La décision du conseil municipal de Ghobeyri de baptiser l’une de ses rues du nom du « martyr Moustapha Badreddine », accusé par le Tribunal spécial pour le Liban (TSL) d’être le cerveau présumé de l’assassinat de Rafic Hariri, continue à faire couler de l’encre, surtout dans les milieux politiques sunnites.
Si l’ancien député Moustapha Allouche (courant du Futur) a dénoncé « une provocation qui montre le climat de division prévalant dans le pays », le ministre sortant du Travail, Mohammad Kabbara, a qualifié l’initiative de « nouvel assassinat de Rafic Hariri, qui vise cette fois sa cause, son héritage et son public ». Pour M. Kabbara, l’objectif de la manœuvre est « d’approfondir la plaie et de multiplier les coups de poignard contre ceux qui ont mis en sourdine leurs blessures pour protéger le Liban et empêcher la discorde ». « Ceux qui rallument le feu de la sédition savent-ils qu’elle se retournera contre eux et qu’ils tomberont eux-mêmes dans leur propre piège ? » s’est-il interrogé.
« Il s’agit d’une provocation pour intimider la justice, après l’agression des voyous contre la statue de Rafic Hariri » à Beyrouth, au lendemain des élections législatives, en mai dernier, a écrit l’ancien ministre Achraf Rifi sur son compte Twitter. « Ces étalages de muscles ne nous font pas peur et la menace ne nous terrorise pas. Le Hezbollah doit savoir que justice sera faite inéluctablement », a-t-il ajouté.
L’ancien député Khaled Daher a tenu, pour sa part, une conférence de presse à Tripoli pour mettre en garde contre « le feu de la discorde », appelant le Hezbollah à « assumer ses responsabilités » et à « apaiser le climat ». « Ce qui se produit est un suicide politique de la part d’un camp, qui se met en porte-à-faux avec la justice, l’humanité, le droit, la communauté internationale, les Libanais et le monde arabe », a estimé M. Daher.
Quant au chef du mouvement de l’Indépendance, le député Michel Moawad, il a qualifié l’acte de « provocation injustifiée à l’encontre d’une large frange des Libanais et du public de Rafic Hariri », et d’« atteinte à l’essence du vivre-ensemble » qui « ne changera rien au verdict du Tribunal spécial pour le Liban s’il est rendu ».
De son côté, une source proche du Hezbollah a imputé au ministre sortant de l’Intérieur Nouhad Machnouk la responsabilité de l’incident, estimant que la demande effectuée auprès du ministère remontait à plus d’un an et était restée sans réponse. « M. Machnouk a choisi un timing hypocrite » pour faire état de cette affaire, indique cette source, en allusion aux séances en cours du Tribunal spécial pour le Liban à La Haye. « Nous ne sommes pas responsables du climat de discorde », ajoute cette source, dans une volonté de reporter le conflit à l’intérieur même du camp Hariri, en allusion à une concurrence éventuelle dans la course à la présidence du Conseil.
Faisant par ailleurs le panégyrique de Moustapha Badreddine, la source a descendu en flèche le TSL qu’elle a qualifié de « mascarade américaine à laquelle nous n’accordons aucun poids ». La source note enfin que « nous ne permettrons pas de retirer la plaque de rue portant le nom du fer de lance de la résistance de quelque manière que ce soit ».
Sur les réseaux sociaux, le climat était à la discorde, certains partisans du Hezbollah poussant même le mauvais goût jusqu’à proposer, entre autres, de débaptiser aussi l’AIB du nom de Rafic Hariri.
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commentaires (5)
Très bonne solution: beaucoup de rues dans les villes et villages du Liban manquent de noms...les quelques milliers de combattants du hezb tués en Syrie aideront finalement à les nommer... Liban poste en sera bien aise! Soeur Syrie, bien plus peuplée que notre Liban, s'est offerte les noms d'au moins 350000 rue ruelles et boulevards... planification assadiote à son meilleur...
Wlek Sanferlou
05 h 08, le 21 septembre 2018