Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, entouré du sénateur US Lindsey Graham (d) et de l'ambassadeur américain en Israël, David Friedman, le 11 mars 2019 lors d'une visite sur le plateau occupé du Golan, à la frontière avec la Syrie. Photo REUTERS/Ronen Zvulun
Israël a affirmé mercredi que le Hezbollah s'implantait secrètement sur le plateau syrien occupé du Golan afin de mener à l'avenir des opérations contre l'Etat hébreu. L'unité, qui selon Tel Aviv se fait appeler "Dossier du Golan", serait menée par des responsables du parti pro-iranien basés à Beyrouth, et le président syrien, Bachar el-Assad, allié au Hezbollah, n'en aurait pas été tenu informé, toujours selon des sources israéliennes citée par le quotidien Haaretz.
Sur son compte Twitter, le porte-parole arabophone de l'armée israélienne, Avichay Adraee, a annoncé mercredi matin que "l'armée israélienne a mis au jour une tentative de l'axe chiite d'implanter une unité secrète qui doit être dotée de capacités plus grandes que par le passé afin d'opérer contre Israël à partir de la partie syrienne du plateau du Golan". Avichay Adraee n'explique pas ce qu'il entend par le terme "axe chiite" et ne va pas jusqu'à citer l'Iran, grand allié et soutien du Hezbollah.
Le Hezbollah était déjà présent dans le Golan syrien sous la forme d'un "commandement sud" fort de quelques dizaines de membres assistant les forces syriennes, avance l'armée israélienne.
Contacté par L'Orient-Le Jour, le Hezbollah n'était pas disponible dans l'immédiat pour commenter ces informations.
(Lire aussi : Washington abandonne les termes d'"occupation israélienne" pour le Golan)
"Après la perte du Hezbollah de la légitimité de sa présence officielle en Syrie avec la fin du conflit interne, le commandement de l'axe chiite a décidé de relancer et repositionner une unité secrète capable d'opérer contre Israël, en cas de besoin", écrit également le porte-parole israélien, en publiant avec son message une carte censée représenter l"infrastructure" de l'unité "Dossier du Golan", et qui serait répartie entre Beyrouth, Damas, et la partie syrienne du plateau occupé du Golan.
Le porte-parole explique que cette unité secrète repose sur des infrastructures du Hezbollah au Liban et en Syrie, notamment au sein d'unités de l'armée syrienne et parmi des habitants syriens de la portion du plateau du Golan situé en Syrie.
Dans une vidéo de mauvaise qualité publiée par Avichay Adraee, on peut voir un individu marcher vers une habitation de fortune qui et censée être située sur le plateau occupé du Golan.
Selon le quotidien israélien Haaretz qui cite des responsables anonyme de la Défense israélienne, le Hezbollah a "recruté des dizaines, voire des centaines d'hommes, afin de combattre Israël à partir de villages syriens situés sur le plateau du Golan". Ces hommes, "qui bénéficient d'un salaire mensuel, sont armés d'explosifs, d'armes légères, et de missiles anti-chars".
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"Abou Hussein Sajed"
Avichay Adraee affirme ensuite, photo à l'appui, qu'un responsable du Hezbollah, Ali Moussa Abbas Dakdouk, alias "Abou Hussein Sajed", dirige le "Dossier du Golan". Le Libanais Ali Moussa Dakdouk avait été capturé en 2007 en Irak par l'armée américaine qui le soupçonne d'implication dans une attaque ayant coûté la vie à cinq soldats américains la même année. Les Etats-Unis présentaient Ali Moussa Dakdouk comme un agent du Hezbollah venu en Irak entraîner des insurgés avec l'aide de la force Qods, unité d'élite iranienne. Remis en décembre 2011 aux autorités irakiennes par l'armée américaine qui achevait alors son retrait d'Irak, il avait été libéré en 2012 par la justice irakienne faute de preuves.
C'est à l'été 2018 qu'il est envoyé en Syrie afin de mettre sur pied le "Dossier du Golan", selon l'armée israélienne.
Un soldat américain devant un portait de Ali Moussa Dakdouk, un cadre militaire du Hezbollah, qui avait été détenu par les forces américaines en Irak en 2007.
Photo d'archives Reuters
Concrètement, l'Etat hébreu accuse cette unité secrète de "collecter des informations sur des positions tenues par l'armée syrienne et des éléments du Hezbollah en charge du front sud". Il s'attend à ce que "ces positions soient utilisées par l'unité du +Dossier du Golan+, à l'insu de l'armée syrienne".
