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Liban - Éclairage

Le cabinet attend un geste de Bassil en direction de Geagea et Joumblatt

Gebran Bassil. Denis Balibouse/Reuters

Les efforts pour la formation du nouveau cabinet continuent de se heurter à de nombreux obstacles, dont seuls sont apparents les nœuds chrétien et druze. En réalité, l’origine de ces complications reste imperceptible, que ce soit en termes de facteurs locaux ou externes. Les parties à l’origine de ces complications invisibles tentent de focaliser l’attention sur les problèmes locaux apparents, notamment la querelle interchrétienne. Aussi s’emploient-elles à amplifier le conflit politique entre les Forces libanaises (FL) et le Courant patriotique libre (CPL), qui aurait pu se transformer en pugilat personnel entre Samir Geagea et Gebran Bassil si le premier n’en avait pas pris conscience, prenant alors contact avec le chef du CPL avant de lui dépêcher un message soulignant la volonté des FL de rester attachées au document de l’accord de Meerab. Cet accord, rappelons-le, repose sur le principe d’une réconciliation interchrétienne et d’un partenariat politique au sein du pouvoir une fois Michel Aoun élu président de la République. L’objectif de l’accord de Meerab était de mener M. Aoun à la magistrature suprême : il s’agissait même du point de passage obligé dans le processus de l’avènement du fondateur du CPL à ce poste.

Le président de la République a reçu successivement à Baabda le président des FL et le chef du Parti socialiste progressiste, Walid Joumblatt. Ces deux démarches ont contribué à apaiser les tensions afin que la trêve politique requise par le Premier ministre désigné soit respectée. Elles n’ont cependant pas conduit à une solution quelconque sur le plan de la formation du cabinet. Les FL restent attachées à leur droit à une saine représentation au sein du gouvernement en fonction des résultats des législatives. M. Joumblatt estime qu’il a droit aux trois portefeuilles druzes et refuse l’entrée du chef du Parti démocrate, Talal Arslane, au sein du cabinet. Durant son entretien avec M. Geagea, Michel Aoun, tout en exprimant son attachement à l’accord de Meerab, a souhaité que le leader FL évoque le dossier de la formation de l’équipe ministérielle avec Gebran Bassil. C’est en gros aussi ce qu’il a dit à M. Joumblatt, avec lequel il n’a pas discuté de la formation du nouveau cabinet, laissant à Saad Hariri le soin de régler ce problème. Le Premier ministre désigné a de son côté appelé Michel Aoun et Gebran Bassil à trouver une solution à la question de la quote-part des FL, dans la mesure où il s’agirait de l’obstacle principal à la genèse du gouvernement.


(Lire aussi : Rupture de la trêve CPL-FL, les sunnites pro-Damas montent au créneau)


Par ailleurs, l’obstacle constitué par les députés sunnites pro-Assad – considéré comme le bloc sunnite du Hezbollah – qui réclament deux portefeuilles est enfin apparu au grand jour hier. Le parti chiite fait mine de son côté de s’éloigner des soucis posés par la formation du cabinet et se contente de dire qu’il n’a aucune revendication particulière à partir du moment où sa quote-part de six ministres et de portefeuilles régaliens et principaux est respectée. Le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, avait d’ailleurs souligné la nécessité d’unifier les critères dans le processus de formation du cabinet. En réponse aux FL, il avait insisté sur la volonté du bloc Amal-Hezbollah d’agrandir sa quote-part, à l’instar des desiderata des autres composantes. Le Premier ministre désigné a pour sa part appelé à une trêve politico-médiatique qui l’aiderait à mener à bien sa mission. Il a insisté sur le fait que c’est lui, et lui exclusivement, qui forme le gouvernement, en réponse à la demande du Hezbollah d’attribuer deux maroquins à des personnalités sunnites non haririennes.
En fait, les élections auront au final contribué à électriser les relations entre les alliés, comme le FL et le CPL. Des sources FL indiquent ainsi qu’elles pensaient qu’elles étaient un allié du régime Aoun, voire un de ses piliers et un partenaire à part entière, en vertu de l’accord de Meerab. Il s’est avéré que ce n’est pas le cas. Dans son entretien télévisé mercredi à la MTV, Gebran Bassil a reflété la réalité du conflit qui l’oppose aux FL. Ces propos ont d’ailleurs été considérés comme une rupture de la trêve avec ce parti. Les griefs aounistes à l’encontre de Meerab sont nombreux : les FL auraient agi contre l’intérêt du régime. Les ministres FL se sont opposés aux projets de leurs collègues du CPL, à l’instar du PSP, des Marada et du Parti syrien national social. Cela a déplu à M. Bassil. Les FL considèrent pour leur part que c’est le CPL qui n’a pas respecté l’accord de Meerab. Elles reprochent au parti aouniste un manque de coordination et se défendent, estimant avoir fait face à des projets suspects présentés par les ministres aounistes. Mais cela ne veut pas dire pour autant qu’elles sont contre le pouvoir.


