Les messages occidentaux se multiplient et tournent autour du même sujet : l’influence grandissante du Hezbollah au Liban a atteint un niveau inacceptable pour les États-Unis et leurs alliés et elle menace désormais les relations du Liban avec de nombreux pays. À peine un responsable américain quitte-t-il donc Beyrouth qu’un autre y arrive, pendant que parallèlement les émissaires européens se succèdent, tantôt français, tantôt britanniques ou encore allemands. À chacune de ces visites, et en dépit des sujets économiques principalement évoqués, le thème du Hezbollah revient toujours, dans un mélange de menaces à peine déguisées et de conseils amicaux.
De l’avis d’un diplomate chevronné qui a requis l’anonymat, c’est la première fois depuis des décennies, et peut-être même depuis l’indépendance du Liban, que les Américains et leurs alliés éprouvent une telle appréhension de perdre une partie de leur relation privilégiée avec le pays et se sentent obligés de multiplier les avertissements à ses dirigeants. Même lorsque George Shultz, alors secrétaire d’État sous la présidence de Ronald Reagan, avait déclaré que le Liban était atteint de la peste, suite aux attentats antiaméricains au milieu des années 80, et plus tard lors de la période de tutelle syrienne entre 1990 et 2004, les administrations américaines successives n’avaient pas eu autant d’inquiétude sur le positionnement international du pays. Selon ce diplomate, pour les Américains, le chaos au Liban serait un moindre mal en comparaison avec un alignement du Liban sur la politique iranienne, et pire encore, sur la politique russe.
Après David Hale et avant Mike Pompeo, le secrétaire d’État adjoint américain pour les affaires du Proche-Orient, David Satterfield, aurait donc été très clair avec ses interlocuteurs locaux sur la volonté des États-Unis de ne pas laisser le Liban sous l’influence de l’Iran. Il n’aurait pas clairement parlé de la Russie, mais selon le diplomate, ce serait en fait Moscou qui représenterait une grande crainte pour les États-Unis. En effet, pour ce diplomate, Washington sait parfaitement que pour de multiples raisons, dont la moindre n’est pas la mésentente confessionnelle entre sunnites et chiites au Liban et le fait que de facto une partie du Liban a une position hostile à la République islamique d’Iran, ce dernier pays ne peut pas y avoir une influence prépondérante. À moins d’un renversement total dans les rapports de force et dans le système de gouvernance basé sur le consensus, actuellement en vigueur. Ce qui n’est pas à l’ordre du jour. En dépit de ce que disent les Américains et les Britanniques sur l’influence de l’Iran au Liban, ils savent donc avec pertinence que celle-ci reste limitée. L’Iran n’a pas encore réussi à faire accepter au Liban officiel le moindre contrat économique, qu’il s’agisse de l’électricité, du pétrole ou encore des médicaments, et donc à plus forte raison, il n’a pas réussi à faire la moindre percée dans le domaine des échanges militaires et de l’équipement à l’armée libanaise. De même, il n’y a même pas entre l’Iran et le Liban un échange touristique important, ni dans un sens ni dans l’autre, en dépit des efforts déployés pour encourager une sorte de tourisme religieux et « résistant » des deux côtés. Le seul développement notable à ce sujet a consisté dans une mesure exemptant les visiteurs iraniens d’un visa préalable pour venir au Liban et qui constitue une démarche administrative et diplomatique à l’égard des pays qui traitent les visiteurs libanais de la même manière.
(Lire aussi : Satterfield invite les Libanais à opter pour des décisions « nationales »)
En dépit donc de la volonté annoncée dans un de ses discours du secrétaire général du Hezbollah de pousser vers le renforcement des relations entre la République islamique et le Liban, il n’y a eu, depuis l’élection du général Michel Aoun à la tête de la République et même depuis les élections législatives et le changement de la majorité parlementaire, aucun changement notoire dans les relations entre le Liban et l’Iran. Les Américains le savent parfaitement et, toujours selon le diplomate, leurs menaces face à tout renforcement de ces relations cacheraient en réalité un autre objectif.
Selon lui, ce que craindraient essentiellement les Américains, ce serait le renforcement des relations entre le Liban et la Russie. Ce dernier pays est actuellement en train d’étendre sa présence et son influence dans la région, en commençant par la Syrie et en allant même jusqu’à la Turquie et Israël. Pour le Liban, Moscou constituerait une bonne alternative à la complexité des relations d’une part avec les États-Unis et d’autre part avec l’Iran. La Russie est jusqu’à présent acceptée par toutes les parties libanaises et le Premier ministre Saad Hariri entretient de bonnes relations avec elle, grâce notamment à son conseiller Georges Chaabane. La Russie a même élaboré une initiative portant sur les déplacés syriens en prévoyant le retour d’un million d’entre eux installés actuellement au Liban. Même si cette initiative semble pour l’instant piétiner, faute de fonds pour la financer, elle reste d’actualité et elle constituera un des principaux sujets qui seront évoqués par le président russe Vladimir Poutine et le président Aoun au cours de la visite que ce dernier compte effectuer à Moscou en principe dans la dernière semaine du mois de mars.
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commentaires (8)
Wallah comparé au Liban, la 8eme-9eme économie mondiale, ce n’est pas quelque chose de petit.
Chady
10 h 21, le 12 mars 2019