Même son de cloche de la part du Haaretz, qui affirme, en citant des sources des services de renseignement israéliens, que le président syrien, Bachar el-Assad, n'était pas au courant de l'existence de l'unité "Dossier du Golan".
Le réseau est "dans une phase initiale d'établissement et de recrutement", et il "n'est pas encore opérationnel", ajoute l'armée israélienne, citée par l'AFP.
Selon Avichay Adraee, plusieurs membres de cette unité secrète ont opéré par le passé sous le commandement de Samir Kantar et Jihad Moughniyé, deux responsables militaires du Hezbollah tués en 2015 dans des opérations vraisemblablement menées par Israël.
Il explique que l'unité secrète tente de se positionner face à Israël sous la bannière de partis et d'organisations syriennes, notamment la branche armée du Parti social nationaliste syrien (PSNS), "Les aigles de la Zawba'a". Quinze membre de cette milice seraient ainsi présents sur le plateau du Golan en tant qu'opérateurs de l'unité secrète.
Le porte-parole arabophone de l'armée israélienne conclut ses messages en affirmant que "le Hezbollah perd le contrôle sur ses membres qui tentent de mettre en place des stratagèmes et qui mènent des aventures mal planifiées qui menacent l'organisation".
"Nous avons un message clair: nous ne permettrons pas au Hezbollah d'établir dans le Golan une structure terroriste capable de frapper des civils israéliens", a pour sa part prévenu sur Twitter un des porte-parole de l'armée israélienne, le lieutenant-colonel Jonathan Conricus. "Nous tenons le régime syrien pour responsable de tout ce qui se passe en Syrie et qui vise Israël", a-t-il prévenu.
L'opération de communication israélienne, préférée à l'option militaire, a été largement interprétée par les commentateurs comme un avertissement à Damas, voire à la Russie, pour qu'ils interviennent avant qu'Israël ne passe à l'action, souligne l'AFP.Israël, officiellement en état de guerre avec la Syrie, occupe depuis 1967 la majeure partie du plateau du Golan, qu'elle a annexée en 1981. Cette annexion n'a jamais été reconnue par la communauté internationale.
Depuis plusieurs mois, Israël fait monter la pression contre le Hezbollah. En décembre dernier, l'armée israélienne a lancé l'opération "Bouclier du Nord"pour détruire les tunnels détectés du côté israélien de la frontière avec le Liban, longue de 80 km. Israël affirme que ces "tunnels d'attaque" sont un moyen pour les combattants du Hezbollah de s'infiltrer sur son territoire en cas de guerre. Les tunnels devaient servir au Hezbollah à enlever ou assassiner des soldats ou des civils israéliens, et à s'emparer d'une frange du territoire israélien en cas d'hostilités, affirme Israël.
Avant cette opération, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, avait également affirmé fin 2018 que le Hezbollah utilisait des sites proches de l'Aéroport international de Beyrouth comme "caches d'armes secrètes". Lors d'un discours devant l'Assemblée générale de l'ONU fin septembre, le Premier ministre israélien avait présenté une carte du sud de Beyrouth, montrant trois "sites secrets" présumés, dans lesquels le parti chiite transformerait des missiles de précision, sur ordre de l'Iran.
En outre, le Wall Street Journal affirmait en novembre dernier que le Hezbollah paie des rebelles qui faisaient partie de milices soutenues jusqu'à l'an dernier par Washington pour qu'ils rejoignent ses rangs dans le Sud syrien et aurait recruté jusqu'à 2.000 nouveaux combattants.
La dernière grande confrontation en date entre le Hezbollah et l’État hébreu remonte à 2006. Les 33 jours de guerre avaient fait 1200 morts côté libanais, et 160 côté israélien, sans neutraliser le parti chiite.
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Israël a affirmé mercredi que le Hezbollah s'implantait secrètement sur le plateau syrien occupé du Golan afin de mener à l'avenir des opérations contre l'Etat hébreu. L'unité, qui selon Tel Aviv se fait appeler "Dossier du Golan", serait menée par des responsables du parti pro-iranien basés à Beyrouth, et le président syrien, Bachar el-Assad, allié au Hezbollah, n'en aurait pas...
commentaires (9)
L'occupant se donne des prétexte pour attaquer... Il installe le décor pour avoir un faux-semblant de légitimité avant de frapper On connaît la musique !
Jean abou Fayez
22 h 38, le 13 mars 2019