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Liban - Éclairage

Vases communicants et majorités mobiles

Comme par enchantement, les obstacles à la formation d’un nouveau gouvernement semblent s’aplanir, l’un après l’autre, à mesure que se multiplient les contacts bilatéraux entre les différents acteurs de ce processus.
Le coup d’envoi de cette accélération a été donné par la réunion au palais présidentiel entre le chef de l’État et le Premier ministre désigné, la semaine dernière, suivie lundi par la rencontre entre les deux hommes forts de la communauté chrétienne, Michel Aoun et Samir Geagea. Ce dernier, rappelle-t-on, avait au préalable rencontré Saad Hariri, qui à son tour avait rencontré successivement Melhem Riachi et Waël Bou Faour, jusqu’à l’échange téléphonique au finish entre M. Geagea et le chef du Courant patriotique libre Gebran Bassil, qui a juste eu le temps de recevoir M. Riachi, envoyé par M. Geagea, avant de quitter le pays pour quelques jours de vacances en famille.

Qu’est-ce qui explique cette accélération ? La clé pour comprendre, assurent les observateurs, se trouve dans la situation régionale, qui n’a pas évolué dans le sens escompté par les décideurs, ce qui les a contraints à réviser leur stratégie et à renoncer à leur politique de temporisation et de lenteur calculée dans la formation du nouveau gouvernement.

Que s’est-il donc passé au juste ? Toujours selon les observateurs, trois ou quatre développements ont provoqué le retournement de la situation : la situation au Yémen, le « deal du siècle » du président Trump et la crise économique et sociale en Iran, conjuguée aux nouvelles sanctions américaines, et enfin la situation sociale en Jordanie.
 Or aucun des développements escomptés ne s’est produit, de sorte à provoquer une mutation géopolitique de quelque importance, qui pourrait se répercuter sur le Liban selon le principe bien connu des « vases communicants ».

Ainsi, au Yémen, bien que l’on ne puisse parler d’une victoire des houthis, l’opération de Hodeïda n’a pas donné les résultats espérés, et il est désormais question de placer le port sous contrôle de l’ONU. Ce qui est en soi le signe d’un recul de la coalition menée par l’Arabie saoudite qui ne pourra plus fouiller les navires qui y entrent, imposant ainsi un blocus à la ville et à la province. À cela s’ajoute le fait que le Qatar a décidé d’arrêter ses opérations militaires et de laisser la place aux négociations.


(Lire aussi : Les FL et le CPL commenceraient à faciliter la tâche à Hariri)


Dans le conflit israélo-palestinien, de même, les mirifiques propositions américaines n’ont pas réussi à séduire une seule partie palestinienne et la convaincre de donner son accord au fameux « deal du siècle ». Les négociations ne sont certes pas terminées, mais elles semblent devoir prendre plus de temps que prévu. Et leur issue est loin d’être garantie, malgré toutes les promesses conjuguées venant de l’Arabie saoudite et de la Jordanie, partenaires prévus de ce « deal ».

Enfin, rien ne permet de prévoir que la politique américaine de sanctions renforcées contre la République islamique d’Iran pourrait porter des fruits à court terme et fragiliser l’Iran au point d’y modifier la donne interne. Reste, évidemment, le sommet Trump-Poutine qui doit se tenir le 16 juillet à Helsinki. Sur ce plan, les différents acteurs internes se sont rendus compte que ni les États-Unis ni la Russie n’ont de temps à perdre dans les dédales de la politique interne du Liban, et qu’au contraire, il serait plus payant de former un nouveau gouvernement avant la date du sommet et redire à la communauté occidentale ce que cette dernière souhaite entendre : souci de stabilité militaire et économique, respect des engagements internationaux, de la politique de neutralité à l’égard des axes régionaux (distanciation) et de la résolution 1559 de l’ONU au Liban-Sud, désarmement du Hezbollah et mise en œuvre d’une stratégie de défense nationale, conformément à une promesse formulée par le président Aoun, aussitôt après les élections législatives.

Ce qui, en outre, joue contre la poursuite de la politique de temporisation, c’est le fait que, en dépit de toutes les affirmations contraires, notamment de la part de certains responsables militaires iraniens, les législatives de mai dernier n’ont pas vraiment bouleversé l’équilibre politique interne, et que l’on se trouve en présence de ce que le chef du bloc parlementaire du Hezbollah, Mohammad Raad, décrit comme « une majorité mobile » qui pourrait changer en fonction des projets et positions des uns et des autres.

Le bras de fer régional étant au point mort, et les forces des deux géants islamiques s’annulant, les acteurs politiques et autres décideurs sont obligés de renoncer à leurs intrigues internes, à retrousser leurs manches et à édifier le pays qu’ils ont promis à leurs électeurs, d’autant que des fonds considérables sont mis à leur disposition – et pour commencer les quelque 11 milliards de dollars de prêts et de dons que la communauté internationale s’est engagée à octroyer au Liban dans le cadre de la conférence dite CEDRE – s’ils acceptent de jouer le jeu selon les règles.La formation du gouvernement pourrait même être le signal impatiemment attendu par des dizaines de milliers de touristes arabes, notamment saoudiens, pour déferler sur les centres d’estivage et les hôtels libanais.



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