Le Premier ministre, le président de la Chambre et le ministre des Affaires étrangères étant en dehors du pays, il y a peu de chances que le dossier de la formation du gouvernement connaisse des développements importants au cours des prochains jours. Il reste toutefois à préciser si l’absence des principaux concernés est la cause de cette stagnation ou bien si elle en est le résultat...
En effet, de plus en plus de milieux politiques laissent entendre que la vraie cause de la pause dans la formation du gouvernement est l’attente des développements régionaux. Il y a bien sûr le sommet entre le président russe Vladimir Poutine et son homologue américain Donald Trump prévu le 16 juillet à Helsinki. Mais ce sont surtout les développements régionaux qui sont scrutés par les parties politiques locales, notamment les remous en Iran, qui, selon les milieux libanais proches des Américains et des Saoudiens, seraient le prélude à un renversement du régime islamique, qui aurait forcément un impact sur les rapports des forces internes, notamment sur la puissance présumée du Hezbollah.
En principe, les autorités américaines avaient affirmé que les nouvelles sanctions imposées à l’Iran étaient destinées à pousser le régime dit des mollahs à changer son comportement dans la région et à cesser ses interventions dans les dossiers conflictuels, comme le Yémen, la Syrie, etc. Mais depuis quelques jours, le président américain et ses proches conseillers sont en train d’appeler ouvertement à un changement de régime en Iran. Les proches conseillers de Donald Trump ne cachent plus le fait que les sanctions économiques imposées à l’Iran, ainsi que l’interdiction faite à tous les pays du monde de conclure des accords économiques avec ce pays, notamment concernant l’achat de son pétrole, visent à provoquer une colère populaire qui finirait par renverser le régime de la République islamique. Déjà, les médias des pays du Golfe et ceux de l’Occident multiplient les informations sur des troubles sociaux en Iran, ainsi que sur des incidents sécuritaires qui se produiraient régulièrement dans plusieurs coins du pays, notamment dans la province du Baloutchistan proche de l’Afghanistan et du Pakistan.
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Les milieux libanais proches des Saoudiens et des Américains sont convaincus que le régime des ayatollahs n’en a donc plus pour longtemps et qu’il ne pourra pas tenir, face à toute cette pression économique due à l’isolement imposé par les sanctions qui devraient s’aggraver encore à partir de novembre. Selon ces milieux, la crise économique est d’autant plus aiguë qu’elle est intervenue après les espoirs de prospérité et de détente soulevés par la conclusion de l’accord sur le nucléaire en 2015, avant que le président Donald Trump décide de s’en retirer le 12 mai dernier. Selon ces milieux, les premiers résultats de la nouvelle politique américaine se sont concrétisés par l’exigence du retrait des Iraniens de Syrie, en prélude à la réduction de leur rôle dans la région, notamment au Liban.
Les milieux libanais précités considèrent qu’il ne faut donc pas former rapidement un gouvernement au Liban sur la base des rapports de force actuels reflétés par les élections législatives, puisqu’ils pourraient changer rapidement.
Les milieux proches du Hezbollah ne sont pas convaincus par cette argumentation. Pour eux, si les Iraniens comptent réduire leur présence en Syrie, c’est parce que la situation du terrain y est désormais en faveur de l’armée syrienne. De plus, leur contribution à la guerre en Syrie leur a coûté une affaire de dix milliards de dollars et, en sept ans, ils ont eu près de 3 000 morts sur place. Avec la crise économique interne, le retrait de Syrie serait donc une aubaine pour l’économie iranienne. Malgré cela, les milieux proches du Hezbollah affirment que les Iraniens ne sont pas près de se retirer. Mais ils comptent alléger leur dispositif en Iran parce que la situation y est plus stable et que l’armée syrienne est désormais en mesure de tenir les fronts et de mener les batailles sans aide extérieure. De plus, lorsque les Israéliens ont clairement demandé aux Russes le retrait des combattants iraniens et du Hezbollah des régions limitrophes du Golan occupé, la réponse est arrivée de deux côtés. D’une part, les Russes ont réclamé le retrait de toutes les parties étrangères de Syrie et, d’autre part, le président syrien a déclaré à plusieurs médias russes et occidentaux que les Iraniens et le Hezbollah sont présents en Syrie à la demande de l’État syrien.
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Autrement dit, si les Iraniens, qui n’ont jamais envoyé de troupes en Syrie, mais uniquement des instructeurs et des conseillers, décident aujourd’hui d’alléger leur présence sur place, ce n’est pas à cause des pressions, mais en raison de la situation du terrain syrien.
Cela ne signifie pas que les milieux proches du Hezbollah minimisent l’impact des sanctions américaines contre l’Iran. Mais, selon eux, la République islamique est passée par des situations plus graves, économiquement, politiquement, diplomatiquement et militairement, et elle a tenu bon. Aujourd’hui, elle peut miser sur l’émergence d’un axe qui comprend les autres pays du Brics, (Brésil, Russie, Chine, Inde, Afrique du Sud) face « à l’hégémonie » américaine, sans parler des divergences entre les Européens et les Américains. De plus, sur le terrain, l’Iran et ses alliés sont en train de marquer des points, en Syrie, mais aussi au Yémen et même en Irak, où le savoir-faire du général Qassem Souleimani a réussi à réconcilier les différentes factions chiites, créant ainsi un renversement de situation, après la victoire aux élections du camp de Moqtada Sadr, considéré au départ comme hostile à l’influence iranienne.
Pour toutes ces raisons, les milieux proches du Hezbollah conseillent aux parties locales de ne pas trop miser sur un changement dans les rapports de force régionaux et, par conséquent, de former un gouvernement le plus vite possible, parce qu’il y va de l’intérêt du Liban.
commentaires (7)
Analyse convaincante et plus que plausible, puisque basée sur des faits et non sur des supputations . Merci chere Scarlett
Hitti arlette
16 h 32, le 05 juillet 2018