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Des milieux politiques attachés à l’esprit de la révolution du Cèdre estiment quant à eux que les FL paieront le prix du compromis politique présidentiel conclu avec le CPL, tout comme cela avait été le cas en 1989-1990, lorsqu’elles avaient adhéré à l’accord de Taëf avant que Samir Geagea n’en fasse les frais et ne passe ensuite onze ans en prison. C’est dans ce sens que Gebran Bassil a affirmé que les FL ne sont pas des partenaires au compromis présidentiel et ne constituent pas l’un des piliers du régime, aux côtés du CPL et du courant du Futur. Dans la réalité, il existe un malentendu quant à l’interprétation de l’accord de Meerab, ou bien une volonté d’en faire une mauvaise lecture. Cet accord écrit fait mention d’un partenariat politique au sein du pouvoir et d’une représentation équitable entre les deux partis au sein de tous les gouvernements du régime Aoun. Il évoque aussi une coordination, une entente et une coopération entre les deux formations tout au long de ce mandat. Or cela n’a pas eu lieu depuis le premier gouvernement Hariri après l’élection de Michel Aoun. Les FL aspiraient à un tel partenariat et souhaiteraient procéder, avec le CPL, à une lecture autocritique de l’accord pour remettre les pendules à l’heure, en vue d’une coordination dans l’étape à venir. Cela devrait se concrétiser par la reconnaissance et l’octroi d’une part ministérielle équitable aux FL, qui se trouvent aux côtés du régime. Selon des sources FL, la coordination est nécessaire pour garantir le succès de l’accord et son amélioration.


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Face à ce tableau, des forces politiques qui n’ont jamais pris au sérieux l’accord de Meerab affirment qu’elles s’attendaient à un tel dénouement, après le monopole mis en place par les deux partis sur la scène chrétienne. L’accord aurait dû inclure d’autres composantes chrétiennes au lieu de chercher à les occulter et les éliminer, estiment-elles. Si les Kataëb, le Parti national libéral, les Marada, les indépendants et d’autres avaient été associés à cette réconciliation, les relations FL-CPL ne seraient pas confrontées à la crise qu’elles traversent actuellement. Mais il n’est pas trop tard pour rectifier le tir et permettre à toutes les parties chrétiennes d’intégrer la réconciliation, sans quoi la situation ne fera que s’envenimer entre les deux composantes.

Seule la reconnaissance du droit des FL à la représentation ministérielle équitable qui leur revient de droit à la lumière des législatives est à même d’empêcher une détérioration marquée des relations entre les deux pôles de l’accord de Meerab. La rencontre prévue entre Samir Geagea et Gebran Bassil pourrait apporter des éclaircies, car il n’y aura pas, selon des sources politiques bien informées, de cabinet d’union nationale tant que MM. Geagea et Joumblatt ne sont pas satisfaits. Saad Hariri pourra-t-il convaincre enfin M. Bassil de trouver avec eux un terrain de compromis ?


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Les efforts pour la formation du nouveau cabinet continuent de se heurter à de nombreux obstacles, dont seuls sont apparents les nœuds chrétien et druze. En réalité, l’origine de ces complications reste imperceptible, que ce soit en termes de facteurs locaux ou externes. Les parties à l’origine de ces complications invisibles tentent de focaliser l’attention sur les problèmes locaux...

commentaires (5)

les memes zebres !! c'est dommage le libanais méritait mieux que celui la pour le gouverner

Bery tus

19 h 02, le 06 juillet 2018

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Commentaires (5)

  • les memes zebres !! c'est dommage le libanais méritait mieux que celui la pour le gouverner

    Bery tus

    19 h 02, le 06 juillet 2018

  • Au fait, citoyens libanais, pourquoi sommes-nous allés voter...ce fameux 6 mai 2018 ? C'est encore pire qu'avant, et nous perdons espoir de vivre un jour dans des circonstances normales, dirigés par des hommes politiques responsables, et "normaux" en quelque sorte. Irène Saïd

    Irene Said

    15 h 31, le 06 juillet 2018

  • VOYANT LES BAZARS POUR LA FORMATION DU GOUVERNEMENT SURTOUT EN FAVEUR DE PERSONNES QUI NE REPRESENTENT QU,EUX-MEMES ON SE DEMANDE POURQUOI IL Y EUT DES ELECTIONS CAR ON AVAIT DIT QUE TOUS LES PARTIES SERAIENT REPRESENTEES SUIVANT LEUR VALEUR REELLE. ET L,ON VOIT QU,ON VEUT Y INTRODUIRE DES NULLITES QUI NE REPRESENTENT QU,EUX-MEMES ET QU,ON RETARDE POUR LEURS BEAUX YEUX LA FORMATION DU GOUVERNEMENT !

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 55, le 06 juillet 2018

  • BOYCOTTEUR : LE CPL !

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 35, le 06 juillet 2018

  • Wouaou !!!!!! C'est un personnage important !!!!! Messieurs Geagea et Joumblat tenez vous tranquille et ne faites surtout rien sans son intervention !!!! Pauvre et misérable Liban !

    FAKHOURI

    06 h 22, le 06 juillet 2018

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