Le journaliste libanais Ali el-Amine, un farouche opposant au Hezbollah. Photo D.R.
Un groupe d’activistes, d’avocats, de journalistes et de professeurs d’université ont annoncé hier la mise sur pied du comité constitutif d’un nouveau rassemblement ayant pour objectif de réhabiliter la souveraineté de l’État libanais en contrant le Hezbollah et ses ambitions au Liban par des moyens pacifiques et par le biais de l’application des dispositions de la Constitution et des résolutions internationales prévoyant le désarmement de toutes les milices opérant sur le territoire.
Baptisé le « Rassemblement pour la souveraineté », le regroupement a révélé hier, dans un communiqué, les noms de principaux membres composant le comité constitutif et les objectifs visés.
Il s’agit de Georges Selouane, Régina Kantara, Joseph Karam, Khaled Moumtaz, Rami Fanj, Mazen el-Khatib, Antoine Doueihy, Hussein Ezzeddine, Ahmad Ismaïl, Hussein Tattaya, Ali el-Amine, Assaad Béchara et Naufal Daou.
Candidat sur une liste d’opposition au tandem chiite Hezbollah-Amal dans la circonscription du Liban-Sud III lors des dernières élections législatives, en mai dernier, le journaliste Ali el-Amine avait été violemment agressé durant la campagne électorale dans la localité de Chaqra, dans le caza de Bint-Jbeil, par une trentaine de partisans du Hezb.
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Dix années de concessions
Dans un communiqué, les membres du comité fondateur ont dressé un bilan sombre de la situation générale dans le pays qui, ont-ils dit, est la résultante de « dix années de concessions consenties au profit du Hezbollah, sous le prétexte de la sauvegarde de la stabilité politique, économique, financière et sociale ». Or, poursuit le communiqué, « les Libanais se retrouvent aujourd’hui en pleine instabilité politique, une situation jamais vue auparavant, entraînant de sérieux dangers sur les plans sécuritaire et militaire, sur la scène interne et externe ».
Le texte souligne « l’effondrement économique et monétaire qui se profile à l’horizon », la « pauvreté galopante » et « la corruption épidémique » qui se répand au sein des institutions de l’État « devenues ainsi une source servant à monnayer les partis et courants politiques qui ont perdu le soutien financier dont ils bénéficiaient de l’extérieur, du fait notamment du blocus imposé par les pays arabes et les puissances occidentales à l’Iran et des sanctions couplées destinées à assécher les sources de financement du Hezbollah ».
« Face à cette situation, un certain nombre d’activistes politiques et de leaders d’opinion (…) ont décidé de lancer un appel au peuple libanais l’invitant à se joindre à une résistance intellectuelle, culturelle, politique et médiatique pacifique, pour contrer le Hezbollah et son projet iranien qui consiste à mettre la main sur l’État libanais dont ils espèrent changer l’identité politique, économique, sociale et démographique », ajoute le texte.
(Pour mémoire : Au Liban, peut-on être chiite et mener campagne contre le Hezbollah?)
Appliquer la Constitution
Les fondateurs ont exposé les objectifs visés par une telle résistance, à savoir « libérer le Liban des armes du Hezbollah et de son emprise sur le pays et œuvrer au recouvrement de sa souveraineté par tous les moyens pacifiques et démocratiques ». Ils ont également appelé à l’application intégrale de la Constitution, au démantèlement des milices libanaises et autres et à leur désarmement « sans aucune condition, de sorte à permettre à l’État d’exercer sa souveraineté sur l’ensemble du territoire ».
Les membres du comité ont par ailleurs insisté sur l’application à la lettre des résolutions de l’ONU, notamment la 1559, prévoyant le désarmement des milices, la 1701, conclue dans le cadre de la cessation des hostilités avec Israël en 2006, la 1680 prévoyant la délimitation des frontières avec la Syrie et les résolutions relatives au Tribunal spécial pour le Liban.
À ce propos, les membres du rassemblement ont insisté sur la nécessité de remettre à la justice internationale toutes les personnes qui seraient impliquées dans l’assassinat de l’ancien Premier ministre, Rafic Hariri, et tout autre assassinat ou tentative d’assassinat politique. Cinq accusés issus du Hezbollah ont été identifiés à ce jour par le TSL. Le procès, qui est actuellement à sa dernière phase, s’est déroulé en l’absence des accusés.
Les membres du rassemblement se sont enfin engagés à résister contre toute tentative visant à modifier les dispositions de l’accord de Taëf et celles de la Constitution, et toute autre manœuvre destinée à « légaliser les armes du Hezbollah ou à préserver le statu quo ».
Pour concrétiser ces objectifs, les membres du rassemblement comptent prendre contact avec l’ensemble des forces politiques, les leaders d’opinion, les activistes ainsi que les diplomates basés aux Liban et les membres de la communauté libanaise résidant à l’étranger, « pour faire connaître leur vision ».
Contacté par L’OLJ, le journaliste Naufal Daou a précisé que cette initiative ne vise pas à la création d’un parti politique, mais plutôt « à mobiliser l’opinion publique autour de l’idée de la réhabilitation de l’État afin de permettre aux partis politiques d’agir dans un climat démocratique ». « Nous n’accepterons plus les tentatives de falsification de l’identité libanaise qui visent à extirper le Liban de son environnement arabe légitime pour le transposer dans un environnement régi par des États tels que l’Iran », a-t-il conclu.
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commentaires (19)
Aucune religion: sunnite, chiite, chrétienne n'enseigne de souhaiter la mort des autres, sans oublier que l'on peut aussi faire partie du carnage ! Irène Saïd
Irene Said
09 h 49, le 02 décembre 2018