La région tout entière traverse deux mois difficiles. C’est par cette phrase qu’un responsable libanais résume la situation, incluant le Liban dans la tempête qui souffle sur les pays de la région. Tout en éliminant l’hypothèse d’une guerre militaire traditionnelle, le responsable précité évoque les pressions économiques et les coups sécuritaires pour résumer les difficultés qui attendent un grand nombre de pays dans la région, jusqu’après les élections partielles de novembre aux États-Unis, dont les résultats devraient soit porter un coup au président américain Donald Trump, soit le conforter au pouvoir et peut-être calmer ainsi ses ardeurs belliqueuses.
Selon le même responsable, de l’Iran à la Palestine, les scènes de la confrontation connaissent un regain de tension qui ne présage rien de bon. Ainsi, l’attentat perpétré à Ahwaz (Iran) lors d’un défilé militaire des gardiens de la révolution est un coup considérable porté au régime iranien par son audace et le grand nombre de victimes. D’ailleurs, la réaction rapide des autorités montre que le coup a forcément fait mal. Le premier souci du régime iranien était donc d’étouffer dans l’œuf le risque de discorde interne qui mise sur les divergences entre les habitants arabes d’Ahwaz et l’ethnie perse. Le communiqué de Daech revendiquant l’attentat est venu confirmer la thèse des autorités iraniennes sur un attentat fomenté à l’extérieur du pays. En même temps, les autorités iraniennes ont ouvertement accusé l’administration américaine et des pays du Golfe d’appuyer les terroristes, annonçant aussi une riposte ferme. Ce qui ouvre la voie à « une confrontation sécuritaire » entre l’Iran et ses adversaires régionaux. Selon le responsable précité, il y a peu de possibilités de déclenchement d’une guerre militaire entre l’Iran et les pays du Golfe ou entre l’Iran et les Américains, mais les coups sont appelés à se multiplier.
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En Syrie, l’attaque contre Lattaquié et la chute de l’avion russe causant la mort de son équipage ont constitué un nouveau palier dans le niveau de confrontation dans ce pays. En dépit des tentatives israéliennes de rejeter la responsabilité de la chute de l’avion russe sur le régime syrien, les autorités de Moscou ont officiellement pointé du doigt les Israéliens. Elles ont ainsi décidé de renforcer les défenses antiaériennes du régime syrien et se proposent d’imposer des restrictions au survol de l’espace aérien syrien. Le conflit syrien prend donc de nouvelles formes, mais il se poursuit, avec en perspective des menaces directes contre la personne du président syrien.
En Irak, les tentatives de créer des dissensions interchiites entre les groupes proches de l’Iran et leurs rivaux ont échoué, grâce à une réaction rapide du général Qassem Souleimani, chef des unités al-Qods des gardiens de la révolution iranienne, qui s’est empressé de rassembler les différentes composantes politiques chiites, mais les divisions demeurent profondes et ralentissent le processus de formation du gouvernement.
Au Yémen, la coalition menée par l’Arabie saoudite cherche à lancer une nouvelle grande offensive contre Ansarallah (houthis), et les autorités saoudiennes, qui ne parviennent pas à remporter une victoire même partielle dans la province de Hodeida, cherchent désormais à pousser le Pakistan à participer à la bataille en misant sur la crise économique aiguë que traverse ce pays doté toutefois d’une puissante armée.
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Dans la foulée, ces mêmes parties rejettent la possibilité pour les autorités libanaises d’entamer un dialogue avec le régime syrien pour favoriser le processus du retour des déplacés syriens chez eux. Le Liban a certes lancé une dynamique de retour par le biais des commissions du Hezbollah et du CPL, et grâce à l’action du directeur de la Sûreté générale Abbas Ibrahim – qui prend d’ailleurs soin d’organiser des convois de retour à partir de la plupart des régions libanaises, la Békaa, Bourj Hammoud, le Sud et Tripoli, pour éviter que le retour ne prenne une coloration confessionnelle –, mais les chiffres restent limités. Ils ont surtout une portée morale et ils ne constituent pas un phénomène marquant, d’autant que face aux quelques milliers qui sont rentrés chez eux, il y aurait des centaines qui seraient entrés au Liban clandestinement. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le chef de l’État Michel Aoun cherche à soulever le dossier des réfugiés syriens sur le plan international, en s’exprimant à toutes les tribunes possibles. Devant ses visiteurs, il ne cache pas le fait que le retour des déplacés syriens est une priorité absolue, surtout avec le plan américain de régler le conflit israélo-palestinien en implantant les réfugiés palestiniens dans les pays d’accueil.
Pour toutes ces raisons, les deux prochains mois s’annoncent donc critiques, au Liban et dans la région. S’il s’était doté d’un nouveau gouvernement, le Liban aurait peut-être été plus solide pour affronter les pressions. Mais selon le responsable précité, ce n’est même pas sûr, les divisions régionales pouvant aussi paralyser le gouvernement fraîchement formé. Le mieux serait donc, à ses yeux, d’attendre dans les conditions les plus acceptables la fin de cette étape cruciale.
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commentaires (8)
Cet article a le potentiel de causer une sédition, puisqu'il laisse croire que ces pauvres diables de petits syriens mal-chaussés, qui crèvent la dalle sous les tentes, seront utilisés probablement contre le puissant Hezb. Par qui voulez-vous qu'ils soient armées? Si un tel risque existait les réfugiés syriens seraient déjà refoulés chez eux par la Sûreté générale depuis 2 mois. Les américains ne peuvent pas contraindre le Liban d'absorber cette marée humaine. On va relire cet article dans 3 mois pour mesurer sa pertinence.
Shou fi
18 h 50, le 25 septembre 2018