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Liban - Affaire Carlos Ghosn

Dans une lettre à HRW, Carole Ghosn dénonce le traitement « cruel et inhumain » infligé à son époux

« L’Orient-Le Jour » s’est procuré une copie du courrier adressé par l’épouse de l’homme d’affaires libano-franco-brésilien Carlos Ghosn à l’organisation internationale de défense des droits de l’homme Human Rights Watch.

Carlos Ghosn et son épouse Carole en 2017. Loïc Venance/AFP

Le 28 décembre dernier, Carole Ghosn, épouse de Carlos Ghosn, adressait une lettre à l’organisation internationale de défense des droits humains Human Rights Watch dénonçant les « rudes » conditions de détention du patron de Renault, également chef de l’alliance Renault-Nissan-Mitsubishi. Dans cette lettre rendue publique aujourd’hui, elle pointe aussi du doigt de manière plus générale « le traitement cruel et inhumain » dont sont victimes, selon elle, les accusés au Japon. L’Orient-Le Jour s’est procuré cette lettre dans laquelle Mme Ghosn qualifie de « draconien » le système de justice japonais, car il a recours à des traitements « cruels et inhumains » envers les personnes soupçonnées d’actes criminels.

La lettre à HRW comprend deux parties essentielles. La première concerne directement les conditions de détention de l’ancien chef de Nissan et Mitsubishi Motors, démis de ses fonctions à l’issue de son arrestation, respectivement les 22 et 26 novembre 2018, dans les deux entreprises. La seconde partie revient sur le modèle japonais de justice, sur « les atteintes aux droits de l’homme » commises par ce système, selon Mme Ghosn, et sur les critiques émises par la communauté des droits de l’homme, notamment par les Nations unies, à l’égard d’un tel système.

L’homme d’affaires franco-libano-brésilien de 64 ans, arrêté le 19 novembre, est inculpé au Japon pour abus de confiance et minoration de déclarations de revenus aux autorités boursières sur huit années. Entendu par un juge pour la première fois le 8 janvier, il a clamé son innocence. Carole Ghosn exhorte donc l’organisation internationale « à faire la lumière sur les rudes conditions de détention » de son époux « qui est cruellement et inutilement détenu par les autorités japonaises depuis le 19 novembre 2018 ». Elle rappelle alors ce qu’a accompli Carlos Ghosn, « bien connu pour être une personne irréprochable, sur les plans de l’honneur, l’honnêteté et l’intégrité ». « Mon époux est largement crédité pour avoir sauvé Nissan des risques de faillite en 1999 et pour avoir rétabli la profitabilité de l’entreprise », dit-elle.

Des interrogatoires de quatre heures par jours

Carole Ghosn revient sur « l’arrestation soudaine et choquante » de son mari, privé de liberté, emprisonné depuis le 19 novembre 2018 à l’isolement, jusqu’à ce jour, et sur les conditions physiques de sa détention. « Il est confiné dans une cellule de 7 mètres carrés sans chauffage, en plein hiver, il est privé de ses médicaments. Il n’est autorisé à se doucher que deux ou trois fois par semaine et n’a droit qu’à une demi-heure d’exercice par jour. Ses repas se limitent essentiellement à du riz et de l’orge, et sa cellule demeure éclairée la nuit d’une faible lumière, ce qui l’empêche de dormir correctement. Il est privé de tout contact humain, y compris avec sa famille, et il n’est même pas autorisé à garder des photos de ses proches », décrit-elle, précisant qu’« il est juste autorisé à rencontrer ses avocats et des représentants diplomatiques, mais de manière très limitée ».

« En revanche, les procureurs sont libres de l’interroger dès qu’ils en ont envie, souvent tard en soirée et même durant les jours de congé, les dimanches, quand le centre de détention est fermé aux avocats, assure-t-elle. Quatre heures par jour, il est interrogé par les procureurs qui l’intimident, le sermonnent, l’admonestent, en l’absence de ses avocats, dans une tentative de le pousser à la confession. » Et d’ajouter que les procureurs montrent à son époux des documents écrits dans une langue qu’il ne comprend pas, qu’ils insistent pour qu’il les signe, sur base de la seule traduction qu’ils lui fournissent.

« Carlos Ghosn est victime d’un système de justice qui prend les accusés en otage », écrit encore son épouse. Et de dénoncer « la tactique » utilisée par les procureurs et par tout un système qui « prolongent de manière potentiellement indéfinie la détention des suspects pour en extraire des confessions, sans leur donner la possibilité d’une libération sous caution avant leur inculpation ».

Prisonnier du système de justice japonais

« Rien ne montre que la détention de mon époux approche de son terme, dénonce Carole Ghosn », qui rappelle que de nouvelles charges sont régulièrement retenues contre lui afin de prolonger son arrestation. « Il est d’ailleurs largement rapporté que la mise en scène de Nissan a pour objectif de le détruire à cause de sa vision stratégique pour Nissan et pour l’alliance avec Renault, qui a provoqué la colère d’une faction de durs. Mais aucun être humain ne devrait être détenu dans des conditions aussi dures avec pour seul objectif de lui soutirer des aveux », écrit-elle encore. « Mon mari est prisonnier du système de justice japonais, conclut Mme Ghosn. Il fait face à la perspective de réarrestations répétées et continues, soumises aux seuls caprices des procureurs. »

En réponse à ce courriel, Brad Adams, directeur pour l’Asie de Human Rights Watch, publiait le 10 janvier 2019 dans The Diplomat Magazine, un magazine d’affaires pour la région Asie-Pacifique, un article d’opinion invitant le Japon « à moderniser son système de justice pénale, s’il veut vivre en accord avec sa réputation de démocratie parmi les plus avancées au monde ». « L’arrestation de Carlos Ghosn a mis en exergue le système japonais de justice qui prend les accusés en otage, permettant la détention des suspects pour une longue période dans des conditions rudes, afin de les pousser aux aveux », dénonce M. Adams.

Le 28 décembre dernier, Carole Ghosn, épouse de Carlos Ghosn, adressait une lettre à l’organisation internationale de défense des droits humains Human Rights Watch dénonçant les « rudes » conditions de détention du patron de Renault, également chef de l’alliance Renault-Nissan-Mitsubishi. Dans cette lettre rendue publique aujourd’hui, elle pointe aussi du doigt de...

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