Contrairement à ce qu’aurait pu espérer le président de la République, Michel Aoun, la visite du chef du Parti socialiste progressiste, Walid Joumblatt, à Baabda hier (à l’invitation du chef de l’État) ne s’est pas soldée par la percée tant attendue au niveau de la représentation des druzes au sein du prochain gouvernement, de manière à faciliter la tâche au Premier ministre désigné, Saad Hariri.
Face à l’attachement du chef du Parti démocrate libanais, Talal Arslane – principal rival de Walid Joumblatt sur la scène druze –, à ce qu’il appelle (son) « droit » à prendre part à la future équipe ministérielle, le locataire de Moukhtara persiste et signe : il revient au PSP de nommer les trois ministres druzes. « Je tiens à nommer les trois ministres druzes au sein du cabinet parce que c’est un droit que nous a accordé le vote populaire, à la faveur des résultats des élections », a déclaré M. Joumblatt à l’issue de son entretien avec le chef de l’État, faisant savoir que la question de la formation du cabinet n’a pas été abordée. S’il a loué le fait que Michel Aoun veille au maintien de la réconciliation druzo-chrétienne de 2001, M. Joumblatt n’a pas manqué de stigmatiser l’échec « d’une partie du sexennat », notamment en matière d’électricité. Il aurait ainsi tenté de rectifier le tir quant à son jugement à l’égard de la présidence Aoun. Dans un tweet posté sur son compte personnel, le 14 juin dernier, le chef du PSP avait ouvertement stigmatisé « le fiasco du sexennat dès ses premiers instants ». Un tweet qu’il a affirmé ne pas vouloir supprimer.
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Plus tard dans la journée d’hier, le Rassemblement démocratique, qui est le bloc parlementaire joumblattiste, a tenu une réunion sous la présidence de Taymour Joumblatt, député du Chouf. À l’issue de la réunion, le bloc a publié un communiqué dans lequel il a naturellement emboîté le pas à Walid Joumblatt. Le Rassemblement a exhorté « les personnes concernées par la formation du gouvernement à défaire les nœuds entravant encore le processus ». « Le Rassemblement appelle à mettre fin aux atermoiements et aux tentatives d’imposer des équations qui anéantiraient les critères unifiés et viseraient à contrecarrer certaines forces politiques et réduire leur rôle, dont notamment le Rassemblement démocratique », ajoute le texte, qui appelle au respect des résultats des législatives, à l’unification des critères (en matière de formation du gouvernement) et la conformité au poids réel des partis et forces politiques.
Il est évident que l’échec de Michel Aoun à défaire le nœud druze retardera davantage la mise sur pied du nouveau cabinet, à l’heure où les atermoiements sur ce plan font l’objet de stigmatisation de la part de plusieurs partis, dont les Kataëb.
Mais dans les milieux du CPL, on préfère se montrer optimiste. « Nous saluons la rencontre Aoun-Joumblatt, dans la mesure où elle a ouvert la voie à un dialogue constructif », déclare ainsi à L’OLJ Mario Aoun, député CPL du Chouf. Mais il insiste, toutefois, sur le fait que son parti tient à ce que Talal Arslane prenne part au prochain gouvernement à la faveur des résultats du scrutin de mai.
Commentant une possible formation d’un cabinet qui n’inclurait pas le PSP si le nœud druze persistait, Mario Aoun souligne que « dans ce cas, Walid Joumblatt causerait une grave crise politique dans le pays », assurant que son parti n’a pas encore abordé la question des quotes-parts gouvernementales.
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Les solutions de Allouche
Du côté de la Maison du Centre, on semble pragmatique. La prise de position de Walid Joumblatt complique la tâche à Saad Hariri, estime-t-on, insistant sur le fait qu’elle ne constitue pas pour autant la seule entrave. Il y a aussi les nœuds liés à la représentation des sunnites non haririens et à la querelle opposant les Forces libanaises au CPL.
Contacté par L’OLJ, Moustapha Allouche précise que la position joumblattiste au sujet de la future équipe ministérielle n’est pas un simple détail. Loin de là. « Cette position est un nœud essentiel », lance-t-il, tout en confiant « comprendre l’exigence de Walid Joumblatt ». « Je ne comprends pas comment M. Arslane peut s’en prendre à Walid Joumblatt au sujet du prochain cabinet, alors qu’il n’aurait même pas gagné le scrutin si le chef du PSP ne lui avait pas laissé une place vacante », s’alarme-t-il avant de proposer à Michel Aoun des solutions pour permettre à Saad Hariri de former son équipe : réduire ses demandes et celles du CPL de 11 à 9 ministres, choisir une personnalité sunnite (du 8 Mars) jugée acceptable – à l’instar de l’ancien ministre des Finances Mohammad Safadi qui s’était retiré des législatives à Tripoli au profit du Futur – et, enfin, nommer un chrétien proche de Talal Arslane.
« Le tiers des druzes
« Sauf que dans les milieux proches du ministre sortant des Déplacés, on écarte cette éventualité. « Nous sommes sûrs que nous ferons partie du prochain gouvernement, du fait de notre bloc parlementaire, mais aussi de notre poids populaire. D’autant que nous représentons le tiers des druzes », affirme à L’OLJ un proche de M. Arslane, qui ajoute : « Nous ne ferons aucune concession à ce sujet. » « Par sa position actuelle, M. Joumblatt est en train de réagir à notre alliance avec le CPL lors des dernières législatives », poursuit-on de même source.
commentaires (6)
MAIS, QUE REPRESENTE ARSLAN SINON LUI-MEME... ET POURQUOI LUI CONFIER UN MINISTERE ? LA, JOUMBLATT A PLEINEMENT RAISON !
LA LIBRE EXPRESSION
10 h 22, le 05 juillet 2018