morts-à-eux-mêmes, des meurtriers à venir qui s’étonneront si on le leur reproche.

Telle est la seule victoire que peuvent revendiquer les pays du Golfe, l’Iran, les milices chiites, la Turquie, Israël en spectateur ravi et l’Occident. La guerre des canonnières est peut-être en voie de résolution ; la revanche sans commune mesure avec la guerre va commencer. Seule l’empêchera la reconsidération de l’individu en Syrie.

Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour.

L’apparence et les propos des femmes sorties du dernier bastion de l’État islamique, Baghouz, au nord-est de la Syrie. Silhouettes informes plus noires que les plus effrayantes ténèbres et des invectives à ceux qui les emmènent dans des camps de transition. Elles revendiquent le paradis du califat et prophétisent une guerre éternelle hors de ses frontières désormais brouillées. Ces...

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