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Liban - Colloque

« Il ne faut plus supporter les cas de violences commises contre les femmes »

L’ambassade du Canada, en collaboration avec l’Institut des sciences politiques de l’USJ, a organisé un panel sur un sujet devenu central depuis le déclenchement du mouvement international MeToo.

Dans le cadre de la Semaine des droits de l’homme, l’Université Saint-Joseph a consacré une rencontre dédiée à la lutte contre les violences commises contre les femmes. Organisée par l’ambassade du Canada, en collaboration avec l’Institut des sciences politiques de l’USJ, la rencontre a réuni une pléiade d’intervenants sur un sujet devenu central depuis le déclenchement du mouvement international MeToo.

C’est Karim Émile Bitar, directeur de recherche à l’IRIS et professeur à la faculté de droit et des sciences politiques de l’USJ, qui a ouvert le débat, en soulignant que « les cas de violences domestiques sont rarement dénoncés au Liban, il s’agit d’un sujet tabou dans la société ». Dans le même sens, Emmanuelle Lamoureux, ambassadrice du Canada, a estimé que « si des efforts pour combattre les violences domestiques au Liban sont déployés (...) beaucoup de travail reste à faire ». « Une femme sur quatre aurait été victime de viol au Liban », selon la diplomate. De son côté, Jean Oghassabian, ministre d’État sortant aux Droits de la femme, relève que « le gouvernement doit davantage œuvrer avec la société civile afin de mettre en place des campagnes contre les violences faites aux femmes ». Chargée de la modération des débats, Carole Rizkallah Alsharabati, professeure à l’Institut de science politique de l’USJ, pointait la nécessité « d’agir avant tout sur le terrain » afin de provoquer un changement dans les mentalités.


Changer d’état d’esprit

Ce travail quotidien, l’association KAFA, dirigée par Zoya Rouhana, le réalise avec le développement d’initiatives destinées à la « protection de l’enfant », la lutte contre les « violences domestiques » et contre « l’exploitation et au trafic des femmes ». Zoya Rouhana explique que « la plupart des affaires de violences continuent d’être impunies au Liban » et que le principal problème se trouve dans le refus de « promulguer une loi spécifique sur les femmes ». Pour cette activiste, les journalistes ont un rôle à jouer dans la dénonciation de ces actes de violences et les pouvoirs publics doivent « davantage promouvoir l’égalité homme-femme ».


(Lire aussi :  « Le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord sont les pires dans le monde en matière de droits de l’homme »)

Ce changement s’opère également dans la représentativité ainsi que dans la gestion des affaires publiques. Nizar Saghieh, avocat et directeur de l’Agenda juridique, a estimé que le poids des femmes dans la vie publique est essentiel et déploré que « seulement six femmes siègent au Parlement parmi 128 députés ». Le colonel Ziad Kaëd Bey, chef du département de formation des Forces de sécurité intérieure, a exposé l’étendue des difficultés dans le milieu policier afin de lutter contre les violences faites aux femmes. Selon lui, il est nécessaire de « se concentrer sur l’engagement des hommes » afin de « comprendre la valeur réelle des femmes » dans la société.


Législation à réformer

Selon le colonel Kaëd Bey, la division confessionnelle complique l’établissement d’un cadre commun pour la lutte contre les violences faites aux femmes. Chaque confession dispose de ses propres règles, parfois discriminantes envers les femmes. « Il est essentiel de mettre en place un cadre national pour combattre ces violences », relève le colonel. Dans ce sens, Ghadir el-Alayli, avocat au barreau, a relevé l’importance d’amender la loi 293 votée en 2014, relative à la protection de la femme et des autres membres de la famille de la violence domestique. Selon lui, la « bataille entre cour civile et cour religieuse » complique la donne et s’inscrit dans un « contexte national particulier ».

La question des actes de violences à l’encontre des réfugiés et des travailleurs étrangers a également été soulevée par les intervenants. Légalement, la définition de la notion de « famille » ne comprend pas le travailleur étranger. Exclu du cadre juridique, celui-ci ne bénéficie d’aucune protection légale. Nizar Saghieh a vivement dénoncé cette carence juridique. Selon lui « il n’y a aucune réglementation sur les violences commises contre les domestiques ». Ne pouvant dénoncer ces délits, la seule solution pour ces victimes reste de fuir le territoire libanais, a déploré l’avocat.Le colloque s’est achevé par une intervention vidéo en provenance du Canada de Lana Wells, professeure agrégée à l’Université de Calgary. Le patriarcat demeure le principe dominant les relations entre hommes et femmes. Cette dernière a ainsi relevé l’importance de « transformer les normes sociales » en vigueur. L’égalité homme-femme constitue un travail à mener en profondeur afin de mettre un terme aux avantages de la « domination masculine ». Développé par le sociologue français Pierre Bourdieu, ce principe dénonce notamment la domination des hommes sur les femmes dans toutes les sociétés humaines.



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